
L’État hébreu espère grâce à un nouveau compte Twitter réussir ce qu’il échoue à faire depuis des années : établir un dialogue avec les ressortissants des pays du Golfe. Une initiative qui pourrait aussi avoir des visées économiques.
Israël n’a pas de présence diplomatique dans les pays du Golfe mais l'État hébreu compte sur Twitter pour y remédier. Il a inauguré, le 18 juillet, un nouveau compte présenté comme la première “ambassade virtuelle” sur le célèbre réseau de microblogging.
"Notre espoir est de tendre une main et d’ouvrir un dialogue avec les habitants du Koweït, du Bahrein, du Qatar, des Émirats arabes unies, d’Oman et d’Arabie Saoudite"
“Notre espoir est de tendre une main et d’ouvrir un dialogue avec les habitants du Koweït, du Bahreïn, du Qatar, des Émirats arabes unis, d’Oman et d’Arabie saoudite”, affirme dans l'un de ses premiers messages, posté le 18 juillet, ce fil baptisé "Israël dans les pays du Conseil de coopération du Golfe". La dizaine de messages postés sur ce compte depuis son ouverture la semaine dernière est écrit en anglais et en arabe. Les thèmes abordés touchent aussi bien la religion, la musique que la politique. Ainsi le même jour, le 23 juillet, les responsables du compte vantent les mérites d’un musicien israélien qui s’essaie à la musique traditionnelle des pays du Golfe puis saluent l’inscription par l’Union européenne de la branche armée du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes. Une attaque contre le mouvement radical chiite qui peut trouver un écho au sein des pays du Golfe, qui sont tous des monarchies sunnites.
Cette nouvelle initiative israélienne est menée sous la tutelle de “vétérans de la diplomatie de l’État hébreu”, d’après le journal de centre-gauche israélien "Haaretz". L’idée en revient à Gary Koren, un diplomate qui a tenté de créer, par le passé, des ponts avec les pays du Golfe. Le compte est, pour sa part, supervisé par Yoram Morad, directeur du département de la “diplomatie digitale” du ministère israélien des Affaires étrangères.
De la diplomatie au commerce
L’ambassade 2.0 est donc prise au sérieux côté israélien. Elle n’a, en revanche, pas suscité d’enthousiasme particulier parmi les habitants des six États du Golfe censés participer à ce dialogue diplomatique d’un genre nouveau. Aucun internaute de ces pays n’a encore interpellé sur Twitter cette représentation diplomatique inédite. Parmi les plus de 500 abonnés à ce compte, il y a davantage de journalistes et d’universitaires occidentaux que de ressortissants des pays visés. Les quelques habitants de ces pays à suivre le fil de l’”ambassade virtuelle” habitent, pour la plupart, en Arabie saoudite.
Pour certains commentateurs, au-delà du discours officiel de main tendue, cette initiative a également des visées économiques. Les échecs répétés de Tel Aviv pour établir des relations officielles avec les pays du Golfe (fermeture d’une représentation diplomatique à Oman en 2000 et d’un bureau commercial à Doha en 2009) n’empêchent pas les responsables israéliens de lorgner le potentiel commercial des pays du Golfe, juge le quotidien britannique “The Financial Times”.
“Malgré l’absence de relations économiques, les exportations israéliennes vers les États du Golfe en passant par des pays tiers représentent 500 millions de dollars par an”, souligne le journal. Les habitants du Golfe sont particulièrement friands de matériels informatiques israéliens, d'équipements de santé et d'agro-technologie.
“L’ouverture d’une ambassade virtuelle peut aussi être un moyen pour Israël de prendre le pouls de l’opinion dans l’espoir d’une éventuelle détente qui pourrait être un bon signe pour les affaires”, poursuit le “Financial Times”. Si les relations diplomatiques étaient apaisées, les pays du Golfe “pourraient devenir le plus important partenaire commercial d’Israël”, estime pour sa part Yitzhak Gal, professeur d’économie politique à l’université de Tel Aviv.