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RéessayerLe président américain tire à boulets rouges sur quiconque "joue un rôle" dans la "censure des plateformes américaines du numérique". Ce dernier a interdit de visa, mardi 23 décembre, plusieurs chantres de la lutte contre la désinformation, parmi lesquels l'ancien commissaire européen Thierry Breton, ainsi que quatre activistes. Une nouvelle mesure prise par Washington pour protester contre des réglementations de l'Union européenne (UE) dénoncées par des représentants américains comme illégitimement strictes.
En septembre dernier, Donald Trump avait déjà qualifié le Digital Services Act de menace pour l’innovation et pour la souveraineté américaine. Ordre avait alors été donné aux diplomates de son administration de mener l'opposition à cette nouvelle loi européenne sur le numérique.
Le "Digital Services Act" (DSA), a été conçu par Bruxelles pour combattre les discours haineux et la désinformation en ligne. Mais les États-Unis y voient une entrave à la liberté d'expression et des coûts supplémentaires imposés aux réseaux sociaux américains.
Des règles pour responsabiliser les plateformes
Cette loi européenne, entièrement applicable depuis le 17 février 2024, a été conçue pour encadrer les activités des plateformes, en particulier celles des Gafam, suivant le principe selon lequel "ce qui est illégal hors ligne est illégal en ligne".
Si les grands groupes visés se situent dans des pays où leurs plateformes ne sont pas considérées comme responsables des contenus qu'elles hébergent (Meta et X se situent aux États-Unis, TikTok en Chine), l'Union européenne leur impose désormais certaines obligations.
Le DSA fixe en effet un ensemble de règles pour responsabiliser ces plateformes (fournisseurs d'accès à Internet, réseaux sociaux, market places, applications et moteurs de recherche) et lutter contre la diffusion de contenus illicites ou préjudiciables, ou de produits illégaux. Cela comprend les attaques racistes, les images pédopornographiques, la désinformation, ou encore la vente de drogues ou de contrefaçons.
Les plateformes en ligne doivent notamment proposer aux internautes un outil leur permettant de signaler facilement les contenus illicites, doivent rendre plus transparentes leurs décisions en matière de modération des contenus, et ont l'obligation d'expliquer le fonctionnement des algorithmes qu'elles utilisent pour recommander certains contenus publicitaires en fonction du profil des utilisateurs.
Les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche font l'objet d'une surveillance par la Commission européenne.
En cas de non-respect du DSA, des astreintes et des sanctions peuvent être prononcées. Pour les très grandes plateformes et les très grands moteurs de recherche, la Commission européenne peut infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 6 % de leur chiffre d'affaires mondial.
En cas de violations graves et répétées au règlement, les plateformes peuvent se voir interdire leurs activités sur le marché européen.
Le site Vie publique précise que la Commission a déjà ouvert plusieurs enquêtes et procédures, notamment contre la plateforme X, TikTok, des sites pornographiques comme Pornhub, mais aussi le site Temu.
"Barrières non tarifaires", "liberté d'expression", "souveraineté américaine"
Pour l'administration Trump, "le DSA et le Digital Markets Act (DMA) constitueraient des barrières non tarifaires déguisées, contraires aux règles de l’OMC, en ce qu’ils imposeraient des contraintes plus lourdes aux fournisseurs étrangers qu’aux opérateurs européens et constitueraient une entrave prohibée par le GATT [accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, NDLR]", explique dans un article du Club des juristes, la professeure Brunessen Bertrand.
Le DSA aurait donc été calibré, selon l'argument américain, pour viser prioritairement les entreprises américaines, poursuit-elle. "Quelques plateformes chinoises ou européennes sont certes concernées, mais la charge pèserait essentiellement sur les géants américains, produisant un effet analogue à une subvention réglementaire en faveur des acteurs européens plus petits, qui échappent à certaines obligations".
Donald Trump a par ailleurs accusé le DSA de porter atteinte à la liberté d'expression, et de nuire à la souveraineté américaine en imposant aux entreprises du pays des obligations aux effets extraterritoriaux.
Au lendemain de la prise de sanctions à l'égard des cinq personnalités européennes engagées pour une stricte régulation de la tech, la classe politique française se soulève elle-même contre ce qu'elle considère comme une attaque à la souveraineté européenne.
"Nous ne sommes pas une colonie des États-Unis, a réagi l'eurodéputé social-démocrate Raphaël Glucksmann sur X. Nous sommes Européens, nous devons défendre nos lois, nos principes, nos intérêts. Cette sanction scandaleuse contre Thierry Breton rend hommage à son combat pour notre souveraineté."
Commissaire au Marché intérieur de 2019 à 2024, le Français avait été l'artisan de la directive européenne sur les services numériques (DSA) qui impose aux plateformes des régulations, comme le signalement de contenus problématiques, jugées par les États-Unis comme une atteinte à la liberté d'expression.
"Ne nous y trompons pas : derrière cette mesure, c'est la souveraineté des Européens à décider de leurs lois et à les faire appliquer qui est attaquée", a quant à elle déclaré l'eurodéputée (Horizons) Nathalie Loiseau.
Après la sanction américaine le visant, Thierry Breton a dénoncé un "vent de maccarthysme" aux États-Unis, en référence à la chasse aux sorcières anticommuniste menée par le sénateur américain Joseph McCarthy dans les années 1950.
"Pour rappel : 90 % du Parlement européen – démocratiquement élu – et les 27 États membres (de l'UE) à l'unanimité ont voté le DSA", a-t-il souligné sur X. "À nos amis américains : 'La censure n'est pas là où vous le pensez'."
Avec AFP
