
Le pape François a béatifié, samedi à Séoul, 124 catholiques sud-coréens en présence de milliers de fidèles. Il a interrogé ces derniers sur le sens du sacrifice dans un monde déchiré entre l'abondance matérielle et la plus grande pauvreté.
C'est ce que le Vatican appelle le "miracle coréen". À Séoul, samedi 16 août, ils étaient près d'un million, soit un fidèle du pays sur cinq, à faire le déplacement pour prier avec le pape François. Premier pape à se rendre en Asie depuis 1999, François est arrivé à la Porte de Gwanghwamun dans une petite Kia découverte fabriquée à son intention, pour célébrer une messe solennelle à la mémoire des premiers chrétiens du pays.
Le souverain pontife a également profité de son déplacement pour béatifier 124 catholiques sud-coréens, martyrs exécutés à partir de la fin du XVIIIè siècle. Parmi eux, Paul Yun Ji-Chung et son cousin qui avaient été martyrisés en 1791 pour avoir voulu organiser des funérailles catholiques, sans respecter les rites confucéens.
Réquisitoire contre la société de consommation
Ainsi qu'il l'avait entamé la veille dans un réquisitoire contre la société de consommation, responsable à ses yeux d'un "désespoir" menant aux drogues et au suicide, François a de nouveau posé la foi et le sacrifice du Christ comme une voie de salut face à ce qu'il présente comme un délitement des valeurs humaines. Les martyrs "nous poussent à nous demander s'il y a quelque chose pour quoi nous serions disposés à donner notre vie", a-t-il dit au troisième jour de sa visite au "pays du matin calme".
L'exemple des martyrs coréens qui acceptaient "l'égale dignité de tous les baptisés" et privilégiaient "une forme de vie fraternelle qui défiait les structures sociales rigides de leur époque", a beaucoup à dire "dans une société, où, à côté d'immenses richesses, la plus abjecte pauvreté se développe, où rarement le cri des pauvres est entendu", a-t-il ajouté.
"L'importance des laïcs dans l'Église"
Le catholicisme a été introduit en Corée du Sud par des laïcs lettrés initiés par l'enseignement des jésuites en Chine voisine, et non par les missionnaires européens. "Cette histoire nous dit l'importance, la dignité et la beauté de la vocation des laïcs dans l'Église", a souligné François dans son sermon prononcé depuis une grande scène surmontée d'une croix, avec en arrière-plan le palais Gyeongbokgung de la dynastie Joseon. Ponts, routes et stations de métro aux abords de la place avaient été fermés et des tireurs d'élite placés sur les toits des bâtiments environnants pour assurer la sécurité du pape et des pèlerins.
Selon l'Église, pas moins de 10 000 Coréens ont été tués au cours du siècle qui a suivi l'introduction du catholicisme en 1784. Ils étaient généralement conduits de la Porte Gwanghwamun à celle de Seosomun où le bourreau remplissait son office. Pour réhabiliter les martyrs, le pape a fait samedi matin le chemin inverse.
Avec AFP