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Cagnotte des identitaires contre le sauvetage de migrants en Méditerranée : la riposte s'organise

La riposte s'organise contre l'opération de levée de fonds pour financer les actions anti-migrants d'un groupe d'identitaires : PayPal a gelé le compte et la Délégation interministérielle de lutte contre le racisme a engagé une procédure judiciaire.

La levée de fonds initiée par le groupuscule d’extrême droite Génération identitaire pour entraver les sauvetages de migrants en mer a connu un coup d’arrêt, mercredi 14 juin. La Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) a en effet annoncé avoir engagé une procédure de signalement auprès du procureur de Paris au titre de l'article 40 du code de procédure pénale.

"Il y a eu des signalements, nous avons identifié cette page Internet d'association d'extrême droite", a expliqué à l'AFP Frédéric Potier, le délégué interministériel, en martelant la volonté de "lutter sans relâche contre les actes de haine" et "débusquer, traquer tous les discours de haine sur Internet".

Les fonds, qui s’élèveraient à près de 70 000 euros, d’après Génération identitaire, étaient pour partie récoltés via PayPal, le système sécurisé de paiement en ligne, jusqu’à ce que celui-ci gèle le compte, après une campagne de signalements animée par des ONG d’aide aux migrants.

Mais "la collecte se poursuit" par virements bancaires ou chèques et "nous sommes des plus optimistes", a assuré à l’AFP Clément Galant, militant de Génération identitaire.

Pour la Dilcrach, cette démarche relève de la "provocation à la discrimination à l'égard de personnes ou d'un groupe à raison de leur origine", passible d'un an de prison et de 45 000 euros d'amende, et d'autre part "d'association de malfaiteurs en vue de commettre le délit d'entrave aux mesures d'assistance et de secours", qui peut valoir à son auteur "dix ans emprisonnement et 150 000 euros d'amende".

"Defend Europe", campagne de provocation de l'extrême droite

À la tombée de la nuit, le 12 mai, une poignée de militants xénophobes a tenté d’empêcher la sortie en mer du navire de sauvetage de SOS Méditerranée et de Médecins sans frontières, qui depuis 2 ans part en mer presque tous les jours pour porter secours aux migrants voyageant dans des embarcations précaires à destination de l’Europe.

Une opération soigneusement organisée par les antennes italiennes, allemandes, britanniques et françaises de Génération identitaire. Faire parler d’eux pour lancer une collecte de fonds qui servirait à "rassembler une équipe de professionnels, affréter un grand bateau et naviguer sur la mer Méditerranée pour contrecarrer les bateaux de ces contrebandiers humains" précise le site dédié à la campagne, baptisée Defend Europe.

Utilisant sans complexe le terme d'"invasion", ces militants extrémistes y expliquent qu’ils souhaitent "protéger nos pays de l’immigration illégale et si besoin tenir tête en mer aux bateaux des ONG tel que l’Aquarius". Directement ciblées, les organisations d’aide aux migrants sont accusées par Defend Europe d’agir "à l’unisson avec les trafiquants humains".

"C'est du banditisme"

Pour Jean-Paul Hellequin, qui lutte contre le trafic d’êtres humains en mer à travers les actions de son association Mor Glaz, dans le Finistère, en Bretagne, "empêcher des gens de venir dans un pays où éventuellement ils pourraient être accueillis est bien plus odieux que de la piraterie". "C’est du banditisme !", s’emporte le marin, qui alerte fréquemment les autorités sur "le danger de voir racheter des navires-poubelle abandonnés en Bretagne par des trafiquants d’êtres humains".

Bilan de la semaine dernière au large de la Libye: 10.000 migrants secourus, 58 morts, au moins 100 disparus https://t.co/UE4sgLDvif #AFP pic.twitter.com/W8P9exdFHm

— Fanny Carrier (@fannycarrier) 30 mai 2017

De leurs côtés, SOS Méditerranée et Médecins sans frontières préfèrent ignorer et ne pas communiquer autour de l’initiative de Génération identitaire et ses variantes européennes pour se concentrer sur leur mission de sauvetage des migrants, dont les arrivées se sont multipliées depuis fin mars. À tel point que l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) faisait savoir fin mars que la situation en 2017 dépassait "tout ce que l’on a pu voir jusqu’à maintenant en Méditerranée". Depuis le début de l’année, selon le Haut-Comité aux réfugiés, plus de 75 000 personnes sont arrivées sur les côtes méditérranéennes et près de 1 843 sont mortes en mer.

AVEC AFP