La candidate du Front national à la présidentielle Marine Le Pen a déclaré mercredi qu’elle ne proposerait plus le rétablissement de la peine de mort dans son programme, lui préférant la perpétuité "réelle".
Un virement de bord pour Marine Le Pen ? La présidente du Front national a annoncé mercredi 1er février qu’elle ne proposerait plus le rétablissement de la peine de mort dans son projet pour la présidentielle de 2017. Questionnée sur le sujet dans l'émission Questions d'Info, celle qui s'est dite par le passé favorable "à titre personnel" à la peine capitale a annoncé lui préférer la "perpétuité réelle".
Alors qu'on lui demandait si elle maintenait comme en 2012 sa proposition d'un référendum où le choix serait donné entre peine de mort et perpétuité "réelle", Marine Le Pen a répondu : "J'intègre dans mon projet la perpétuité ‘réelle’, je m'engage auprès des Français à [la] mettre en œuvre."
Elle a ensuite confirmé à l'AFP qu'elle retirait sa proposition du retour de la peine de mort, "quitte à ce que les Français la rétablissent via un référendum d'initiative populaire", un dispositif qu'elle propose et pour lequel 500 000 signatures sont nécessaires. "Avec 500 000 signatures, les Français pourront se saisir de n'importe quel sujet, je vais élargir le champ d'action possible du référendum", a-t-elle promis.
"Pas grand chose de nouveau"
"Elle ne dit pas grand-chose de nouveau. Elle veut simplement mettre l’accent sur le fait qu’elle préfère laisser les citoyens prendre la responsabilité d’un rétablissement de la peine de mort, en sachant pertinemment que la majorité de ses électeurs est pour", commente à France 24 Nicolas Perron, directeur des programmes à l’association Ensemble contre la peine de mort. "Elle veut sans doute apparaître comme un peu moins radicale", ajoute-t-il. Mais pour lui, un référendum à 500 000 personnes, "c’est très peu".
"Quand on regarde l’électorat du Front national en 2015, on constate qu’un large socle de votants est en faveur de la peine de mort, 30 à 40 points au-dessus de la moyenne nationale", précise Nonna Mayer, chercheuse à Science-Po spécialiste des électeurs d'extrême droite. Une étude de l’Ipsos conduite en 2016 révèle en effet qu’à la question "Faudrait-il rétablir la peine de mort ?", 82 % des sympathisants FN interrogés disent être "d’accord".
Le FN a défendu le rétablissement de la peine de mort depuis son abrogation, en 1981. Mais la députée FN Marion Maréchal-Le Pen, comme son collègue de l'Assemblée Gilbert Collard (apparenté FN) avaient exprimé à titre personnel leur opposition à ce rétablissement.
La "perpétuité réelle", un "traitement cruel"
Au lendemain de l'attentat contre Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015, Marine Le Pen avait redit son attachement à la peine de mort : "Je pense que la peine de mort doit exister dans notre arsenal juridique, à charge évidemment pour les jurés, pour les crimes les plus odieux, de pouvoir faire ce choix."
"L’accession au pouvoir de Marine Le Pen pourrait rendre possible le retour de la peine de mort", constate Nicolas Perron, qui rappelle qu'en Europe, seule la Biélorussie pratique encore des exécutions. Par ailleurs, pour son association, la notion de "perpétuité réelle" est "la même chose" que la peine de mort dans la mesure où il s’agit d’un "traitement cruel, inhumain et dégradant". En France, aujourd’hui, les cas de peine de prison à perpétuité avec période de sûreté illimitée (condamnant le détenu à finir sa vie derrière les barreaux) sont extrêmement rares.
Avec AFP