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Bo Xilai admet des erreurs, mais nie être coupable

L'ex-haut dirigeant chinois Bo Xilai, accusé de corruption, a admis samedi pour la première fois une responsabilité dans un détournement de fonds publics. Il a cependant nié avoir cherché à protéger sa femme accusée d'avoir assassiné un Britannique.

Pour la première fois depuis le début de son procès le dirigeant chinois Bo Xilai a admis samedi une responsabilité dans un détournement de fonds publics ainsi que dans les suites dramatiques de l'assassinat d'un Britannique par son épouse.

"Je n'ai jamais eu l'intention de protéger Gu, je n'ai pas cherché à falsifier les rapports d'autopsie" de la victime, a affirmé Bo, dans des déclarations diffusées par le tribunal de Jinan (est) où il comparaît depuis jeudi.

Malgré l'apparente transparence des débats contradictoires, les autorités contrôlent étroitement ce procès sensible qui s'achèvera, de l'avis général des experts, par l'annonce d'un verdict déjà décidé par la direction communiste.

Bo Xilai a été confronté samedi à son ancien bras droit, le chef policier Wang Lijun. Une audition surprise qui a encore renforcé l'intérêt des millions de Chinois qui se passionnent pour ce procès au suspense hollywoodien.

Neil Heywood, longtemps proche du couple, avait été empoisonné en novembre 2011 à Chongqing (sud-ouest), la métropole géante que Bo Xilai dirigeait alors.

Selon l'accusé, Wang Lijun, est venu le voir le 28 janvier de l'année suivante.

"Il m'a parlé de la mort de Neil (Heywood) et m'a dit que certaines personnes affirmaient que Gu Kailai y était liée", a relaté Bo devant les juges.

"Le soir même il est revenu me voir pour me reparler de ce problème avec Gu Kailai", a-t-il poursuivi. "J'en ai parlé à Gu, elle s'est mise dans une colère noire et a accusé Wang Lijun de la calomnier".

"Elle m'a remis un certificat de la police de Chongqing établissant la mort par crise cardiaque de Neil Heywood après un excès de boisson. En bas de ce document figurait la signature de la femme de Neil Heywood", a encore relaté Bo. "J'ai cru à ce que me disait Gu Kailai, le certificat était convaincant".

Le lendemain, revoyant Wang Lijun, il lui demande de mieux expliquer ces accusations. "Wang Lijun semblait très embarrassé, il s'est tu, j'ai perdu mon sang froid (...) je l'ai giflé".

"Pourquoi avez-vous brisé un verre après avoir infligé cette gifle?", lui a alors demandé le procureur.

"J'avais beaucoup de mal à me maîtriser et j'ai pensé que Wang avait perdu tout sens moral", a répondu Bo.

Bo Xilai décide ensuite de suspendre Wang Lijun de son poste. Ce dernier se réfugie le 6 février dans un consulat américain où il révèle l'assassinat de Heywood.

Il précipite ainsi la chute spectaculaire de Bo Xilai, qui va créer une onde de choc jusqu'aux plus hautes sphères du Parti communiste.

"Dans cette affaire j'ai fait des erreurs qui ont terni la réputation du Parti et du pays, j'en ai vraiment honte (...) mais cela n'a rien à voir avec le fait d'être coupable", a confié Bo.

Peu avant, l'ex-membre du puissant Bureau politique du Parti communiste avait également admis face aux juges des torts dans un détournement de 5 millions de yuans (612.000 euros) d'argent public au profit de son épouse.

"J'estime devoir assumer ma part de responsabilité dans (le fait) que cet argent soit arrivé sur le compte bancaire de Gu Kailai", a indiqué l'ancien haut responsable.

Ce budget était à l'origine destiné à un projet de construction de la ville de Dalian (nord-est), dont Bo Xilai était maire. "J'ai honte, j'ai fait preuve de négligence, car il s'agissait d'argent public et je n'ai pas surveillé ce qu'il est devenu par la suite", a ajouté Bo Xilai, selon une transcription des débats.

Il a cependant fermement démenti samedi "avoir eu l'intention de détourner ces fonds" et a réfuté un des principaux témoignages à charge.

Wang Zhenggang, responsable du bureau de l'urbanisme de Dalian, avait indiqué au tribunal avoir entendu Bo téléphoner à Gu, pour lui demander de prendre livraison de l'argent.

"Est-ce qu'une personne corrompue et sensée agirait ainsi? Est-ce qu'on m'imagine évoquant ce genre de sujet sensible au téléphone? (...) Même les cadres corrompus les plus stupides ne le feraient pas", a répliqué Bo.

Il est, par ailleurs, accusé d'avoir reçu de deux hommes d'affaires l'équivalent de 2,67
millions d'euros en pots-de-vin --dont une luxueuse villa en France--, charges qu'il a vivement rejetées.

Samedi d'autres détails ont été dévoilés sur la vie dorée et les vicissitudes des intimes de Bo, lequel avait déjà qualifié vendredi son épouse Gu de "folle" et de "menteuse".

Gu Kailai "a décidé de son propre chef d'envoyer notre fils Guagua étudier en Grande-Bretagne (...) Elle a agi par colère. J'avais eu une aventure extra-conjugale à l'époque, ce qui l'avait rendue furieuse", a dévoilé le dirigeant.

AFP