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Le Premier ministre durcit le ton face aux manifestants

Le chef du gouvernement moldave autorise les forces de l'ordre à faire usage de leurs armes en cas de nouveaux rassemblements d'opposants anticommunistes. Plusieurs manifestations sont prévues cette fin de semaine.

Reuters - Le Premier ministre moldave, Zinaida Greceanii, a averti jeudi que les autorités de cette ancienne république soviétique majoritairement roumanophone n'hésiteraient pas à utiliser tous les moyens, y compris les armes, en cas de nouvelles manifestations violentes de la part de l'opposition.

Dans une allocution télévisée à la nation, elle a accusé l'opposition de préparer de nouveaux rassemblements, vendredi et samedi, pour contester la victoire du Parti communiste au pouvoir aux élections législatives du 5 avril.

"Les organisateurs du plus grand crime jamais commis dans l'histoire de la Moldavie s'apprêtent à utiliser de nouveau nos enfants pour mettre à sac le siège du gouvernement dimanche", a déclaré le Premier ministre.

"Si nous autorisons cela, ce sera difficile d'éviter des victimes. Les policiers useront de tous les moyens, y compris les armes, pour préserver l'ordre constitutionnel dans notre pays".

Auparavant, la Russie a demandé à l'Union européenne et à la Roumanie de garantir la souveraineté de la Moldavie, où des émeutes post-électorales ont embrasé la capitale et entraîné des représailles contre l'opposition pro-occidentale.

Le Parti libéral, une des principales formations d'opposition, a pour sa part sollicité l'envoi par Bruxelles d'une mission d'enquête sur ces violences.

Le conflit, qui met aux prises le pouvoir et l'opposition, a pris un tour violent mardi avec la mise à sac de la présidence et du Parlement par des manifestants contestant la victoire du Parti communiste au scrutin de dimanche dernier.

Accusant la Roumanie d'être impliquée dans ces violences, le président Vladimir Voronine a expulsé mercredi, avec l'approbation implicite de la Russie, l'ambassadeur de Bucarest en Moldavie.

Moscou est "profondément troublé" par les slogans et drapeaux roumains et européens vus et entendus dans les manifestations, a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. "Nous espérons que les dirigeants de l'UE et de la Roumanie, qui ont publiquement condamné les violences, agiront pour s'assurer que les drapeaux et slogans roumains ne soient pas utilisés pour nuire à l'intégrité de la Moldavie", a-t-il ajouté.

L'UE a publié jeudi un communiqué dans lequel elle exhorte la Moldavie à rétablir des relations normales avec son voisin roumain.

Mission de l'UE demandée

"Tout en comprenant la complexité des relations roumano-moldaves, nous appelons le gouvernement de Moldavie à reprendre des relations normales avec la Roumanie", déclarent les ministres des Affaires étrangères de la France, de la République tchèque et de la Suède, ancien, actuel et futur présidents en exercice de l'UE.

"Nous appelons les autorités moldaves à respecter toutes les libertés constitutionnelles, et toutes les parties à s'abstenir de toute violence", ajoutent-ils.

La Roumanie, membre de l'UE, a rejeté les propos de Voronine, qualifiés de "provocation", et réaffirmé savolonté de rapprochement entre la Moldavie et Bruxelles.

Comme l'UE, les Etats-Unis ont appelé toutes les parties au calme et à ne pas reproduire les incidents de mardi, qui ont fait un mort, plus de 200 blessés et conduit à l'arrestation d'au moins 193 personnes.

La présidence tchèque de l'UE a en outre exhorté Chisinau à garantir la liberté de la presse et la liberté d'expression. Mais, au lendemain de l'expulsion de l'ambassadeur de Roumanie, la Moldavie a refusé jeudi l'accès à son territoire à 19 journalistes roumains, selon des correspondants.

L'agence russe Ria rapporte pour sa part, citant une source au sein des services secrets moldaves, que trois autres reporters roumains vont être expulsés pour "activités incompatibles" avec le droit national.

Le gouvernement a par ailleurs demandé aux gardes-frontières de renforcer les contrôles de visa pour les ressortissants roumains. "C'est une décision absolument nécessaire dans les conditions qui menacent notre indépendance", a dit le Premier ministre Zinaida Greceanii.

Seul chef d'Etat européen à revendiquer l'étiquette communiste, Vladimir Voronine accuse la Roumanie de vouloir prendre le contrôle de son pays, le plus pauvre d'Europe.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2001, la Moldavie a connu stabilité et croissance, mais il est aujourd'hui confronté à la crise parce que de nombreux Moldaves travaillant à l'étranger ont perdu leur emploi et cessent d'alimenter le pays en devises.

"Le Parti libéral a demandé à l'UE et au Conseil de l'Europe d'envoyer une mission en République de Moldavie pour enquêter sur ce qui s'est passé à Chisinau les 7 et 8 avril", a déclaré le dirigeant libéral Dorin Chirtoacha, maire de Chisinau.