, envoyé spécial à Sanaa – Pour la première fois depuis près de 20 ans, un avion a relié la capitale yéménite Sanaa à Bagdad en Irak. À son bord, 120 exilés irakiens, qui avaient fui leur pays. Un "vol de la réconciliation" promu par les autorités irakiennes.
C’est l’agitation au terminal des départs de l’aéroport de Sanaa. Les agents consulaires passent d’un passager à un autre. Des Iraquiens remplissent les formulaires de police. A la case destination, ils peaufinent un "Irak" en belles lettres.
Tout a commencé il y a deux mois. Une petite annonce largement diffusée dans les journaux par le gouvernement irakien. Elle s’adressait aux anciens membres du parti Baas, à ces "Irakiens, tous fils de la Nation". Bagdad a alors ouvert cinq bureaux spéciaux dans les principaux pays de refuge. L’Egypte, la Jordanie, la Syrie, les Emirats arabes unis et le Yémen. Ils y seraient plusieurs milliers : civils poussés dehors pour raisons économiques, du temps de l’embargo onusien, opposants politiques à l’ancien pouvoir ou soutiens indéfectibles de Saddam. "Quand ces soldats rentreront au pays, alors ce sera la vraie démocratie en Irak", explique un jeune homme.
Safaa Hussein Ahmed, fonctionnaire au ministère irakien des Migrations, a fait le voyage de Bagdad, les bras chargés. Près de 700 euros "pour ceux qui remplissent certaines conditions juridiques", plus un accompagnement pour les aider à retrouver leurs anciennes fonctions ou à rescolariser leurs enfants.
"Oiseaux migrateurs"
Le consul irakien arrive enfin, les mains chargées d’enveloppes. Ce sont les passeports, bleus, nouvelle génération, frappés d’un aigle : Republic of Iraq.
Les voyageurs sont bras dessus bras dessous. Ils déambulent, se font l’accolade. "Je ne peux pas dire ce que je ressentirai en arrivant à Bagdad, quand je poserai un pied sur ma terre", raconte un homme d’une soixantaine d’années, au Yémen depuis 20 ans.
L’ambassadeur d’Irak au Yémen observe la scène. Il est venu saluer "ces oiseaux migrateurs, qui ont fait le choix de bâtir le nouvel Irak". L’avion affrété par le gouvernement irakien fend le ciel de Sanaa. Dans trois heures, les 120 exilés fouleront la terre de Bagdad.