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Emmanuel Macron se plie à l'exercice de la grande interview

En difficulté dans les sondages après cent jours à l'Élysée, Emmanuel Macron reconnaît, dans la première grande interview de sa présidence, publiée jeudi dans Le Point, "l'impatience du peuple", mais assume les efforts demandés.

Après la parole présidentielle rare, voici venu le temps des explications. Confronté, selon les sondages, à une sérieuse chute de popularité (passant d'environ 60 % à 40 % de satisfaits), trois mois après son arrivée à l'Élysée, et face à la perspective d’un automne chargé sur le plan social, Emmanuel Macron a accordé un entretien-fleuve au magazine Le Point daté du jeudi 31 août. Le président français précise sa conception du pouvoir, ses ambitions pour la France sur la scène internationale tout en faisant valoir les réformes à venir, à commencer par la réforme du Code du travail… qui doit justement être dévoilée jeudi. Voici les principales déclarations du président Emmanuel Macron dans cet entretien.

EXCLUSIF - Emmanuel #Macron dans #LePoint : un entretien à valeur de manifeste https://t.co/lnqUIFn0zq pic.twitter.com/iviu4RCImt

  Le Point (@LePoint) 31 août 2017

 • "L’impatience du peuple" à l’épreuve des "100 jours"

Pour Emmanuel Macron, les cent jours ne constituent "pas une étape pertinente" : "Quand on arrive au pouvoir, on ne fait pas les choses en cent jours. Ou alors nous serions le seul pays qui ferait deux ans de campagne présidentielle pour gouverner trois mois…", ironise-t-il. Cela ne l’empêche pas de juger que ses trois premiers mois à l'Élysée auront été "les plus denses qui aient suivi une élection présidentielle". Désireux d’être jugé dans la durée, il dit avoir bien conscience des attentes des Français : "Je vais devoir vivre pendant des mois avec l'impatience du peuple".

 • Ne pas être "Jupiter", mais ne pas être "dans le commentaire au jour le jour"

Durant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait développé sa conception d’un pouvoir "jupitérien". "Je n’ai jamais dit que je me voyais comme Jupiter !", croit-il bon de préciser aux journalistes du Point, tout en répétant qu’il ne voit pas le président comme un "acteur de la vie politique", mais comme "la clé de voûte" de celle-ci. "Garant des institutions", il ne peut "plus être dans le commentaire au jour le jour".

 • "L’héroïsme" comme antidote au terrorisme

"Notre société a besoin de récits collectifs, de rêves, d'héroïsme, afin que certains ne trouvent pas l'absolu dans les fanatismes ou la pulsion de mort". Emmanuel Macron regrette que "notre pays ne propose plus de héros". Pour lui, si "des jeunes de banlieue" partent en Syrie, c’est notamment parce que "les vidéos qu’ils ont regardées sur Internet ont transformé à leurs yeux les terroristes en héros". Pour le président, "nous devons redevenir un pays fier".

 • Réformer le Code du travail pour "libérer les énergies"

Assurant savoir "plus qu’aucun autre" que "les articles du Code du travail auront des conséquences sur la vie de nos concitoyens", Emmanuel Macron présente "la libération des énergies" comme le but de la réforme du Code du travail qui vise à en finir avec "l’imposture (…) d'un pays, corseté par les règles et les rentes, qui se croit un pays de liberté". Plaidant pour l’efficacité plutôt que pour la facilité, il évoque "une réforme de transformation profonde" et répète l’argument qu’il a déjà fait valoir lors de sa tournée européenne : "Nous sommes la seule grande économie de l’UE qui n’a pas vaincu le chômage de masse depuis plus de trois décennies". Avec 9,6 % de chômage, la France est, cependant loin d'être le seul pays européen à avoir échoué à vaincre le chômage de masse. Ainsi, selon l'organisme européen Eurostat, l'Italie affichait, en juin, un taux de chômage de 11,1 % et l'Espagne de 17,1 %.

 • Diminuer les emplois aidés et augmenter la CSG

Emmanuel Macron défend la diminution des emplois aidés, des "subventions déguisées" avec un retour à l’emploi durable "très faible", et reconnaît que la hausse de la CSG demandera un "effort" aux retraités "les plus aisés", en faveur des jeunes et des actifs, afin de "récompenser le travail".

Au sujet des APL, Emmanuel Macron envisage d'aller au-delà de la baisse de 5 euros de l'aide personnalisée au logement, mais "seulement dans le cadre d'une transformation profonde qui doit faire baisser les loyers". Il s'agit, explique-t-il, d'organiser "un choc d'offre".

 • Crise avec les armées : "pas de regret"

Emmanuel Macron affirme n'avoir "pas de regret" et "assume totalement" la crise avec les armées qui a conduit à la démission du chef d'état-major Pierre de Villiers en juillet. "Il y a eu une tempête dans un verre d'eau, car les gens ont perdu le sens de ce qu'est la Ve République et de son fonctionnement (…). Les armées ne font pas ce qu'elles veulent, elles ne sont pas autopilotées".

 • Une "révolution de l'éducation"

Le chef de l'État promet une "révolution de l'éducation", avec notamment la fin du tirage au sort pour entrer à l'Université, et une transformation de l'orientation "dès le début du lycée" pour "rendre l'accès au supérieur plus transparent, clair et pratique".

 • Une Europe "leader du monde libre"

Sur le plan international, Emmanuel Macron veut refonder "une Europe qui protège", en matière commerciale comme de défense, qui puisse se comparer aux puissances américaine et chinoise et devenir "leader du monde libre".

Il veut aussi convaincre les pays de la zone euro de se doter d'un budget commun représentant "plusieurs points du PIB", pour pouvoir emprunter et investir à grande échelle sur le continent. Et n'hésite pas à dénoncer les pays qui selon lui, comme la Pologne, "sape les principes de bases [de l'Union]". "[La France ne doit pas être] une grande puissance moyenne, mais une grande puissance tout court", lance, par ailleurs, Emmanuel Macron.

 • Poutine, Trump… et Erdogan

Emmanuel Macron revendique "un discours de vérité et de pragmatisme" face à ses homologues internationaux. "Je parle à tout le monde. De manière très directe, franche, alors qu'il était de coutume de ne pas parler des sujets qui fâchent", signale-t-il. "Je suis aussi celui qui est obligé de parler avec [le président turc Recep Tayip] Erdogan toutes les semaines, vous savez", déclare-t-il.

Avec AFP et Reuters