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Mobilisation monstre en Argentine contre les violences faites aux femmes

Des centaines de milliers de personnes ont manifesté mercredi en Argentine pour exprimer leur ras-le-bol face aux violences faites aux femmes. Toutes les 31 heures, un féminicide est commis dans ce pays d'Amérique latine.

C'est une mobilisation historique. Après une série de féminicides ayant scandalisé le pays, des centaines de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants et de personnes âgées ont massivement manifesté en Argentine, mercredi 3 juin, contre les violences faites aux femmes. Des rassemblements ont eu lieu à Buenos Aires et dans plusieurs villes argentines, ainsi que dans des pays limitrophes.

"Cette mobilisation a surgi car il y a eu récemment trois féminicides emblématiques [...] On perçoit un point d'inflexion social et politique", explique Fabiana Túñez, responsable de l'ONG Casa del Encuentro, porte-drapeau du mouvement.

Une institutrice de maternelle a été égorgée par son ex-mari devant ses élèves. Une adolescente de 14 ans, enceinte, a été tuée puis enterrée dans le jardin de la maison familiale par son ex-petit ami de 16 ans, aidé par des proches. Et une femme a été criblée de balles par son ex-compagnon éconduit, alors qu'elle se trouvait à la terrasse d'un café.

In Argentina, a woman is murdered every 31 hours in a domestic violence incident http://t.co/vd4guaY0Kp #NiUnaMenos pic.twitter.com/ocAseiQuK1

— BBC Trending (@BBCtrending) 3 Juin 2015

53 femmes brûlées vives entre 2010 et 2012

Toutes les 31 heures, un féminicide est commis en Argentine. Selon l'ONG Casa del encuentro, 277 féminicides ont été commis en 2014. Et entre 2010 et 2012, 53 femmes sont mortes brûlées vives. La situation est encore plus alarmante au Mexique, en Amérique centrale ou au Brésil.

Si les femmes étaient majoritaires dans le cortège mercredi, les hommes étaient aussi présents en nombre. Pour Maria Elena Cornide, chef d'entreprise de 36 ans, "c'est le réveil social, contre l'injustice". Et "les violences familiales ne sont pas le seul fléau dont souffrent les femmes", notamment parce qu'"elles sont moins payées que les hommes".

Ces homicides de jeunes filles ou de femmes dont parlent les médias argentins ne représentent qu'une infime portion de tous les féminicides perpétrés dans le pays, "dans une société malade de paradigmes machistes, où la femme est encore une 'chose à dominer'", dénonce Fabiana Tuñez, directrice de Casa del Encuentro.

"Face à ça, l'État est en retard", affirme cette militante.

"Démanteler la culture machiste de l'Argentine"

"Nous demandons l'application d'un plan national pour éradiquer la violence de genre : cela passe entre autres par l'élaboration de statistiques officielles, ou par une réforme éducative qui inclurait l'enseignement de la thématique de la violence de genre. Il reste encore beaucoup à faire pour démanteler la culture machiste dans notre pays".

La présidente Cristina Kirchner et le footballeur Lionel Messi ont apporté leur soutien à la mobilisation. "Les féminicides, ça suffit. De Barcelone, nous nous joignons à tous les Argentins pour crier bien fort #NiUnaMenos ("Pas une de moins", le slogan de ralliement)", a déclaré Messi sur son compte Facebook.

Le féminicide a été inscrit dans le code pénal argentin en 2012 comme circonstance aggravante d'un homicide. Alors que l'homicide est puni de 12 à 25 ans de prison, la peine encourue est élevée à la perpétuité en cas de féminicide.

Ce crime est intégré dans la législation de 15 autres pays latino-américains, dont le Chili, le Pérou, la Colombie et, depuis cette année, le Brésil.

En France, le terme est entré dans le Petit Robert en 2014 mais pas dans la loi. Jean-François Bouvier, père d'une des deux jeunes femmes assassinées à Salta (nord-ouest argentin) en 2011, milite pour que cette notion figure dans le code pénal, en France aussi.

Avec AFP