Le Burkina Faso a fait, jeudi, un pas important vers une sortie de crise : l'armée au pouvoir et les civils sont tombés d'accord sur l'architecture des institutions de la transition. Mais le casting continue de faire débat.
Près de deux semaines après la chute du président Blaise Compaoré, les laborieuses tractations des derniers jours semblent enfin porter leurs fruits au Burkina Faso. Jeudi 13 novembreau soir, réunis en assemblée, l'armée au pouvoir et les civils ont voté "à l'unanimité" les institutions de la transition.
Il reste à définir désormais les postes de chacun. Avant ce vote, le lieutenant-colonel Isaac Zida, l'homme fort du pays depuis que l'armée en a pris les commandes, avait déclaré : "Nous sommes parvenus à un accord sur l'architecture même des organes de transition". "Maintenant, nous sommes en train de discuter de qui mettre à quelle place", a-t-il ajouté.
Les postes de président et de président du parlement de transition sont d'ores et déjà acquis à des civils, a-t-il assuré. Celui de Premier ministre aurait à l'inverse été proposé à l'armée, contre la suppression d'une clause interdisant au président de la transition d'être issu d'un parti politique, a-t-on appris de source militaire.
Le fait qu'un civil dirige la transition est "notre solution depuis le départ", a souligné le lieutenant-colonel. Mais, selon lui, il est "tout à fait indiqué" que cette personne "ne soit pas un homme politique", faute de "garantie" qu'il ne fera pas campagne "pour son propre parti politique" lors des prochaines élections, ce qui replongerait le Burkina "dans une crise profonde".
"Beaucoup de concessions" de l’armée
Mis sous pression par l'Union africaine et les partenaires occidentaux du Burkina Faso pour qu'ils rendent le pouvoir, les militaires ont dû faire des concessions.
L'armée, qui au départ voulait placer l'un des siens à la tête du Conseil national de transition (le parlement de transition), a en effet accepté de rendre le pouvoir, a reconnu le lieutenant-colonel Zida.
Par ailleurs, dans le pré-accord, le CNT devient un organe "législatif", alors que l'armée souhaitait qu'il soit simplement "consultatif". Une instance dite "de la réconciliation nationale et des réformes", dont ne voulaient pas les militaires, est aussi évoquée. De cet organe dépendra une commission "vérité et réconciliation" voulue par la société civile pour "faire la lumière sur les crimes économiques et de sang" commis par l'ancien régime, selon l'un de ses membres. "Nous avons fait beaucoup de concessions dans l'intérêt du Burkina", a assuré le lieutenant-colonel Zida.
L'Union africaine avait posé, le 3 novembre, un ultimatum à l'armée pour qu'elle passe le flambeau aux civils dans les quinze jours, sous peine d'éventuelles sanctions. Du côté burkinabè, on réclame cependant du temps pour organiser la succession de Blaise Compaoré, président déchu et exilé en Côte d'Ivoire voisine.
Avec AFP