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Le leader de la révolution cubaine, Fidel Castro, a soutenu des luttes indépendantistes sur le continent africain. De l'Algérie à l'Afrique du Sud, en passant par l'Angola, cet engagement lui vaut jusqu'à ce jour la reconnaissance de nombreux pays.

Lors de sa dernière apparition publique, Fidel Castro arborait comme à son habitude un jogging pour son 90e anniversaire, le 13 août dernier. Mais pas n’importe lequel : un survêtement vert et blanc de l’équipe nationale de football algérienne. Un clin d’œil à tout un pays avec lequel Cuba a partagé une partie de son Histoire.

Quand, vers la fin des années 1950, grouille sur le continent africain un vent de révolte indépendantiste, Cuba vit ses premières heures de la révolution castriste. Dès le début des années 1960, Fidel Castro ambitionne d’exporter ses idéologies anti-impérialistes en Amérique latine mais aussi en Afrique. En décembre 1961, "El Comandante" livre des armes à l'Algérie, colonie française, sur un navire cubain afin de venir en aide aux combattants du Front de Libération nationale (FLN), opposées aux troupes françaises depuis 1954.

L’Algérie, la “Mecque des révolutionnaires”

Devenue indépendante en 1962, l’Algérie est toujours restée reconnaissante envers Fidel Castro, qui avait d’ailleurs reçu le président algérien de l’époque, Ahmed Ben Bella, avec les honneurs. Surtout que les Cubains lui sont une nouvelle fois venus en aide lors de la “guerre des sables” (1963-1964), au cours de laquelle le Maroc a tenté d’envahir son voisin. "El Comandante" a alors missionné des avions, des blindés ainsi qu’un contingent de 2 000 hommes pour soutenir l’armée algérienne et repousser l’ennemi.

Depuis, il existe entre l’Algérie et Cuba une alliance indéfectible. Fidel Castro est accueilli en héros dans le pays en 1972, et après sa mort, le 25 novembre, le chef d’État actuel, Abdelaziz Bouteflika, a décrété “un deuil national de huit jours”.

Car grâce à ses interventions, Cuba s’est érigé en défenseur des peuples indépendantistes. "Nous ne sommes pas seulement un pays latino-américain, mais aussi un pays latino-africain. Le sang africain coule abondamment dans nos veines", avait à l’époque déclaré Fidel Castro. Dans ce contexte, l’Algérie devient la "Mecque des révolutionnaires", où les leaders indépendantistes africains se retrouvent lors de réunions secrètes. Entre 1963 et 1965, le médecin argentin Ernesto Che Guevara, mandaté par Fidel Castro pour devenir l’ambassadeur de l’internationale révolutionnaire, s’entretient avec les leaders indépendantistes angolais Agostinho Neto et Lucio Lara, et Amilcar Cabral du parti de l'indépendance de Guinée et du Cap Vert. Le pays devient aussi le terrain d’entraînement des combattants du Front de libération du Mozambique (Frélimo).

L’Angola, la plus belle page de l’internationalisme

L'armée cubaine a aussi laissé plus brièvement son empreinte en Éthiopie (1977-1978) et dans l'ancien Congo belge (1965). Mais, pour Fidel Castro, les "plus belles pages d'internationalisme" ont été écrites sur les champs de bataille d'Angola (1966-1988). Dans les années 1970, des soldats cubains ont été déployés dans le pays pour soutenir le Mouvement populaire de libération de l'Angola (MPLA) contre le colonisateur portugais. Cuba y a envoyé jusqu'à 50 000 hommes, qui ont porté à bout de bras le MPLA, au pouvoir depuis l’indépendance en 1975, contre la guérilla de Jonas Savimbi, soutenue par l'Afrique du Sud.

Le chef du MPLA et président de l’Angola depuis 1979, José Eduardo Dos Santos, 74 ans, s'est dit "consterné" par la disparition de Fidel Castro. Dans une déclaration aux accents très révolutionnaires, il a salué une "figure historique et transcendante". Surtout, il a rappelé la "contribution inoubliable de son pays (...) à la défense, au maintien de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Angola".

Le rôle de Cuba, et de Fidel Castro, a aussi été déterminant dans la bataille de Cuito Cuanavale (1988), qui opposait les soldats angolais et cubains aux combattants de l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA), soutenus par l'armée sud-africaine (SADF). La légende veut que, au cours de ce conflit le plus sanglant du continent après la Seconde Guerre mondiale, "El Comandante" téléphonait lui-même ses ordres à ses officiers déployés à plus de 14 000 kilomètres de La Havane.

Ces huit jours de combat ont abouti à un accord précipitant l’indépendance de la Namibie (1990) puis la chute de l’Apartheid (1991). Quand Nelson Mandela sort de prison, il décide de se rendre à Cuba, le 26 juillet 1991, pour son premier voyage à l’étranger. Les Cubains ont "brisé le mythe de l’invincibilité des oppresseurs blancs. Elle fut une inspiration pour tous ceux qui luttaient à l’intérieur de l’Afrique du Sud", déclare celui qui deviendra le président de l’Afrique du Sud en 1994.

L’armée en blouse blanche

Reste que la chute du mur de Berlin en 1989 et l'implosion de l'URSS deux ans plus tard ont mis un coup d’arrêt aux velléités révolutionnaires de Fidel Castro. Pour continuer à exporter ses valeurs socialistes, il s’est alors appuyé sur l'internationalisme médical en envoyant des délégations de médecins à l’étranger pour effectuer des formations, notamment en Afrique du Sud grâce à l’accord sur la santé entre Nelson Mandela et Fidel Castro.

Aujourd'hui encore, quelque 50 000 médecins et autres employés du secteur de la santé effectuent des "missions" dans 66 pays d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie, selon le gouvernement cubain. À la suite de la mort du dirigeant, le ministère de la Santé d'Afrique du Sud s'est déclaré "reconnaissant à Castro et au peuple de Cuba”. Plus récemment, Cuba s'était présenté en fer de lance dans la bataille contre Ebola en Afrique de l'Ouest. Avec un effectif de 461 personnes sur le terrain fin 2014, l'île de onze millions d’habitants avait dépêché le contingent médical le plus important fourni par un État pour combattre le virus hémorragique. C’est peut-être cela, aujourd’hui, l’héritage castriste.