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Le Parlement européen déçoit le défenseurs de la neutralité du Net

Le Parlement européen a validé, mardi, les mesures très controversées à l'encontre de la neutralité du Net. À tel point que certains défenseurs de ce principe parlent d’un jour noir pour les internautes européens.

Une victoire pour les Internautes européens ou une défaite pour l’Internet libre sur le Vieux Continent ? Le Parlement européen a donné son feu vert, en deuxième lecture, au très attendu paquet réglementaire sur le “marché numérique unique”, mardi 27 octobre. Il a, en revanche, rejeté tous les amendements qui avaient été déposés pour renforcer la protection de la neutralité du Net, l’aspect le plus controversé de cet ensemble de mesures.
 
La fin des frais d'itinérance

Seule bonne nouvelle saluée par tous : ce texte instaure la fin des frais d’itinérance au sein de l’Union européenne à l’été 2017. Les opérateurs français, par exemple, ne pourront alors plus facturer de surcoût pour un appel passé ou reçu depuis l’Allemagne ou l’Espagne.

“C’est une victoire historique”, s’est réjouit à ce propos Andrus Ansip, le vice-président de la Commission européenne en charge du marché numérique unique. Il a précisé, lors de son adresse au Parlement mardi 27 octobre, que les tarifs téléphoniques transfrontaliers doivent commencer à baisser dès cette année.

S’il s’est réjoui de la fin des frais d’itinérance au sein de l’Union européenne, l’architecte en chef de cette réforme, Andrus Ansip, ancien Premier ministre de l’Estonie, s’est montré plus discret concernant l’autre volet de ce paquet numérique : la neutralité du Net. Et pour cause, le texte final voté par le Parlement a laissé un arrière-goût d’occasion ratée pour les défenseurs d’un Internet ouvert et libre pour tous, tels que la Quadrature du Net française ou l’EFF (Electronic Frontier Foundation). Même Tim Berners-Lee, le père du World Wide Web, a dénoncé une réglementation trop imparfaite pour être honnête.
 

Les nombreux “mais” du texte
Les avocats d’une stricte neutralité du Net sont d’autant plus déçus du texte final qu’une première mouture adoptée en avril 2014 les avait comblés d’aise. Elle définissait ce concept comme “le principe selon lequel l’ensemble du trafic Internet était traité de façon égale, sans discrimination, ni limitation ni interférence, indépendamment de l’expéditeur, du destinataire, du type, du contenu, de l’appareil, du service ou de l’application”. Le document final comporte plusieurs “mais” à ce principe général qui apparaissent, aux yeux des détracteurs du texte, comme autant de concession aux fournisseurs d’accès à l’Internet (FAI).

Ces derniers pourront, notamment, mettre en place des “services optimisés” qui bénéficieront du meilleur débit possible. La téléchirurgie, la vidéo-conférence en haute-définition ou des appels de secours passés depuis des voitures connectées sont concernés par cette première exception. Il s’agit de garantir un fonctionnement sans faille à des services jugés vitaux. Mais il n’y a pas de liste précise des critères pour définir un “service” éligible à ce traitement de faveur.

Le streaming mieux loti que le téléchargement ?

La nouvelle réglementation permettra aussi aux FAI de favoriser certaines technologies prapport à d’autres si “des exigences techniques de qualités de service objectivement différentes” existent. En clair : un opérateur pourra décider que le streaming (YouTube par exemple) nécessite un débit constant plus stable que le téléchargement ou qu’il faut allouer davantage de bande passante aux jeux en ligne qu’à la gestion de mails.

Le texte n’interdit pas non plus une pratique très critiquée par les partisans d’une neutralité du Net en bonne et due forme : les accords “zero rating”. Les FAI peuvent inclure dans les forfaits certains services “maison” ou de partenaires. Dans ce cas, cs connecter au service vidéo de tel opérateur ou aller sur Facebook ou YouTube, par exemple, n'est pas décompté du volume de données disponibles dans un forfait. Les géants du Web auront donc un avantage sur des petites start-up, car ils auront les moyens financiers de négocier ce genre d’accord "zero rating".
 

Pour les détracteurs du texte, la protection de la neutralité du Net a fait, mardi 27 octobre, un sérieux bond en arrière. Mais la Commission européenne estime que ce sont des arguments de privilégiés. Elle rappelle que c’est la première fois que le principe général de la non-discrimination sur l’Internet est édicté au niveau européen. Une règle qui s’appliquera dès 2016 dans partout dans l’UE alors que, pour l’instant, une majorité d’États n’avait “pas de lois protectrices” des droits des internautes.