
Après des jours de polémique, la maire de Paris défend la tenue, jeudi, le long de la Seine, de l'événement mettant Tel Aviv à l'honneur. "Je ne saurais rendre une ville comptable de la politique de son gouvernement", affirme-t-elle dans "Le Monde".
Elle ne s’était pas encore exprimée sur le sujet. Dans "Le Monde" daté du mercredi 12 août, la maire de Paris, Anne Hidalgo, s’emploie à désamorcer la polémique suscitée par la tenue, le jeudi 13 août dans la capitale, d’une manifestation festive appelée "Tel Aviv sur Seine". "Comme maire et comme femme politique engagée en faveur de la paix et du vivre ensemble, je ne saurais rendre une ville ou une population comptable de la politique de son gouvernement, écrit-elle. Ce serait mépriser la démocratie locale et donc la démocratie tout court."
Depuis plusieurs jours en effet, la décision de la Mairie de Paris de mettre Tel Aviv à l'honneur, dans le cadre de Paris Plages, a provoqué la colère d'élus et d'associations pro-palestiniens qui ont réclamé l'annulation de l'événement, qu'ils considèrent comme une promotion de la politique israélienne.
Pétition
"Le cynisme de l'organisation d'une telle journée [...] atteint les sommets de l'indécence", a dénoncé dès samedi, la conseillère de Paris Danielle Simonnet (Parti de gauche). Sur les réseaux sociaux, où de nombreux dérapages antisémites sont apparus, elle a déploré qu'aucun "échange avec des Israéliens humanistes n'y est prévu, encore moins un débat sur la situation du peuple palestinien".
>> À voir dans la Revue de presse de France 24 : "Tel Aviv sur Seine : Israël ce n'est pas Ibiza"
Danielle Simonnet a donc demandé l'annulation pure et simple de "Tel Aviv sur Seine", ou alors "d'en modifier radicalement la programmation en permettant, avec la diversité associative et citoyenne parisienne, des rencontres-débats sur les événements de l'an dernier et la situation actuelle".
Le même jour, une pétition a été mise en ligne sur le site Avaaz.org. "Un an après le massacre de Gaza, Israël maintient le blocus, intensifie l'implantation des colonies, continue sa politique d'apartheid ainsi que les arrestations arbitraires de Palestiniens" peut-on lire dans ce texte, qui demande aussi de déprogrammer l'événement. Mardi, quelque 20 000 personnes l'avaient signé.
Tel Aviv, "ville ouverte"
"Même dans le contexte enlisé et violent du conflit israélo-palestinien, Tel Aviv reste une ville ouverte à toutes les minorités, y compris sexuelles, créative, inclusive, en un mot une ville progressiste", réagit Anne Hidalgo qui rappelle, par ailleurs, que Paris et la ville côtière israélienne nouent régulièrement des partenariats. "C’est […] une ville avec laquelle nous échangeons régulièrement dans les domaines de la culture et des nouvelles technologies."
De fait, pour la maire de Paris, cette coopération culturelle ne constitue aucunement un soutien à la politique menée par le gouvernement de Benjamin Netanyahou. "Nos pactes d’amitié avec Tel Aviv ou Haïfa ne nous ont pas empêchés, en tant que ville, de reconnaître la Palestine avant l’État français ; d’être solidaires de la population de Gaza en mobilisant des aides d’urgence après les destructions de l’été dernier, et surtout d’avoir avec des villes palestiniennes, comme Jéricho et Bethléem, parmi nos plus importantes coopérations décentralisées en cours dans le monde", fait-elle valoir.
Et l’édile d’ajouter : "Au Moyen-Orient comme ailleurs, la doctrine de Paris est intangible : elle consiste à encourager plutôt qu’à réprimander, à échanger plutôt qu’à boycotter, à dialoguer plutôt qu’à excommunier et de ce fait, à voyager tant en Israël qu’en Palestine et à entretenir des liens avec tous ceux qui œuvrent au rapprochement."
Important dispositif de sécurité
Pas sûr cependant que la tribune d’Anne Hidalgo apaise la colère des associations pro-palestiniennes. La Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (CAPJPO-Europalestine) a appelé à manifester "toute la journée" de jeudi afin de dénoncer "cette scandaleuse propagande" de l'"État terroriste" d'Israël. Un important dispositif de sécurité est prévu autour des berges de la Seine qui accueilleront l’événement.
Dans un communiqué, les élu(e)s du groupe Communiste-Front de gauche au Conseil de Paris se sont, pour leur part, dits consternés de n'avoir "jamais avoir été associés ou informés" d'une telle initiative, "alors que Tel Aviv est la capitale économique d'un pays dont le gouvernement d'extrême droite méprise quotidiennement le droit international et mène une politique brutale de colonisation des Territoires palestiniens".
La municipalité a en revanche reçu le soutien des élus Les Républicains (droite) de Paris, indignés par une polémique "trop souvent nauséabonde et écœurante de bêtises, de haine et d'aveuglement honteux". L'extrême gauche est "en pointe sur ce mauvais combat en attisant dangereusement les feux d'un débat qui n'a pas lieu d'être", affirment-ils dans un communiqué.
Lundi, le conseiller du maire de Tel Aviv, Eitan Schwartz, a salué la décision de la maire de Paris de maintenir l’opération. "Nous saluons le courage de Mme Hidalgo qui a rejeté les pressions et tentatives de faire annuler cet événement", a-t-il déclaré à l’AFP. Nous nous réjouissons de la coopération avec la mairie de Paris qui reste aux côtés de ses amis."
Avec AFP
