De nouveaux affrontements ont eu lieu, vendredi à Bujumbura, entre manifestants et forces de l'ordre. Trois personnes ont par ailleurs été tuées dans le centre-ville par deux grenades lancées par des inconnus ayant pris la fuite.
Des centaines de manifestants anti-troisième mandat du président Nkurunziza ont une nouvelle fois défié la police, vendredi 22 mai, dans un quartier de Bujumbura, signe que la contestation ne s'essouffle pas au Burundi, alors que, pour la première fois, du matériel électoral a été saccagé. Trois personnes ont également été tuées dans le centre de la capitale dans l’explosion de deux grenades lancées par des inconnus.
Au lendemain d'une journée marquée par de violents affrontements et des scènes de guérilla urbaine, avec au moins deux tués par balle, la journée de vendredi avait commencé timidement pour les manifestants hostiles au président.
Comme chaque jour maintenant depuis fin avril, des groupes de jeunes se sont rassemblés face à la police ou aux militaires dans les quartiers périphériques, habituels bastions du mouvement.
La contestation est soudainement montée en puissance dans l'après-midi dans le quartier de Cibitoke, où des centaines d'habitants en liesse ont tenté d'avancer vers le quartier voisin de Ngagara, constituant l'un des plus grands rassemblements en quatre semaines de contestation.
Le cortège occupait une des avenues, jonchée de cailloux, de planches, ou encore d'un kiosque de bois renversé. "Nkurunziza a échoué ! Nkurunziza a échoué !", scandaient notamment les protestataires.
Une trêve de deux jours annoncée par l’un des leaders du mouvement
Sous une pluie de pierres, et à grand renfort de tirs en l'air, les policiers, puis les militaires sont parvenus tant bien que mal à les contenir.
"Les gens manifestaient tranquillement quand la police est arrivée, a raconté Adolphe, 46 ans, ingénieur civil. Les policiers ont avancé dans le quartier et sont entrés dans les ruelles en tirant. Du coup toute la population s'est mise en colère et est sortie pour les chasser."
Après ce coup de chaud, les policiers se sont retirés et ont laissé les militaires au contact des manifestants, les soldats leur demandant calmement de rentrer chez eux.
"Vous n'avez pas réussi votre coup d'État, alors laissez-nous faire maintenant !", a lancé tout sourire un manifestant à l'un des soldats, en référence au coup d'État militaire déjoué la semaine dernière par le président Nkurunziza.
Vendredi soir, l'un des leaders du mouvement, Pacifique Nininahazwe, a annoncé une trêve de deux jours pendant le week-end "afin de permettre à la population d'inhumer" les victimes de la semaine, et "aux habitants de la capitale de s'approvisionner".
"Un nouveau dialogue entre les différentes parties est engagé depuis quelques jours au Menub (bureau des élections des Nations unies), a-t-il par ailleurs annoncé, sans autre précision, en demandant "au gouvernement de montrer sa bonne foi en s'abstenant de tirer sur les manifestants".
Trois morts dans l’explosion de deux grenades dans le centre-ville
Des élections législatives et communales, déjà reportées de 10 jours sous la pression internationale, sont censées se tenir le 5 juin, et marqueront le début des élections générales, avant la présidentielle du 26 juin.
Pour la première fois, des manifestants ont brûlé jeudi du matériel électoral, selon la Commission électorale burundaise (Céni). Deux incidents ont été enregistrés, tous deux dans la province de Bujumbura Rural, dans les collines surplombant la capitale.
À Mukike, des "manifestants ont arrêté une voiture qui acheminait des isoloirs et des urnes (...), alors la foule s'en est pris à ce véhicule. Tout le matériel a été brûlé", selon la Céni. À Ijenda, des centaines de personnes s'en sont pris à un dépôt logistique local de la commission, incendiant là aussi tout le matériel entreposé, d'après des témoins.
itPar ailleurs, trois personnes ont été tuées vendredi soir en plein centre de Bujumbura dans l'explosion de deux grenades lancées par des inconnus qui ont pu prendre la fuite, a annoncé à l'AFP le directeur adjoint de la police burundaise.
"Deux grenades viennent d'exploser en plein centre-ville près de l'ancien marché central. Elles ont fait trois morts et plusieurs blessés, plus d'une dizaine probablement", a déclaré le général Godefroid Bizimana. Les corps de deux des victimes, apparemment des vendeuses de fruits, étaient visibles sur la chaussée ensanglantée, a-t-on constaté sur place.
Avec AFP