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Procès Simone Gbagbo : "Je vais dire ma vérité, vous allez m’entendre à satiété"

Simone Gbagbo est arrivée détendue au palais de justice d'Abijdan où elle doit être, pour la première fois entendue, sur son rôle dans les violences post-électorale de 2010-2011. "Je vais dire ma vérité", a-t-elle déclaré au micro de France 24.

Agitation aux abords du palais de justice

Des bousculades entre sympathisants et opposants de Simone Gbagbo ont eu lieu devant la salle d'audience où l'ancien Première dame est entendue.

Une centaine de personnes s'est amassée au tribunal d'Abidjan-Plateau, venue soutenir ou au contraire dénoncer le rôle de l'ex-Première dame dans les violences de décembre 2010 à mai 2011.

La police a séparé sans violence les protagonistes, avant de les évacuer. Aux cris des opposants de Simone Gbagbo, "assassins", répondaient ceux de ses partisans, "menteurs".

Avec AFP

Simone Gbagbo est arrivée visiblement détendue, lundi 23 février, au palais de justice d'Abidjan-Plateau où elle est jugée pour "atteinte à la sûreté de l’État". Vêtue d'une robe en pagne à motifs vert et marron, parée de quelques bijoux, l'ex-Première dame ivoirienne a salué de la main les journalistes présents, leur adressant un grand sourire. "Je vais bien, je vais dire aujourd’hui ma vérité, vous allez m’entendre à satiété", a-t-elle déclaré à Anna Sylvestre-Treiner, correspondante de France 24 en Côte d’Ivoire.

Surnommée la "Dame de fer", Simone Gbagbo est la dernière des 83 accusés à comparaître pour leur rôle dans les violences ayant embrasé le pays de décembre 2010 à mai 2011, causées par le refus de son mari Laurent, alors président, de reconnaître la victoire de l'actuel chef de l'État Alassane Ouattara.

Plus de 3 000 personnes avaient péri en cinq mois d'exactions commises par les deux camps. Depuis la crise, la société civile et l'opposition pro-Gbagbo critiquent une "justice des vainqueurs" et s’insurgent qu’aucun dignitaire pro-Ouattara n'aient, pour l'instant, été inquiété.

Simone Gbagbo est également accusée de "crimes contre l'humanité" par la Cour pénale internationale, comme son époux qui y sera jugé en juillet. Mais Abidjan refuse son transfèrement à La Haye.

"Justice politisée"

"Ce que j’ai toujours dénoncé, dans le cadre de la justice ivoirienne, c’est qu’elle n’est pas indépendante, c’est que, malheureusement, elle est soumise au pouvoir actuel, déplore à France 24 Me Habiba Touré, l’une des avocates de l’ancienne Première dame. Ce que vous voyez, ce dont vous êtes témoins et spectateurs, c’est une justice politisée."

>> À voir sur France 24 : "Le parti de Laurent Gbagbo au bord de l'implosion"

Lundi, les avocats de Simone Gbagbo ont demandé l'annulation de son procès, invoquant l'immunité parlementaire de leur cliente, députée au moment de la crise post-électorale de 2010-2011, mais la Cour a rejeté leur requête. Simone Gbagbo a été élue députée d'Abobo, une commune d'Abidjan, en 2000. Elle a siégé à l'Assemblée nationale ivoirienne jusqu'à la chute de son époux en avril 2011.

Nombre d’observateurs dénoncent en tous cas le manque de sérieux de la procédure. "En voulant faire les choses dans la précipitation et en bâclant les enquêtes, en rendant ce genre de justice, l'État va contre ses propres intérêts", abonde un responsable d'une ONG ivoirienne de défense des droits de l'Homme

Les seconds couteaux ont été entendus pendant près d'un mois, durant lequel des témoins ont été incapables d'identifier, devant la cour, des accusés auxquels ils avaient imputé des crimes sanglants. Des cadres du régime Gbagbo ont ensuite défilé pendant deux semaines : un Premier ministre et sept ministres se sont succédé en l'espace de deux matinées, mais aucun n'a passé plus d'une heure à la barre et pas un témoin n'a été appelé pour les confondre. Des journalistes pro-Gbagbo, accusés d'avoir incité à la haine, ont été interrogés, sans que soient produits une vidéo, une bande sonore ou un article litigieux pour étayer l'accusation.

Arène politique

Faute de débat contradictoire, les accusés, qui plaident tous "non coupable", peuvent exposer longuement leur version des faits, transformant la cour d'assises en arène politique dans laquelle les pro-Gbagbo ont le micro - qui fonctionne mal -, où l'on rit parfois, où l'on ne reconnaît pas la victoire d'Alassane Ouattara, où l'on critique l'ONU pour sa supposée partialité...

"Qui apparaît ridicule dans ce procès si ce n'est les autorités ?", interroge Habiba Touré. Pour l'audition de Simone Gbagbo lundi, l'avocate dit ne pas savoir à quoi s'attendre : "On ne sait pas s'il y aura des témoins. S'il y en a, combien ils seront. Ni ce qu'ils vont dire. On ne sait rien". Et de lancer : "Qui aimerait être jugé dans ces conditions ?"

Avec AFP