
À l'heure où le Rwanda commémore le vingtième anniversaire du génocide, l'histoire s'impose au centre du processus de réconciliation. Son enseignement aux jeunes générations est une étape clé pour tourner la page de cette période sombre.
Lundi 7 avril, le Rwanda commémore le vingtième anniversaire du génocide. Près de 800 000 personnes - essentiellement des Tutsis - tuées en l'espace de 100 jours, entre avril et juillet 1994, et une population marquée à vie. Vingt ans après, dans un contexte de réconciliation à tout prix, comment enseigne-t-on dans le pays l'histoire de cette période sombre ? Et ce, sachant que de nombreux épisodes clés du génocide restent toujours à éclaircir.
Thais Brouck et Sarah Sakho, envoyés spéciaux de FRANCE 24 ont rencontré des collégiens rwandais qui s'apprêtent à passer les examens de fin de trimestre. Au programme notamment, l'Histoire. Eddy, 15 ans, élève de troisième, énonce les quelques notions qu'il a retenues de la période du génocide. "Ce que nous avons appris en général, c'est que les Tutsis étaient en quelque sorte détestés par les Hutus. Donc ils ont fait un génocide. Donc en 1994 le génocide s'est terminé, quand nous avons dit 'Les Rwandais sont tous les mêmes'", raconte-t-il.
Eddy semble avoir bien retenu sa leçon. Au Rwanda, l'histoire est un outil au service de la réconciliation et les professeurs se doivent de respecter cet objectif. "Ils subissent certaines influences dans leurs familles respectives, ça, on ne peut pas le nier, souligne Christian Nyrinkindi, professeur d'histoire. Je crois que l’enseignant doit lui-même changer, comprendre le point du vue de la réconciliation, avant d'aborder le sujet en classe, au risque d'enseigner ce qu'il a dans son cœur, vu qu'il n'a pas non plus de documents sur lesquels s'appuyer".
Accusés de relayer la propagande de l'ancien régime, les manuels ont en effet été retirés des écoles après le génocide. Relégués aux archives, ils n'ont pas été remplacés depuis.
Pour l’historien Deo Byanafashe, l’histoire, telle qu’elle était enseignée avant le génocide a conduit au génocide. "L'Européen avait présenté le Tutsi comme quelqu'un de noble, de plus proche de lui, qui est plus noble encore. Vous voyez ? L'idéologie de la domination où l'on essaie de se mettre à la bonne place. Alors, l'histoire a été écrite dans ce sens-là, elle a été enseignée dans ce sens-là, et cela a conduit au génocide".
Vingt ans après le génocide, le Rwanda n'a pas fini de revisiter ce chapitre douloureux de son histoire.
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