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Le gouvernement français fait sa rentrée en planchant sur... 2025

Pour leur rentrée, François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont invité les membres du gouvernement à plancher sur une vision stratégique pour la France. Un exercice de politique fiction que l’opposition qualifie d’artifice de communication.

L’heure de la rentrée a définitivement sonné pour le gouvernement français. Après une pause estivale réduite à 15 jours pour les ministres et une petite semaine pour le président François Hollande et son Premier ministre Jean-Marc Ayrault, l’ensemble des membres du gouvernement s’est retrouvé, lundi 19 août, à l’Élysée, autour du chef de l'État afin de plancher sur "la France en 2025".

Opération de communication pour l’opposition de droite, ce travail doit permettre, selon l’exécutif, d’offrir une vision "stratégique" à long terme pour le pays. En clair, "de tracer un cap, de dire clairement et précisément aux Français vers quoi nous voulons aller", a justifié le Premier ministre à l’issue du conclave.

Dans un premier temps, le chef de l'État s’est engagé, devant ses ministres, à apporter "d'ici à la fin de ce mois" des réponses sur les "trois grandes questions" de la rentrée : le budget 2014, les retraites ainsi que la reprise économique et ses effets "sur l'inversion de la courbe du chômage".

Au-delà, le Premier ministre a, de son côté, annoncé la mise en place d’un processus de réflexion et de "consultations" qui se poursuivra jusqu'à la fin de l'année et se conclura avec l'adoption par le gouvernement d'une stratégie "pour la France pour les dix années qui viennent".

Le retour du plein emploi ?

Un futur proche que les membres du gouvernement décrivent avec force optimisme. Le ministre de l’Économie et des Finances, Pierre Moscovici, a ainsi jugé "réaliste" un retour au plein emploi en 2025 dans une France qui devrait avoir "pleinement recouvré sa souveraineté budgétaire". Un bémol toutefois : la cinquième puissance économique mondiale n'occupera plus, selon lui, que "la huitième ou neuvième place".

Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a quant à lui promis des "forces de l'ordre 3.0 efficaces, proches de la population et à la pointe des avancées technologiques". Tandis que le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, prédit un retour de la France "dans le concert des grandes nations industrielles" avec une balance commerciale à "excédent structurel".

Cet exercice de politique fiction n’a pas échappé aux critiques de l’opposition. Le député UMP Éric Ciotti a dénoncé "une grosse ficelle de communication". Avant de railler : "La France des socialistes, c'est celle de 1925 plutôt que celle de 2025". Pour la présidente du Front national, Marine Le Pen, ce séminaire "ne laissera probablement rien de plus dans la tête des Français qu'une vague impression de ridicule et de grotesque".

"Nous sommes dans l'action du quotidien et en même temps, nous portons une ambition, a défendu Jean-Marc Ayrault. Penser la France dans dix ans, c'est poser les problèmes qui se posent en 2013, et donc travailler aux solutions pour les résoudre", a-t-il précisé.

Science-fiction

"Par définition, comme on parle de la France de 2025, on est dans la science-fiction, commente sur le plateau de FRANCE 24 Thomas Guénolé, maître de conférence à Science Po. Et tous les fans du genre vous diront qu’une bonne science-fiction, en parlant d’avenir, parle en fait du présent. Tous les ministres ont parlé du présent. Quand Pierre Moscovici parle du retour à la ‘souveraineté budgétaire’, il parle en fait de 10 ans d'austérité. Quand Manuel Valls parle de biométrie, d’intelligence artificielle, il définit sa démarche sécuritaire qui est a contre-pied de la réinsertion et de la prévention prônées par la ministre de la Justice, Christiane Taubira. Il y a là un conflit entre deux ministres qui a lieu aujourd’hui et pas en 2025."

Mais pour Thomas Guénolé, l’exercice consistant à se projeter aussi loin dans le temps reste inhabituel pour un gouvernement. "La perspective de tout gouvernement qui a été élu est d’être à nouveau élu, analyse-t-il. L’année 2025 n’a pas été choisie par hasard car elle recouvre deux législatures complètes. L’idée pour l’exécutif est d’offrir un programme de gouvernement qui, en termes d’objectifs, va jusqu’à la fin d’un second mandat. C’est une manière pour le gouvernement de dire aux Français ‘voilà où nous allons et comment nous allons nous y rendre'. À ma connaissance, aucun gouvernement n’avait encore fait cela."