logo

Alors que Nidaa Tounès, le parti du chef de l'État tunisien, est au bord de l'implosion, le gouvernement a été remanié, jeudi, en profondeur. Une dizaine de ministères sont concernés, dont l'Intérieur et les Affaires étrangères.

Il est intervenu plus tôt que prévu. Alors que les observateurs pensaient que le changement de gouvernement de la Tunisie serait annoncé dimanche après le congrès de Nidaa Tounès, le parti présidentiel, c’est finalement jeudi 7 janvier que le remaniement ministériel a eu lieu.

Ce remodelage, pressenti à plusieurs reprises au cours des derniers mois, est le premier depuis l'entrée en fonctions, fin 2014, de Béji Caïd Essebsi, premier président démocratiquement élu au suffrage universel de l'histoire de la Tunisie. Il intervient alors que le gouvernement dirigé par Habib Essid fait l'objet de vives critiques face au manque de résultats aussi bien dans le plan économique - la croissance en 2015 devait être inférieure à 1% - que sécuritaire.

"2015 [...] a été une année difficile", avait reconnu le président à l'occasion du Nouvel An. Mais "notre État est toujours debout, le gouvernement fait son devoir et nous sommes en train d'avancer", avait-il assuré. "Nous croyons que l'an prochain sera meilleur [...] et que ce sera un nouveau départ vers la réalisation des objectifs pour lesquels a eu lieu la révolution."

Une dizaine de portefeuilles concernés

Une dizaine de portefeuilles, sont concernés par le remaniement, dont celui l'Intérieur, poste-clé dans une Tunisie frappée en 2015 par plusieurs attaques du groupe État islamique (EI). Technocrate de 46 ans, Hedi Majdoub succède ainsi à Najem Gharsalli au ministère de l'Intérieur, où il avait déjà occupé diverses fonctions entre 2011 et début 2015.

Aux Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, diplomate qui avait occupé le poste de secrétaire d'État peu après la révolution, remplace Taieb Baccouche, une figure de Nidaa Tounès opposée à une alliance avec le parti islamiste Ennahda, pourtant représenté au gouvernement par Zied Laadhari, maintenu à son poste de ministre de la Formation professionnelle et de l'Emploi.

"Dernière carte"

"Le remaniement montre bien que le président et le Premier ministre n'étaient pas satisfaits du rendement de certains", analyse à l'AFP le politologue Salaheddine Jourchi, selon qui l'ex-ministre de l'Intérieur fait clairement les frais "des derniers attentats". Mais c'est aussi "la dernière carte de Habib Essid : si la nouvelle équipe échoue, cela mettra fin à sa carrière politique", estime le spécialiste.

Le premier gouvernement Essid était issu des législatives et de la présidentielle de l'automne 2014, remportées par le parti Nidaa Tounès, fondé en 2012 par Béji Caïd Essebsi. Dans la foulée, la formation, pourtant anti-islamiste, avait scellé un accord avec Ennahda. Défendue bec et ongles par Hafedh Caïd Essebsi, le fils du chef de l’État, cette alliance avaient été dénoncée par nombre de responsables de Nidaa Tounès, parmi lesquels Mohsen Marzouk.

Or, comme le signale Salaheddine Jourchi, "on constate que dans ce remaniement tous les éléments proches de M. Marzouk ont été éloignés". Le divorce entre les tenants d’une alliance avec les islamistes et ceux qui y sont opposés semble consommé. D’autant que Mohsen Marzouk a annoncé la création d'un nouveau parti qu’il pourrait entériner dimanche, jour du congrès de Nidaa Tounès.

Les nouvelles nominations du gouvernement Essid II :

– Omar Mansour, ministre de la Justice
– Hédi Majdoub, ministre de l’Intérieur
– Khemais Jinhaoui, ministre des Affaires étrangères
– Mohamed Khalil, ministre des Affaires religieuses
– Youssef Chahed, ministre des Affaires locales
– Mahmoud Ben Romdhane, ministre des Affaires sociales
– Sonia Mbarek, ministre de la Culture
– Mongi Marzouk, ministre de l’Énergie et des Mines
– Mohsen Hassan, ministre du Commerce
– Anis Ghedira, ministre du Transport
– Kamel Jendoubi, ministre chargé des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et les organisations des droits de l’Homme
– Kamel Ayadi, ministre de la Fonction publique, de la Gouvernance et de la Lutte contre la corruption
– Khaled Chouket, ministre chargé des Relations avec le Parlement et porte-parole du gouvernement

Avec AFP