Reconnu coupable de fraude fiscale dans l'affaire Mediaset par la Cour d'appel de Milan, l'ancien président du Conseil italien a été condamné à quatre ans de prison et à cinq années d'interdiction d'exercer toute fonction publique.
La Cour d'appel de Milan a confirmé, ce mercredi, une peine de prison de quatre ans et une interdiction d'exercice de toute fonction publique pendant cinq ans contre l'ancien chef du gouvernement italien pour fraude fiscale dans l'affaire de l'achat de droits télévisés par son empire médiatique Mediaset.
Dans ce procès, Silvio Berlusconi était accusé d'avoir artificiellement "gonflé" le prix des droits de diffusion de films, achetés via des sociétés écrans lui appartenant, au moment de leur revente à son groupe audiovisuel Mediaset. Le groupe aurait ainsi constitué des caisses noires à l'étranger et réduit ses bénéfices en Italie pour payer moins d'impôts. Le manque à gagner pour le fisc italien a été évalué à 7 millions d'euros.
La Cour "déclare inadmissible le recours en appel" des accusés, dont l'ex-Premier ministre, et "confirme la peine prononcée le 26 octobre 2012" en première instance, a indiqué la présidente. À l'automne dernier, le tribunal de Milan avait prononcé une peine de quatre ans de prison - réduite immédiatement à un an en vertu d'une loi d'amnistie - et avait interdit au Cavaliere d'exercer une fonction publique pendant cinq ans.
"Berlusconi n’ira très certainement pas en prison"
Pour Giuseppe Guastella, journaliste au quotidien italien Corriere della Sera, le Cavaliere ne purgera pas sa peine. "Berlusconi n’ira très certainement pas en prison, pour au moins deux raisons. Premièrement, la Cour de cassation doit encore se prononcer sur son cas, vraisemblablement à partir de l’automne 2013. Deuxièmement, trois des quatre années prévues dans la peine sont automatiquement annulées en vertu d’une loi d’amnistie de 2006, et la quatrième serait consacrée à des travaux d’intérêts généraux, en raison de l’âge avancé de Berlusconi", explique le journaliste à FRANCE 24.
L'application de la sentence est, en effet, suspendue à un probable pourvoi en cassation des avocats de l’ancien président du Conseil. Elle dépend aussi d'un verdict attendu de la Cour constitutionnelle concernant un conflit entre la présidence du Conseil et le tribunal de Milan : ce dernier avait refusé, en mars 2010, d'excuser l'absence de Silvio Berlusconi, justifiée alors par un Conseil des ministres, alors que ce dernier était Premier ministre. La Cour devrait prendre sa décision en juin et, au cas où elle donnerait raison au Cavaliere, la procédure serait annulée.
Selon les médias, les accusations de fraude fiscale à l'encontre de Silvio Berlusconi seront, de toute façon, prescrites entre la fin de 2013 et le début de 2014.
"La force des préjugés l'a emporté sur la force des faits"
L'un de ses avocats, Niccolo Ghedini, a aussitôt critiqué une sentence dictée par des "préjugés" des magistrats de Milan à l'encontre de l'ex-chef de gouvernement : "Nous avions conscience que cela allait être probablement leur décision : la force des préjugés l'a emporté sur la force des faits". Et d’ajouter : "nous nous sommes aperçus qu'il était totalement inutile de donner notre opinion devant une cour d'appel qui avait déjà pris sa décision au premier jour de l'audience". L’avocat s'est, cependant, dit confiant dans le jugement de la Cour de cassation et dans la décision finale de la Cour constitutionnelle.
Interrogé sur l'effet de cette sentence sur la stabilité du gouvernement d'Enrico Letta, le premier gouvernement d'union gauche-droite de l'histoire de l'après-guerre en Italie, l'avocat de Berlusconi a estimé qu'"il n'y a aucun lien entre les deux".
Les proches de Silvio Berlusconi sont, par ailleurs, immédiatement montés au créneau pour dénoncer, comme Renato Schifani, chef de file de son parti - le PDL - au Sénat, "une persécution judiciaire contre un dirigeant qui a recueilli (aux dernières élections législatives de fin février, NDLR) les suffrages de 10 millions d'électeurs".
Sur la même ligne de dénonciation de juges "politisés", son homologue à la Chambre, Renato Brunetta, a estimé que, "par chance, la grande majorité des citoyens comprennent qu'une partie de la magistrature n'a aucune crédibilité".
Avec dépêches