
Alors que se tient un sommet sur la crise des migrants en Asie du Sud-Est, la Birmanie a, vendredi, accusé l'ONU de la "stigmatiser" en pointant du doigt sa "responsabilité" dans le drame qui touche des milliers de Rohingyas piégés en mer.
La Birmanie a accusé, vendredi 29 mai, l'ONU de la "stigmatiser" devant les délégués de 17 pays réunis lors d'un sommet en Thaïlande visant à trouver une solution à la crise des migrants en Asie du Sud-Est.
"Vous ne pouvez pas stigmatiser mon pays", a lancé le chef de la délégation birmane, Htin Lynn, visiblement énervé par des remarques du représentant du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Le délégué birman a accusé l'organisation onusienne de vouloir politiser le débat.
Résoudre les causes de la crise "nécessitera que la Birmanie assume entièrement ses responsabilités, envers tous ses habitants", avait déclaré un peu plus tôt Volker Turk, haut-commissaire adjoint pour les réfugiés.
"Ce sommet commence mal, car on ne peut même pas nommer le plus gros des contingent des migrants", explique Cyril Payen, correspondant de France 24 à Bangkok. "La Birmanie avait fait savoir, avant de finir par accepter l’invitation à cette grande conférence, qu’il ne serait pas question d'utiliser le mot 'rohingya'". Pour les autorités birmanes, les Rohingyas n’existent pas. Elles considèrent cette minorité musulmane comme des immigrés du Bangladesh voisin, même si certains vivent en Birmanie depuis des générations.
itLes Rohingyas, des apatrides dans leur propre pays
En Birmanie, les quelque 1,3 million de Rohingyas, qui prennent la mer par milliers, sont ainsi victimes de multiples discriminations dans un territoire marqué par un fort nationalisme bouddhiste. Vus comme une menace envers l'identité bouddhiste du pays, ils sont apatrides et n'ont accès ni aux hôpitaux, ni aux écoles ni au marché du travail. La montée des violences communautaires a fait en 2012 quelque 200 morts, essentiellement des musulmans, et 140 000 déplacés. Cela a accéléré un exode en mer existant déjà depuis plusieurs années.
Malgré le drame vécu par les migrants ces dernières semaines, le sujet est resté tabou, et même la députée birmane Aung San Suu Kyi, pourtant prix Nobel de la paix, est restée silencieuse.
>> À lire sur France 24 : "Le dalaï lama appelle Aung San Suu Kyi à agir"
Des Rohingyas pris au piège en pleine mer
Le tragédie vécue par les Rohingyas s'est retrouvée sur le devant de la scène internationale depuis que des milliers de boat people ont été abandonnés en mer par leurs passeurs, à la suite d'une politique soudain répressive de la Thaïlande. La sévérité de ce pays de transit habituel à l’égard des trafiquants a eu pour effet de désorganiser les filières. Ces dernières semaines, plus de 3 500 migrants affamés sont arrivés en Thaïlande, en Malaisie et en Indonésie. D'autres seraient encore pris au piège dans des bateaux en mer.
Les pays de la région s'étaient attirés les foudres de l'ONU et d'organisations humanitaires en refoulant vers le large des navires de migrants, avant que l'Indonésie et la Malaisie ne fassent volte-face récemment et annoncent qu'elles allaient secourir et offrir un accueil temporaire aux candidats à l'exil.
Lors de ce sommet régional à Bangkok, la question de l'accueil à long terme de ces milliers de migrants devait aussi être au centre des discussions. La Thaïlande, la Malaisie et l'Indonésie ont cependant mis en garde, rappelant qu'elles n'accueilleraient les migrants que temporairement.
>> À lire sur France 24 : Les pays du Sud-Est asiatique enfin déterminés à sauver les migrants ?
Avec AFP