"C'est reparti !" clame la une du prochain numéro de "Charlie Hebdo". L'hebdomadaire satirique sera diffusé à 2,5 millions d’exemplaires mercredi, après cinq semaines d’interruption.
Un mois et demi après les attentats qui ont décimé une partie de sa rédaction, "Charlie Hebdo" va reparaître mercredi 25 février et tenter de retrouver un semblant de normalité, malgré la perte des grandes figures du journal et les menaces ravivées par l'attaque de Copenhague. Lundi, le journal satirique a rendu publique la une de son prochain numéro qui sera diffusé à 2,5 millions d’exemplaires.
La couverture, barrée du titre "C’est reparti !", montre Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy, le pape François, des jihadistes, des financiers et des journalistes – bref, les cibles favorites de l’hebdomadaire – qui courent en meute après un chien tenant le journal entre ses dents.
"C'est reparti" la Une du nouveau #CharlieHebdo signée Luz avec #LePen & #Sarkozy pic.twitter.com/3nG1Jn0ZQS
— Sylvain Mornet (@Sylvain_Mornet) 23 Février 2015Luz, l’auteur de la une, a expliqué avoir choisi des chiens car "ce sont des animaux irresponsables et soumis". "Irresponsable, c'est Charlie, soumis, c'est tout les autres qui courent derrière", a-t-il précisé lors d’une conférence de presse. "Faut qu'on parle du retour de Charlie, mais pour dire que Charlie recommence à faire son travail, son travail contre la bêtise, contre le FN [Front national]", a-t-il poursuivi.
Cette deuxième édition des survivants de "Charlie Hebdo" arrivera dans les kiosques après cinq semaines d’interruption durant lesquelles l’équipe a dû faire face à un vaste élan de solidarité, un pactole et un torrent d'émotion à gérer. "Il fallait souffler, qu'on se pose et qu'on prenne un peu de repos. Il y avait ceux qui avaient besoin de retravailler tout de suite, comme moi, et ceux qui voulaient prendre plus de temps, explique à l'AFP Gérard Biard, rédacteur en chef de la parution. On a trouvé un compromis, on s'est mis d'accord sur cette date de sortie du 25 février, sachant qu'à partir de là, on repartait sur un rythme hebdomadaire."
Une fois la pause terminée, les collaborateurs du journal ont dû retrouver leurs automatismes, se remettre à faire des papiers et des dessins. Comme avant. C'est le dessinateur Riss, blessé lors de la tuerie, qui est devenu le nouveau patron du journal, succédant à Charb.
"Le journal, comme n'importe quel journal, doit continuer parce que la vie continue, l'actualité continue. On n'est pas là pour faire pleurer dans les chaumières, c'est un journal satirique, qui est drôle, il faut que l'on fasse rire avec la matière quotidienne", a estimé l’urgentiste et chroniqueur Patrick Pelloux dans un entretien diffusé dimanche sur France 5.
"Heureusement qu’il y a DSK"
Le dernier numéro, diffusé à huit millions d'exemplaires, un record historique pour la presse française, avait suscité des manifestations parfois violentes dans plusieurs pays musulmans.
Les attaques de Copenhague, qui ont fait deux morts, et ont visé comme à Paris la communauté juive et un lieu symbolique de la liberté d'expression, ont ravivé les peurs. Sans parler des appels aux meurtres qui se multiplient sur Twitter contre Zineb el-Rhazoui, collaboratrice franco-marocaine de "Charlie Hebdo", et son mari, l'écrivain marocain Jaouad Benaissi.
"Charlie Hebdo" va-t-il encore parler de "ça" ? "C'est toujours autant d'actualité. Je sais que certains vont dire qu'on est obsédés mais ce n'est pas nous qui sommes obsédés ! C'est l'actualité et ceux qui la font qui sont obsédés. Et ceux qui la font ce sont les terroristes !", estime Gérard Biard.
"Après Copenhague, on va encore être obligés de parler de ça ! Mais il y a aussi Dominique Strauss-Kahn, heureusement qu'on l'a celui-là !", sourit-il à propos de l'ancien patron du FMI dont la relaxe a été requise au procès du Carlton. Outre le terrorisme et DSK, le prochain "Charlie" parlera de la Grèce avec une interview du nouveau ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis.
La rédaction, toujours hébergée dans les locaux de "Libération", devrait encore rester là quelques semaines avant d'emménager, peut-être, dans le XIIIe arrondissement de Paris, où l'équipe a visité des locaux. Mais la sécurité passe désormais avant tout. "Sur ces locaux, rien n'est définitif. Il y a une étude qui est en cours pour voir si les sols sont assez solides pour accueillir les sas de sécurité", souligne Gérard Biard.
Avec AFP
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Les dessinateurs Dilem et Petillon rejoignent "Charlie Hebdo"
L'équipe de "Charlie Hebdo" comptera désormais sur le talent de deux nouveaux dessinateurs : René Pétillon, qui travaille depuis de longues années pour "Le Canard Enchaîné", et le dessinateur algérien Ali Dilem, qui collabore notamment avec le quotidien algérien "La Liberté". Après l'attaque perpétrée le 7 janvier contre "Charlie Hebdo", Dilem avait accordé un entretien à "L'Humanité" dans lequel il parlait notamment de ses liens avec Tignous, l'une des victimes de ce massacre