Les autorités algériennes refusent à la compagnie aérienne française Aigle Azur le rapatriement de 35 millions d'euros réalisés en Algérie. Certains dénoncent un "sabotage" orchestré pour nuire au concurrent d’Air Algérie.
La compagnie aérienne Aigle Azur est au bord de l’asphyxie économique, selon des informations du "Parisien". D’après le quotidien, l’État algérien refuse obstinément à la deuxième plus grande compagnie française de rapatrier 35 millions d'euros, soit 90 % de la trésorerie, réalisés dans ce pays entre 2002 et 2011. Et ce, au mépris d’un accord bilatéral sur le transport aérien conclu en février 2006.
Pour l’administration algérienne, cette somme représente en partie le produit de taxes et n’est donc pas rapatriable, explique une source proche du dossier citée par "Le Parisien". L’autre partie correspondrait à des billets achetés par des passagers mais qui n’auraient pas été utilisés.
"Normalement, au bout d’un an, n’importe quelle compagnie au monde peut intégrer l’argent de ces billets à sa comptabilité", précise la même source. "Mais pas en Algérie. Les autorités estiment que la prestation n’a pas été réalisée. Donc, l’argent n’est pas rapatriable. Ce sont des arguments fallacieux qui ne respectent pas les règles du transport aérien."
Depuis 2011, le rapatriement des recettes a repris, au compte-gouttes. Quant aux sommes antérieures, elles restent bloquées.
"Sabotage"
Pour certaines sources, ce blocage n'est pas anodin. D'après elles, il aurait pour but d’affaiblir Aigle Azur et ainsi de renforcer son concurrent Air Algérie, qui brille ces derniers temps par la multiplication des retards de ses vols et par des problèmes de communication avec ses clients.
Depuis 2001, date du rachat de la petite compagnie française par le groupe GoFast, le ciel s’est en effet lourdement assombri pour le pavillon national algérien, lequel disposait jusqu’alors d’un quasi-monopole. Forte de 2,2 millions de passagers par an, Aigle Azur réalise un chiffre d’affaires de 330 millions d’euros et a conquis 40 % du marché aérien entre la France et l’Algérie.
Toutefois, la société a connu la crise et a vu un déficit de 15 millions d’euros se creuser. En 2015, la compagnie qui emploie 1 200 personnes, dont 700 sur le sol français, a été contrainte d’échelonner le paiement des taxes dues à Aéroports de Paris (ADP) et à la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).
Ce "sabotage" de l’État algérien, comme le nomme la source sus-citée, pourrait ainsi avoir un impact fatal pour l’entreprise.
L’État français silencieux
Cette situation est "anormale et préoccupante" s’inquiète-on au cabinet du ministère français des Transports, selon des propos rapportés par "Le Parisien". "Elle donne lieu à de multiples échanges avec les autorités algériennes", assure-t-on. Pourtant, dans les faits, l’État français affiche plutôt une passivité remarquée.
D’autant qu’Aigle Azur n’est pas la seule compagnie française à se trouver dans cette situation : après avoir attendu le rapatriement de 16 millions d’euros bloqués en Algérie, Air France a finalement pu récupérer plusieurs millions d’euros fin 2014.
À titre de comparaison, rappelle "Jeune Afrique", Air Algérie a été autorisé au cours des deux dernières années à rapatrier près de 90 millions d’euros d’excédents de recettes.