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La vague de chaleur caniculaire qui affecte la France en juin remet sur le devant de la scène les questions de pollution atmosphérique et de leur impact sur la santé.
C’est une chaleur à faire froid dans le dos. Depuis lundi, la France, et Paris en particulier, est assommée par la canicule et la pollution. Sur tout le territoire, 67 départements ont été placés en vigilance orange. Un premier épisode de fortes températures étonnamment précoce. “D’habitude, les fortes chaleurs débutent fin juin ou en juillet”, rappelle Jean-Baptiste Renard, chercheur au laboratoire de chimie et de physique de l’environnement du CNRS, contacté par France 24
Et quand le thermomètre grimpe, le risque pollution aussi, surtout en zone urbaine. “La lumière du soleil agit comme une étincelle sur des particules comme le dioxyde d’azote [émis par les pots d’échappement] et entraîne une réaction chimique à l’origine de la pollution à l’ozone”, explique à France 24 Christian George, chimiste et spécialiste de la pollution aux nanoparticules à l’Institut de recherches sur la catalyse et l'environnement de Lyon.
Rappel à l’ordre judiciaire
L’ozone, dangereux pour les personnes souffrant de problème respiratoire, n’est pas le seul risque pour les poumons et les bronches des citadins en été. La concentration en particules fines dans l’airmenace aussi la santé. Émises par les véhicules, usines ou encore par l’agriculture, elles sont des cancérigènes de classe 1 (le lien est notamment avéré avec le cancer du poumon) pour le Centre international de recherche sur le cancer (Circ).
Ces deux facettes de la pollution atmosphérique, risquent de coûter à l’État un rappel judiciaire à ces devoirs sanitaires. La rapporteuse publique devant le Conseil d’État a proposé, mercredi 21 juin, d'exiger de l’exécutif français qu’il prenne “dans le délai le plus court possible” les mesures nécessaires pour ramener les concentrations en dioxyde d’azote et en particules fines sous les valeurs limites fixées par l’Europe en 2008. Les juges n’ont pas encore statué - ils devraient le faire dans les semaines à venir -, mais c’est déjà une première victoire pour l’ONG Les Amis de la Terre, qui a saisi le Conseil d’État de l’affaire en 2015.
La France n’est pas le seul pays à ne pas respecter les seuils européens de pollution de l’air. L’Allemagne, l’Italie, l’Espagne sont dans le même cas. La multiplication des vagues de chaleur potentiellement mortelles, soulignée dans une étude publié le 20 juin dans Nature Climate Change, met l’Europe en général dans une situation sanitaire délicate.
La rencontre entre pollution à l’ozone et aux particules fines peut, en effet, aboutir à des étés meurtriers comme celui de 2003. Durant le mois d’août de cette année-là, il y a eu 20 000 décès supplémentaires dus en partie à ce cocktail explosif.
Le souvenir de 2003
Mais 2017 n’est pas (encore) 2003. Les citadins peuvent remercier le vent actuel : il est l’ennemi numéro 1 des particules fines qui se dispersent facilement. Même la pollution à l’ozone n’a pas encore atteint des niveaux critiques. “Ce qui est important avec l’ozone, c’est l’accumulation dans l’air et avec trois ou quatre jours de fortes chaleurs, on ne peut pas encore atteindre des records de pollution”, affirme Jean-Baptiste Renard.
Pour éviter une répétition de 2003, l’ONG Les Amis de la Terre veut que la France quitte le train du “tout routier et du diesel”. L’abandon de l’écotaxe poids-lourds, début 2017, a été “une catastrophe à cet égard”, juge Jean-Baptiste Renard.
Mais les pouvoirs publics ne peuvent pas tout faire. La circulation alternée, la vignette pollution, le développement des zones piétonnes permettent de limiter les émissions de particules fines. Mais pour l’ozone, il faut aussi avoir des voisins qui sont sur la même longueur d’onde environnementale. Il y a un phénomène d’importation involontaire de ces polluants qui peuvent voyager sur des longues distances. “C’est pour ça que la Californie craint la pollution chinoise”, souligne Christian George.