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Canonisations : le Vatican s'apprête à vivre un dimanche historique

Plus de 800 000 personnes venues du monde entier sont attendues à Rome, dimanche, pour assister à la canonisation des papes Jean XXIII et Jean-Paul II. Deux figures complémentaires et populaires de l'Église catholique contemporaine.

C’est un dimanche historique que Rome se prépare à vivre. Le pape François canonisera, dimanche 27 avril aux côtés de Benoît XVI, ses deux prédécesseurs : l'Italien Jean XXIII, père du concile Vatican II, et le Polonais Jean Paul II, immensément populaire. Deux grandes figures du XXe sècle qui, chacun à sa manière, ont marqué l’histoire de l’Église contemporaine.

Depuis plusieurs jours, la capitale italienne se prépare à ces festivités et surtout à un important afflux de pèlerins. Plus de 800 000 personnes du monde entier sont attendues, dont une grande partie de Pologne. La Ville éternelle a commencé à s'engorger de pèlerins venus à pied, en autocar, en voiture, tandis que les kiosques se couvraient de milliers de cartes postales des papes, surtout Jean Paul II et François. Et vendredi matin, deux portraits des deux saints vêtus de la cape rouge pontificale ont fait leur apparition sur la façade de la basilique.

Plusieurs écrans géants ont été installés en divers points de la capitale italienne, afin de permettre à tous de suivre la cérémonie, qui doit se dérouler à partir de 10 heures, place Saint-Pierre. Sur la fameuse place seront présents, dimanche matin, 150 cardinaux, un millier d'évêques, 6 000 prêtres pour la messe en plein air sur le parvis de la basilique. En outre, 93 délégations officielles, parmi lesquelles 24 chefs d'État et têtes couronnées, suivront la cérémonie de deux heures. Les célébrations religieuses commenceront dès samedi soir, avec des "nuits blanches" de prières dans une douzaine d'églises en diverses langues.

La date choisie n’est de surcroît pas anodine, puisque le 27 avril marquera en 2014 la fête de la Divine miséricorde, une institution créée par le pape Polonais. Le choix de porter sur les autels ces deux souverains pontifes en même temps n’est pas sans susciter des interrogations, sachant notamment que certains ont milité dans les arcanes du Saint-Siège, pour que la canonisation de Jean-Paul II soit prononcée seule. Odon Vallet, historien des religions, expliquait récemment à FRANCE 24 qu’on pouvait d’abord voir dans cette décision un souci des autorités de l’Église de "faire simple, de ne faire qu’un seul rassemblement, quand on sait que des millions de personnes sont attendues". La béatification de Jean-Paul II le 1er mai 2011 avait déjà rassemblé plus d’un million de fidèles place Saint-Pierre.

Mais selon l’historien, on peut également observer dans cette association une volonté de la part du pape François de maintenir un équilibre entre deux figures très différentes de la catholicité. "C’est un choix astucieux", relève Odon Vallet. "Jean-Paul II était plutôt conservateur en doctrine, alors que certains ont reproché à Jean XXIII d’avoir convoqué seul Vatican II", explique-t-il. "Les deux en même temps, cela passe mieux et permet de ne pas heurter les sensibilités des uns et des autres", estime l’historien, qui rappelle qu’aujourd’hui encore, beaucoup de croyants sont gênés par certaines modernisations apportées par Vatican II.

Le pape François s’affranchit de certaines régles

Pour ces canonisations, l’Église se montre en tous cas moderne en dérogeant à certaines règles. Ainsi, Jean Paul II, premier pape polonais de l'Histoire, immensément populaire, et dont les fidèles réclamaient même qu’il soit fait saint immédiatement après sa mort, sera canonisé en des temps records : neuf ans seulement après son décès. Benoît XVI avait en effet choisi de ne pas tenir compte du délai obligatoire de cinq ans pour ouvrir la cause de béatification et de canonisation de son prédécesseur, accédant à la requête des fidèles et de nombreux cardinaux.

Clin d’œil de l’histoire, Jean-Paul II avait lui-même allégé certaines règles en ramenant de trente ans à cinq ans le délai légal à observer après la mort de quelqu’un, avant de pouvoir ouvrir sa cause en béatification. Il avait lui-même fait exception à la règle des cinq ans pour le cas de Mère Térésa, dont le procès avait été ouvert deux ans seulement après sa disparition.

L'annonce de la date de canonisation de Jean-Paul II était attendue depuis la confirmation donnée par le pape François en juillet d'un second miracle attribuable au pape de 1978 à 2005. Selon la tradition, une personne ne peut en principe être canonisée - proclamée "sainte" par l'Église - que si deux miracles au moins lui sont attribués. Le premier lui permet d’être béatifié, le second d’être canonisé. En 2011, la révélation de la guérison inexplicable d'une religieuse française atteinte de la maladie de Parkinson a été considérée comme le premier miracle de Jean-Paul II. Et en 2013, la Congrégation pour les causes des Saints reconnaît comme inexplicable la guérison le jour même de la béatification du pape polonais, le 1er mai 2011, d’une femme originaire du Costa Rica atteinte d’un anévrisme, rendant ainsi possible sa canonisation.

Pour Jean XXIII, surnommé le "bon pape", un seul miracle a été reconnu, ce qui a permis sa béatification en septembre 2000. Il s’agit de la guérison inexpliquée d’une religieuse italienne, considérée comme mourante. Elle avait affirmé avoir guéri après avoir adressé ses prières au pape. Fait très rare, le pape François a décidé de laisser de côté l’exigence d’un second miracle pour Jean XXIII, qui a laissé l’image d’un pape proche des gens, simple et plein d’humour, à l’instar du pape argentin actuel.

Reste que si la canonisation de Jean XXIII, surnommé "le bon pape", ne semble contestée par personne, autant celle de Jean Paul II compte des détracteurs qui lui reprochent son aveuglement face aux crimes pédophiles et sa sévérité avec les théologiens dissidents, notamment ceux de la théologie de la libération.

Avec AFP