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La Deutsche Welle veut que la justice condamne le ministre turc de la Jeunesse et des Sports

La chaîne d'information en continue Deutsche Welle a saisi la justice turque afin d'obliger Ankara à lui restituer un entretien saisi par le ministre turc de la Jeunesse et des Sports, Akif Cagatay Kilic.

Les tensions entre l'Allemagne et la Turquie ont franchi une nouvelle étape. La Deutsche Welle, une chaîne allemande d'information en continu, a déposé plainte à Ankara contre un ministre turc, lundi 26 septembre au sujet d'une interview portant sur le climat politique et l'état des libertés individuelles en Turquie.

Elle demande à la justice d'obliger le ministre turc de la Jeunesse et des Sports, Akif Cagatay Kili, à lui remettre l'enregistrement d'un entretien effectué il y a près de trois semaines dans le cadre de l'émission "Conflict Zone". Les autorités avaient saisi le matériel des journalistes de la Deutsche Welle à la sortie de l'interview.

Soutien de Berlin

"Atteinte à la liberté de la presse", "procédés anti-démocratiques", censure : les responsables de la chaîne allemande ne décolèrent pas depuis l'incident. Ils ont reçu le soutien du gouvernement allemand qui a affirmé, par la voix d'un porte-parole du ministère des Affaires étrangères, que "la liberté de la presse doit aussi être appliquée en Turquie".

À ces accusations, le ministère turc de la Jeunesse et des Sports a répondu que les questions posées ne correspondaient pas à ce qui était convenu, que certains commentaires faits par le journaliste étaient "plutôt des accusations" et que, dans ces conditions, "il était impossible de délivrer l'autorisation de diffusion" de l'entretien.

Pour la Deutsche Welle il n'était pas question de faire parvenir au ministre les questions à l'avance. Michel Friedman, le journaliste responsable de l'émission "Conflict Zone", a regretté un incident "sans précédent en 20 ans de carrière".

Du génocide arménien à "Erdowie, Erdowo, Erdogan"

Cet affrontement médiatico-judiciaire intervient dans un climat diplomatique de plus en plus dégradé entre la Turquie et l'Allemagne, où vit une forte minorité turque. Ankara n'a pas pardonné à l'Allemagne d'avoir, en février 2016, reconnu le génocide arménien.

Berlin a aussi été l'une des capitales les plus critiques à l'égard de la répression menée par le Premier ministre turque Recep Tayyip Erdogan après le coup d'État raté en juillet 2016. Les autorités allemandes ont aussi interdit la retransmission sur écran géant d'un discours du chef du gouvernement turc lors d'une manifestation à Cologne en soutien à Ankara.

Les médias allemands ont souvent provoqué le mécontentement des autorités turques. La chanson satirique "Erdowie, Erdowo, Erdogan", imaginée par une émission humoristique de la chaîne NDR, a entraîné un incident diplomatique entre les deux pays en mars 2016, tandis qu'un dossier consacré par le magazine "Spiegel" à la Turquie, en septembre dernier, a été qualifié de "ramassis de préjugés" par le ministère turc des Affaires étrangères.

La chaîne Deutsche Welle n'est que la dernière victime en date de cette bataille diplomatique. Mais elle est aussi la première à répliquer en déposant plainte contre le gouvernement.

Avec AFP