Lors du 2nd tour des élections départementales, le parti de Marine Le Pen a gagné près d’une centaine de conseillers élus, mais a échoué à remporter un seul département. Le signe d’un plafonnement de ses capacités électorales ?
Il serait un peu facile de minimiser le score du Front national à l’issue de ces élections départementales. Certes, au soir du dimanche 29 mars, le parti de Marine Le Pen n’a pas réussi à remporter le premier département de son histoire. Certes aussi, le parti frontiste qui lorgnait tant l’Aisne et le Vaucluse, n’a pas transformé l’essai. Dans le premier cas, le FN est arrivé derrière les partis de droite et de gauche, dans le second, il n’a récolté que 4 cantons contre 8 pour le PS et 9 pour l’UMP. Au premier tour pourtant, le FN avait obtenu deux élus dès le premier tour dans le Vaucluse et était présent dans tous les autres cantons.
La conclusion immédiate qui se dégage de ce scrutin reste donc que sans passer d’accord ou d’alliance avec d’autres formations politiques entre deux-tours, le FN se révèle incapable de l’emporter en duel. Marine Le Pen, consciente de cette faille dans sa machine politique, n’a pas vraiment masqué sa désillusion dimanche soir accusant Manuel Valls d’avoir mené contre elle une "campagne amère" et le qualifiant de "petit politicien médiocre". Dans sa déception, la présidente du FN a même oublié de demander la démission du Premier ministre malgré la défaite sans appel du PS.
Et pourtant, si au niveau national, le FN n’a remporté aucun exécutif, à l’échelle locale, ce scrutin dégage une forte impression de succès. "Ces départementales font entrer la France dans une nouvelle histoire politique et sociale : voilà le Front national installé, incrusté pourrait-on même écrire, pour longtemps", analyse "Libération" dans son édition de lundi.
Le FN en tête en 2017 ?
Le FN a remporté au total près d’une centaine de conseillers départementaux. Ces dizaines d’élus viennent s’ajouter aux plus de 1 500 conseillers municipaux frontistes glanés l’an dernier. Un "socle", comme l’explique la présidente FN qui pourrait jouer en sa faveur lors des régionales de décembre 2015 : le mode de scrutin de ces élections à la proportionnelle devrait en effet mieux refléter son implantation dans le paysage politique français.
Dimanche soir, Manuel Valls n’a pu que constater cette progression certaine. À l’annonce des résultats, il a dénoncé des "scores très élevés, beaucoup trop élevés pour l'extrême droite". Une tendance frontiste qui pourrait même bénéficier d’un dernier atout : la porosité grandissante entre droite républicaine et droite extrême. La faute, entre autres, à Nicolas Sarkozy qui "a fait bouger (probablement pour longtemps) la définition de ce qu’il convient d’appeler un parti républicain", écrit "Libération". Dans l’esprit collectif, force est de constater que le FN n’est plus perçu comme un parti infréquentable mais comme une alternative.
Selon les derniers résultats des départementales, 26% des Français ont voté pour le parti d’extrême-droite (contre 33% pour l’UMP et ses alliés et 22% pour le PS et sa coalition). En misant sur cette moyenne stabilisée dans les années à venir, Marine Le Pen pourrait donc être en tête au premier tour de la présidentielle 2017. Là encore, le FN risquerait de se retrouver dans une impasse. Sans alliés, une victoire est presque illusoire pour les frontistes. "L’isolement confine le FN à l’impuissance", écrit "L’Obs". Mais combien de temps le cordon sanitaire qui maintient l’isolement de Marine le Pen sur l’échiquier politique va-t-il durer ?