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Les internautes appelés à financer un navire pour sauver les migrants en Méditerranée

L'association SOS Méditerranée a lancé une campagne de financement participatif pour acquérir un navire. Cette embarcation deviendrait leur première "ambulance flottante" pour réduire le nombre de noyades en Méditerranée.

En une journée, le montant des promesses de dons est passé d’un peu moins de 68 000 euros à plus de 75 000 euros, mardi 15 septembre. "Je n’arrive pas à détacher mes yeux du compteur sur Ulule [plateforme de financement participative française, NDLR]", reconnaît Sophie Beau, co-fondatrice de l’association franco-allemande SOS Méditerranée. Elle espère que la générosité des internautes leur permettra de financer l’achat d’un bateau pour mener des opérations de sauvetage de migrants en détresse en mer Méditerranée.

Pour cette humanitaire, l’urgence est évidente. Plus de 2 800 personnes se sont noyées en Méditerranée depuis le début de l’année, dont 75 ces derniers jours, a souligné l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) mardi 15 septembre.

1,2 million d'euros pour acheter Markab

La vague de solidarité générée par ce triste décompte des morts en mer et par la crise humanitaire vécue par les migrants qui arrivent en Europe, a mis cette initiative, lancée samedi 12 septembre, sur les bons rails. "Je suis très heureuse de toutes ces promesses de dons, mais on n'y est pas encore", souligne cette humanitaire qui a travaillé par le passé pour Médecins du Monde et Médecins sans Frontières.

SOS Méditerranée s’est donnée une quarantaine de jours pour récolter au moins 100 000 euros. Ce premier palier leur permettra seulement de louer un bateau pour un mois. L’association voit, en fait, bien plus grand : elle veut acheter un navire et mettre en place une opération pérenne pour venir en aide toute l'année aux migrants en détresse en mer Méditerranée. Pour ce faire, l’ONG espère lever 1,2 million d’euros grâce au financement participatif.

Ces fonds serviraient à acquérir le Markab, une embarcation qui correspond à l’objectif que s’est fixé SOS Méditerranée. Il s’agit d’un bateau pilote long de 60 mètres, équipé pour prendre la mer en été comme en hiver et capable d’accueillir 400 personnes à son bord. En cas d’urgence, il pourrait en transporter bien plus, affirme Sophie Beau.

Mais même 1,2 million d’euros ne suffiraient pas pour financer sur le long terme toute l'opération, y compris le recrutement d’un équipage complet. Budget estimé : aux alentours de 3 millions d’euros. L’association espère que les dons reçus serviront à mobiliser les bonnes volontés d’autres acteurs ou mécènes aux poches bien garnies.

"Ambulance flottante"

Qu'on ne s'y trompe pas, SOS Méditerranée n'est pas une ONG fondée à la faveur de l'émotion crée cet été par les images des milliers de migrants essayant désespérément de rejoindre les côtes européennes. Sophie Beau travaille sur le projet depuis six mois avec le co-fondateur de l’association, Klaus Vogel, un marin allemand expérimenté qui a été capitaine pour les plus grands armateurs mondiaux. SOS Méditerranée s’est aussi associé à Médecins du Monde, qui s’est engagé à médicaliser l’opération.

Leur idée est de faire partir le Markab d'Italie pour rejoindre les eaux internationales au plus près des côtes libyennes "d'où partent la plupart des migrants actuellement", souligne Sophie Beau. Le bateau deviendrait une sorte d'"ambulance flottante", capable d'intervenir rapidement lorsque les gardes-côtes italiens reçoivent et répercutent les appels de détresse.

Dès cet hiver

SOS Méditerranée espère pouvoir mettre le navire en mer cet hiver. Un choix qui peut paraître étrange : la plupart des traversées se déroulent durant le printemps et l’été, lorsque les eaux sont plus calmes. Mais Sophie Beau rappelle que "le pic des victimes en 2014 était en hiver". C'est aussi une manière pour l'association de démontrer dès le départ qu'elle est présente même lorsque l'attention médiatique et politique retombe parce que le flux migratoire est moins pressant.

Les deux co-fondateurs sont conscients qu’un seul bateau comme le Markab n’est qu'une goutte dans la mer Méditerranée. En théorie, n’importe quel navire, marchand ou militaire, peut intervenir lorsqu’il reçoit un appel de détresse d’une embarcation en péril transmis par les autorités. Mais en pratique, ils le font ou non au terme "d’un calcul" qui prend en compte "d’autres priorités", explique Klaus Vogel au quotidien "Le Parisien".

L’association SOS Méditerranée compte ne pas en rester à un seul bateau. Leur idée serait d’en ajouter un autre sur le trajet entre la Turquie et la Grèce. Mais avant d’en arriver là, encore faut-il réussir à récolter l'argent nécessaire pour acquérir le Markab.