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Macron vs Montebourg : deux styles opposés mais une même politique ?

Le nouveau ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, est présenté comme l’anti-Montebourg. Le premier serait libéral, le second à la gauche de la gauche. Mais malgré les apparences, leurs lignes économiques ne seraient pas diamétralement opposées.

Ils sont présentés comme le yin et le yang de la politique économique du gouvernement français. L’un, le nouveau ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, serait “l’hémisphère droit” du président, tandis que son prédécesseur, Arnaud Montebourg, incarnerait cette “gauche de la gauche” déçue par le virage social-libéral du pouvoir.

Cette mise en opposition est séduisante. Après tout, Emmanuel Macron n’est-il pas un ancien banquier sans mandat électif qui murmurait à l’oreille du président les vertus d’une politique de l’offre (favoriser la production plutôt que la demande) jugée d’inspiration libérale ? Arnaud Montebourg apparaissait davantage comme un politicien pur jus clamant haut et fort son désir d’une “politique économique alternative”. Ses critiques ayant précipité, lundi 25 août, son renvoi du gouvernement Valls I.

Même la séance de passation de pouvoir, mercredi 27 août à Bercy, entre les deux hommes, a renforcé l'idée médiatiquement porteuse d’une rupture au ministère de l’Économie. Arnaud Montebourg et Emmanuel Macron ont eu beau présenter un front uni, les commentateurs n'y ont vu qu'une pièce écrite pour “rassurer en jouant à fond la carte de l’apaisement”.

Mais cette image de deux hommes que tout sépare, à commencer par leurs convictions économiques, ne vient-elle pas avant tout de leur différence de style ? Car dans les faits, “la politique mise en œuvre par Emmanuel Macron ne devrait pas différer en profondeur de celle d’Arnaud Montebourg”, assure Marc Ivaldi, expert en économie industrielle à la Toulouse School of Economics.

Montebourg plus proche de Macron que des frondeurs socialistes ?

Après tout, Arnaud Montebourg a appliqué fidèlement la ligne politique décidée par François Hollande sur les conseils, notamment, d’Emmanuel Macron. “Il ne s’est pas opposé à la politique de réduction des déficits, ni à la mise en place du pacte de responsabilité”, rappelle Marc Ivaldi. Le nouveau ministre de l’Économie est souvent considéré comme l’un des principaux architecte de ce pacte, annoncé en janvier 2014 par François Hollande, et perçu par la gauche du Parti socialiste comme un cadeau pur et simple au patronat.

Les frondeurs socialistes, qui considèrent aujourd'hui Arnaud Montebourg comme l’un des leurs, feraient d’ailleurs bien d’y regarder à deux fois. “L’une des dernières propositions portées par Arnaud Montebourg a été la dérégulation de certains corps de métier, c’est-à-dire une mesure d’inspiration plutôt libérale”, souligne Marc Ivaldi. Une manière de souligner qu’avec Montebourg, il faut faire la différence entre les actes et les paroles.

Reste ce patriotisme économique revendiqué par Arnaud Montebourg qui lui a permis d’incarner politiquement le redressement productif et la “marque France”. “Il a revigoré le système français qui consiste à dire qu’il n’y a pas de solution économique sans interventionnisme de l’État”, confirme Marc Ivaldi. Cette approche est, en effet, très éloignée de la pensée libérale classique qui prône un laissez-faire. Emmanuel Macron va-t-il laisser tomber cet activisme ? Il a affirmé le contraire lors de la passation de pouvoir et Marc Ivaldi est enclin à le croire. “Il n’a jamais donné l’impression de s’opposer à l’interventionnisme de l’État. Tout au plus aura-t-il peut-être une approche plus pragmatique des dossiers”, juge-t-il.

Le seul volet sur lequel une réelle différence peut voir le jour est l’Europe. “Arnaud Montebourg a multiplié les attaques véhémentes contre la politique économique européenne et je ne pense pas qu’Emmanuel Macron, qui a plusieurs fois négocié avec la Commission européenne, adopte le même comportement”, note Marc Ivaldi.