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La deuxième plus importante compagnie aérienne au monde, United Airlines, a déposé plainte contre un jeune entrepreneur de 22 ans qui avait créé un site permettant d’économiser jusqu’à 50 % sur certains vols grâce à une technique très particulière.
Aktarer “David” Zaman a réussi son premier pari dans la bataille juridique qui l’oppose à United “Goliath” Airlines et au site américain de réservation de vols Orbitz. Ce jeune entrepreneur de 22 ans a levé, mercredi 31 décembre, 30 000 dollars sur le site de financement participatif Gofundme.com alors qu’il ne visait que 20 000 dollars pour assurer sa défense.
Une somme dont Aktarer Zaman aura besoin. Ces deux prestigieux adversaires ont juré de faire fermer son site, Skiplagged.com, et lui demandent 75 000 dollars de dommages et intérêts après l’avoir assigné en justice en novembre dernier.
Les plaignants assurent que ce que propose Skiplagged.com est “interdit” et serait un exemple flagrant de “concurrence déloyale”. Pourquoi ce site, monté par le jeune homme comme un “passe temps” en plus de son travail pour une start-up new-yorkaise, a-t-il ainsi provoqué l’ire de ces deux mastodontes ? Il promeut une pratique très particulière aux États-Unis qui permet d’économiser jusqu’à 50 % par rapport à un billet normal.
Ne pas se faire attraper
Il s’agit en fait de réserver un vol avec une escale dans une ville qui est en réalité la destination finale. Au lieu de terminer le voyage, le passager s’arrête donc à mi-chemin. Comme les billets avec escale sont souvent moins chers que les vols directs, le petit malin fait généralement une bonne affaire.
Cette technique n'est valable, évidemment, que pour un aller simple et un voyageur sans bagage. Il faut aussi être informé à l’avance des escales. C’est là où Skiplagged.com entre en jeu. Il se charge des fastidieuses recherches des bonnes connexions au meilleur tarif. Actuellement, par exemple, le site propose un vol New York-Washington, le 13 février, à moitié prix par rapport au tarif “normal”.
Une dernière condition à remplir pour le voyageur est de ne pas se faire attraper par la compagnie aérienne. Elles abhorrent cette pratique et l’ont toute inscrite comme “interdite” dans leurs conditions de vol. “Cette pratique est contraire à nos règles de conduite et, par cette plainte, nous voulons protéger l’immense majorité des personnes qui achètent des billets légitimes”, a expliqué un porte parole d’United Airlines au site BusinessInsider.
Mais ce n’est pas que dans l’intérêt des autres passagers que la compagnie aérienne a assigné, avec Orbitz, Aktarer Zaman. “L’utilisation de la technique des ‘hidden cities’ (villes cachées) peut faire gagner beaucoup d’argent au passager, mais la logique des compagnies n’est pas d’offrir ou tolérer des promotions qui leur font perdre de l’argent sur leurs propres offres de vol”, explique à la chaîne américaine Bloomberg Randy Petersen, éditeur de la revue américaine "InsideFlyer".
Interdite mais légale ?
Le site de réservation en ligne Orbitz assure, ainsi, qu’une personne prise sur le fait verra son billet annulé sans possibilité de remboursement. Elle risque aussi de perdre son statut de “voyageur fréquent” si elle en bénéficiait.
Les compagnies aériennes ont beau interdire cette pratique, rien ne dit qu’elle est illégale au regard du droit américain. C’est pourquoi Aktarer Zaman compte bien aller jusqu’au procès. “Je ne fais rien d’illégal, d’autant que je ne propose que des liens vers d’autres sites qui vendent les billets et je ne gagne pas d’argent grâce à ce site”, a-t-il assuré à la chaîne CNN. Le célèbre statisticien américain et roi de la prédiction électorale Nate Silver faisait déjà la promotion de la technique des “Hidden cities” en 2011. À l'époque, il assurait, dans une contribution au "New York Times", que “tous les avocats à qui [il] avait pu parler estimaient que les compagnies aériennes auraient bien du mal à démontrer que ce n’est pas permis”.
Mais peut-être qu’United Airlines et Orbitz n’espèrent pas tant remporter la bataille légale que d'épuiser financièrement le jeune Aktarer Zaman en laissant traîner la procédure. C’est d’ailleurs la crainte de ce dernier. Le 31 décembre, il a relevé le montant de la somme qu'il souhaite collecter sur Gofund.me à 35 000 dollars car il “ne sait absolument pas combien de temps cette histoire va durer, et ce que ça lui coûtera”.