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Les territoires ukrainiens sous contrôle russe au cœur du sommet Trump-Poutine
Donald Trump et Vladimir Poutine se rencontrent vendredi en Alaska avec la question ukrainienne au centre des débats. Le président américain a récemment évoqué de possibles "échanges de territoires. Crimée, Donbass, Kherson et Zaporijjia : voici ce qu’il faut savoir sur ces territoires ukrainiens revendiqués par la Russie.
Un soldat russe agite un drapeau aux couleurs de son pays parmi les bâtiments en ruines de la ville de Chasiv Yar dans la région de Donetsk, dans l'est de l'Ukraine, le 31 juillet 2025. © Ministère russe de la Défense, AP

Le 8 août, au moment d’annoncer sa rencontre "très prochainement" avec Vladimir Poutine, Donald Trump avait jeté un pavé dans la mare. Le président américain avait expliqué que ce sommet avec le président russe, prévu vendredi 15 août, dans l’État de l’Alaska, serait l’occasion de mener une médiation pour mettre fin à la guerre en Ukraine et que cela comprendrait des "échanges de territoires".

"Un règlement du conflit comprendra des échanges de territoires au bénéfice de chacun", avait souligné Donald Trump, sans entrer dans les détails. "On parle d'un territoire sur lequel les combats font rage depuis plus de trois ans et demi (...), c'est compliqué", avait-il encore dit.

Depuis cette déclaration, les spéculations vont bon train quant à savoir si la rencontre entre les deux présidents entraînera une modification radicale et sous la contrainte des frontières de l’Ukraine.

Le terme d’"échange" semble pour le moins surprenant : la Russie contrôle en effet, actuellement, près de 20 % de l’Ukraine alors que l’armée ukrainienne n’occupe plus de territoire russe depuis le mois de mars – Kiev occupait alors encore partiellement la région de Koursk depuis une offensive lancée en août 2024.

Les territoires ukrainiens sous contrôle russe au cœur du sommet Trump-Poutine
Les territoires ukrainiens sous contrôle russe entre 2014 et 2022. © Studio graphique France Médias Monde

Ce rapport de force déséquilibré pour l’Ukraine sur le terrain incite peu à l’optimisme quant au sommet Trump-Poutine de vendredi. D’autant que les revendications territoriales côté russe semblent claires, difficilement flexibles et totalement défavorables à Kiev.

À commencer par les territoires revendiqués depuis 2014 (carte ci-dessus). Cette année là, en quelques mois, Moscou prend de court le gouvernement ukrainien et laisse les Occidentaux sans réaction en annexant d’abord la péninsule de Crimée. Puis une opération similaire conduit des séparatistes soutenus par la Russie à prendre partiellement le contrôle d’une partie des oblasts (régions) de Donetsk et Louhansk, dans l’est de l’Ukraine.

Annexion russe de quatre oblasts ukrainiens en 2022

Entre 2014 et 2022, la guerre du Donbass entre Kiev et Moscou fait au moins 15 000 morts civils et militaires de part et d'autre des deux camps, selon des chiffres de l'ONU.

En février 2022, le conflit entre les deux États prend une autre dimension avec l’invasion russe à grande échelle de l’Ukraine. Moscou se rapproche d'abord rapidement de Kiev mais fait face à la résistance de l’armée ukrainienne. Dans le sud et l’est du pays, la Russie prend le contrôle de larges pans de territoires (carte ci-dessous) : en plus du contrôle total de l’oblast de Louhansk, elle étend son invasion dans celui de Donetsk et réussit à s’emparer d’une grande partie des régions de Kherson et Zaporijjia.

Quelques mois plus tard, les autorités prorusses des quatre régions organisent un "référendum" d’annexion où le "oui" l’emporte largement. Ces oblasts ont maintenant le même statut officieux que la Crimée. Mais ni les autorités ukrainiennes ni la communauté internationale ne reconnaissent à ce jour ces annexions.

Les territoires ukrainiens sous contrôle russe au cœur du sommet Trump-Poutine
Les territoires ukrainiens sous contrôle militaire russe au 14 août 2025. © Studio graphique France Médias Monde

Depuis, l'offensive russe à grande échelle a fait a minima des dizaines de milliers de morts et causé d'immenses destructions en Ukraine. Après plus de trois ans et demi de combats, les positions ukrainienne et russe sont toujours irréconciliables. Malgré trois cycles de pourparlers à Istanbul, Kiev et Moscou ne parviennent pas à s’accorder : l’Ukraine et ses alliés occidentaux accusent notamment le Kremlin de bloquer les négociations en maintenant des demandes maximalistes – la cession des quatre oblast et la reconnaissance de la souveraineté russe sur la Crimée – tout en continuant de grignoter du terrain sur le champ de bataille.

Cessions de territoires contre gel des combats ?

Mais une proposition récente de la Russie aux États-Unis, relayée par le Wall Street Journal, semble être la raison de l’organisation de ce sommet entre Donald Trump et Vladimir Poutine. Selon le quotidien américain, le président russe "exigerait que l'Ukraine cède l'est de l'Ukraine (l’intégralité des oblasts de Louhansk et Donetsk, NDLR), une région connue sous le nom de Donbass, sans que la Russie s'engage à autre chose qu'à cesser les combats."

Seulement cela signifierait que l’Ukraine, qui contrôle encore des parties de ces deux régions, renonce à des lieux où des dizaines de milliers de soldats ont perdu la vie en essayant de les protéger – à l’instar de villes comme Kramatorsk et Slovyansk (carte ci-dessous).

Les territoires ukrainiens sous contrôle russe au cœur du sommet Trump-Poutine
La ligne de front en Ukraine au 14 août 2025. © Studio graphique France Médias Monde

Concernant les oblasts de Kherson et Zaporijjia, le président russe appellerait "à une pause dans la guerre sur les lignes actuelles dans les deux régions (la ligne de front ci-dessus, NDLR)" avant de négocier des échanges de territoires – sans préciser lesquels – avec l’Ukraine, toujours selon le Wall Street Journal.

En l’état, ces cessions de territoires ukrainiens à la Russie permettraient à cette dernière de désenclaver la péninsule de Crimée qu’elle revendique, et d’avoir une souveraineté totale sur la mer d’Azov – qu’elle contrôle de facto depuis 2014.

Les alliés européens de l’Ukraine – qui ne sont pas conviés au sommet en Alaska – ont fait part de leur opposition cette semaine à toute cession de territoires ukrainiens. Kiev "est prête à discuter de questions territoriales" mais pas d'"une reconnaissance légale" de l'occupation par la Russie de certaines parties de l’Ukraine, a indiqué le chancelier allemand Friedrich Merz.

Le principal intéressé, Volodymyr Zelensky, a exclu tout retrait des forces ukrainiennes des zones de l’est du pays dans le cadre d’un accord de paix. "Toute décision qui serait prise contre nous, toute décision qui serait prise sans l'Ukraine, serait une décision contre la paix", a averti le président ukrainien sur les réseaux sociaux.

À cela s’ajoute le fait que 82 % des Ukrainiens sont opposés à toute concession territoriale, selon un sondage réalisé par l'Institut de sociologie de Kiev. Pourtant, l’avenir d’une partie de leur pays se jouera sans eux vendredi en Alaska.