Plus d'une semaine après l'agression à Bujumbura du journaliste Esdras Ndikumana par des membres des services du renseignement burundais, la présidence a officiellement condamné le "mauvais traitement" infligé au reporter.
Après une diziane de jours de silence, la présidence du Burundi a condamné, jeudi 13 août, l'agression subie le 2 août par Esdras Ndikumana, le correspondant de l'Agence France presse (AFP) et de Radio France internationale (RFI) au Burundi qui avait été arrêté et torturé par des membres des services de renseignements.
#Burundi : @PierreNkurunziz demande qu’auteurs de brutalité contre @rutwesdras soient châtiés. @RFIAfrique @afpfr pic.twitter.com/XnQAiqRihf
— Burundi | Présidence (@BdiPresidence) 13 Août 2015"La présidence de la République condamne ce comportement violent et inacceptable dans un État de droit, peut-on lire dans un communiqué publié sur Twitter. Le chef de l’État [Pierre Nzurunziza] a personnellement instruit l’Administrateur général du service national de renseignement (SNR) de déterminer d’urgence les circonstances de ces actes d’un autre âge, afin que les auteurs soient poursuivis et châtiés conformément à la loi." Et le texte de poursuivre : "La présidence espère que cet impair ne nuira pas aux relations de bonne collaboration entre les institutions et le monde des médias."
Esdras Ndikumana, 54 ans, correspondant au Burundi de l'AFP et de RFI depuis une douzaine d'années et figure du journalisme indépendant dans son pays, avait été arrêté puis roué de coups par des membres du SNR alors qu'il prenait des photos sur les lieux de l'assassinat du général Adolphe Nshimirimana, proche du chef de l'État et cacique du régime .
Tabassé en présence de hauts responsables du parti au pouvoir
Dans les locaux du SNR, le journaliste avait été violemment frappé au dos, aux jambes et sur la plante des pieds, pendant près de deux heures, avant d'être relâché et hospitalisé avec un doigt fracturé, de multiples contusions et pouvant à peine marcher. Son arrestation avait eu lieu en présence de plusieurs hauts responsables du parti au pouvoir, de chefs des services de sécurité, ainsi que des cadres à la présidence, qui n'avaient rien fait pour empêcher qu'il ne soit embarqué.
Le tabassage d’Esdras Ndikumana a suscité l'indignation de l'AFP et de RFI, qui ont dénoncé une agression "scandaleuse" et exigé dans un courrier officiel des explications de la part des autorités, ainsi que des sanctions contre les coupables.
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Le reporter est actuellement soigné à l'étranger pour une fracture du doigt, un déchirement du tympan, des douleurs persistantes sous les pieds et dans le dos, ainsi qu'un taux de diabète préoccupant, conséquence notamment du choc de l'agression.
Depuis la crise suscitée par l’annonce d’une candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat, la plupart des médias indépendants sont réduits au silence et de nombreux journalistes, cibles de menaces ou d'attaques, ont fui le pays ou se cachent.
Dans un texte commun, les hauts représentants de l'ONU, de l'Union africaine (UA), de l'Union européenne (UE), des États-Unis et de la Belgique – l'ancienne puissance coloniale du Burundi –, se sont inquiétés de la situation qui prévaut dans le pays et ont sommé Pierre Nkurunziza d'engager "un dialogue politique ouvert à tous. Pour être "crédible et efficace", cette ouverture devra, selon les diplomates, "s'attaquer aux questions fondamentales, telles que le respect des droits de l'Homme, la liberté de la presse et autres libertés fondamentales, ainsi que la nécessité d'une gouvernance améliorée et plus ouverte."
Avec AFP