La conférence des donateurs pour le Pakistan a promis de verser plus de cinq milliards d'euros au pays afin d'aider à sa stabilisation. Représentant français pour le Pakistan, Pierre Lellouche déplore un manque de conditions.
Vingt-sept États, dont la France, ont promis vendredi à la conférence des donateurs du Pakistan, organisée à Tokyo, plus de cinq milliards de dollars d'aide civile pour stabiliser ce pays stratégique dans la lutte contre le terrorisme. Paris a promis de verser 300 millions d'euros sur trois ans à Islamabad.
Selon les organisateurs du sommet, ces fonds permettront de soutenir "la protection sociale, le développement humain et les programmes pour les pauvres" au Pakistan.
Mais, contrairement aux Américains qui affichaient leur satisfaction, les représentants européens, eux, ont exigé que l'usage des fonds soit exemplaire et soumis à conditions.
Le représentant spécial de la France pour l'Afghanistan et le Pakistan, Pierre Lellouche, s'est ainsi étonné du comportement de son homologue américain, Richard Holbrooke.
"J'ai noté, avec surprise d'ailleurs, que le représentant spécial américain, mon ami Richard Holbrooke, a été d'une très grande timidité dans ce domaine, ce matin, a-t-il affirmé à notre correspondante, Nathalie Tourret. Depuis quelques jours, à Islamabad, il avait lui-même beaucoup insisté sur cette dimension et, curieusement, ce matin, il n'en a plus dit un mot, tout en promettant beaucoup d'argent, sans la moindre conditionnalité."
"Conditionalité économique et politique"
Pierre Lellouche a souligné sur FRANCE 24 l'importance d'imposer des conditions, au risque de voir l'argent des contribuables utilisé à mauvais escient.
"On a parlé de conditionnalité politique et économique. On aimerait que cet argent soit bien dépensé, notamment en direction des besoins les plus criants de ce pays, notamment en matière de santé et d'éducation. Ce serait bien, par exemple, que l'éducation existe en dehors des madrassas et des seules écoles religieuses," a-t-il déclaré.
Pierre Lellouche s'est inquiété de l'accord signé entre Islamabad et les Taliban pakistanais sur l'instauration de tribunaux islamiques dans la vallée de Swat (nord-ouest du pays).
"Les Taliban ont non seulement déclaré leur intention d'imposer cette loi dans tout le pays, mais ils ont obtenu du président Zardari - qui était présent ce matin à Tokyo - et du Parlement pakistanais - dont les députés ont été menacés de mort s'ils ne votaient pas la loi - que leur décision de justice ne soit soumise à aucune autre juridiction nationale au Pakistan.
Je me suis permis de dire qu'au moment où on demande aux contribuables français, ou aux Européens, ou à d'autres, de mettre de l'argent dans ce pays pour l'aider à se stabiliser, ce n'est peut-être pas à ça que devrait être destiné notre argent", a-t-il insisté.