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La destitution de Morsi galvanise les mouvances radicales et djihadistes

La colère gronde du côté des islamistes qui estiment que l'armée lui a volé son président, issu des rangs des Frères musulmans. Certains au sein des mouvances les plus radicales n’entendent pas rester les bras croisés.

Si la destitution du président égyptien Mohamed Morsi, le 3 juillet, a été accueillie comme une délivrance par des millions d'Égyptiens, notamment place Tahrir au Caire, elle n’a pourtant pas fait pas que des heureux. Dans certains quartiers de la capitale et dans d'autres villes du pays, la frustration et l'amertume règnent du côté des islamistes qui estiment que l'armée lui a volé son président, issu des rangs des Frères musulmans.

Jeudi, l’arrestation de plusieurs cadres de la confrérie, dont le Guide suprême Mohamad Badie, n’a fait qu’attiser la colère de ses partisans. Ce vendredi, le "Front national de défense de la légitimité", composé des principales forces islamistes du pays, ont appelé à manifester en masse pour un "vendredi du refus" contre "le coup d'Etat militaire".
Appels au djihad dans le Sinaï
Jeudi, les Frères musulmans avaient indiqué qu’il était "improbable" qu’ils prennent les armes après le renversement du président Morsi, mais le ton monte dans le camp des islamistes. "C’était notre dernière expérience avec la démocratie, oubliez la démocratie", est-il écrit sur une page salafiste Facebook - intitulée Assalafi Assahabi -, suivie par plus de 200 000 abonnés et qui relaye les propos de religieux extrémistes.
Certains au sein de la mouvance n’entendent pas rester les bras croisés et protester "pacifiquement", conformément à la directive du "Front national de défense de la légitimité". En écartant le président Mohamed Morsi, l’armée égyptienne a pris le risque de réveiller les franges les plus dures de ces mouvances. Plusieurs islamistes radicaux ont publiquement menacé de commettre des violences en représailles à l'éviction de l'ex-président Mohamed Morsi. Pis, des appels au djihad ont été lancés, notamment dans le Sinaï, une région frontalière d'Israël et de la bande de Gaza.
Cette région connaît depuis 2011 une recrudescence d'activité des mouvements djihadistes. Les enlèvements et les attaques visant les forces de sécurité égyptiennes se sont multipliés depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011.
Vendredi matin, des objectifs militaires dans le Sinaï ont été la cible d'attaques armées à El Arish et Rafah, près de la frontière avec Gaza. Un soldat a été tué et deux autres blessés. En réponse, les autorités égyptiennes ont décidé de fermer le point de passage de Rafah, à la frontière avec la bande de Gaza. Ces opérations n'ont pour autant pas été revendiquées pour le moment, et aucun lien direct n’a encore été établi avec la situation politique égyptienne.
"Une nouvelle Al-Qaïda en Égypte"
Toutefois, des vidéos postées ces derniers jours sur Internet par Yqeennews2, une chaîne de télévision proche de la mouvance islamiste, montrent un rassemblement pro-Morsi dans le Sinaï dans lequel des appels au djihad ont été lancés en réponse au "coup d’état".
Dans une autre vidéo, filmée lors de la même manifestation et visionnée plus de 273 000 fois sur YouTube, un islamiste radical avertit que des groupes de kamikazes vont rapidement se former. "Al-Sissi [le général Abdel Fatah Al-Sissi, chef de l'état-major égyptien, NDLR], sache que tu as créé des nouveaux Taliban et une nouvelle Al-Qaïda en Égypte, ces groupes de kamikazes vont s’organiser pour te détruire (…), tu as fabriqué de nouveaux djihadistes et kamikazes, sache que si un sur dix d’entre eux se fait exploser, tu en es le responsable", menace le radical.
En Egypte, le retour de l’armée sur l’arène politique au détriment des formations islamistes, elles-mêmes revenues dans le jeu politique en 2011 à la faveur de la révolution du Nil, risque d’être exploitée par les groupes les plus radicaux et par Al-Qaïda. Cette dernière a toujours affirmé qu’il ne fallait rien attendre de la voie démocratique, car elle n'aboutissait à rien.