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Le chef de file du centre gauche, Pier Luigi Bersani, a annoncé qu'il démissionnerait du Parti démocrate, une fois le président de la République élu. Au quatrième tour, aucun candidat n'a réussi à se faire élire par les grands électeurs.

Le chef de file du centre gauche italien, Pier Luigi Bersani, a annoncé vendredi soir qu'il démissionnerait de la tête du Parti démocrate (PD) dès que serait élu le futur président de la République, fustigeant la "trahison" d'une partie de ses troupes.

Les deux candidats qu'il avait successivement proposés pour succéder à Giorgio Napolitano, Franco Marini puis Romano Prodi, n'ont pu se faire élire par les grands électeurs. Son double échec a révélé l'ampleur des dissensions au sein même du Parti
démocrate, dont plusieurs dizaines d'élus ont voté contre ses consignes.

"Il y a parmi nous un traître sur quatre, pour moi, c'est inacceptable", a-t-il dit au groupe parlementaire du PD, selon l'agence Agi.

En Italie, le président de la République successeur de Giorgio Napolitano est élu au suffrage indirect par un collège de 1.007 grands électeurs (les sénateurs, les députés et 58 représentants des régions). Une majorité qualifiée des deux tiers était requise lors des trois premiers tours de scrutin, jeudi et vendredi matin. L'élection se joue désormais à la simple majorité absolue.

Franco Marini, qui avait été choisi par Bersani en accord avec Peuple de la liberté (PDL), le parti de droite de Silvio Berlusconi, et le pôle centriste formé autour de Mario Monti, n'a pu franchir le seuil requis.

Romano Prodi, que Bersani avait ensuite choisi, en rupture avec la droite berlusconienne qui ne voulait pas entendre parler de l'ancien président du Conseil et de la Commission européenne, a à son tour été largement défait: il lui a manqué plus de 100 voix vendredi pour être élu, n'obtenant que 395 voix quand il lui en aurait fallu 504 pour être élu.

Stefano Rodota, présenté par le mouvement Cinq Etoiles (M5S) de Beppe Grillo, est arrivé second avec 213 voix.

Renzi le mieux placé pour succéder à Bersani?

Prodi a très vite tiré les conclusions: "Le résultat de ce vote et la manière dont il a été obtenu me conduisent à penser que les conditions nécessaires pour continuer ne sont plus réunies", a-t-il dit dans un communiqué diffusé vendredi en début de soirée.

Bersani n'a pas tardé à l'imiter.

"Il a assumé sa responsabilité à la suite du déshonneur de ce qui s'est produit", a dit Paolo Gentiloni, député influent du Parti démocrate qui participait à la réunion.

Son départ signe l'échec de la stratégie qu'il a mise en oeuvre après les élections législatives des 24 et 25 février, qui ont donné à sa coalition la majorité à la Chambre des députés mais pas au Sénat, qu'aucun parti ne contrôle.

Des discussions exploratoires qu'il a menées pour tenter de mettre sur un pied une coalition de gouvernement au camouflet présidentiel: tout ce que Bersani a tenté a échoué.

A ce stade, son départ accentue le trouble et l'incertitude en Italie, même si la perspective d'élections anticipées dès le mois de juin est de jour en jour plus probable.

Matteo Renzi, le jeune maire de Florence que Bersani avait battu lors des primaires du centre gauche en décembre, semble le mieux placé pour prendre les rênes du Parti démocrate. A 38 ans, il est aujourd'hui, et de loin, la personnalité la plus populaire au centre-gauche.

Après s'être fait discret dans les semaines ayant suivi les élections de février, Renzi, incarnation de la branche sociale-démocrate du parti, a changé de braquet, dénonçant
publiquement le choix de Marini - "un candidat du siècle dernier" - puis proclamant la fin de la candidature Prodi.

"La classe politique devrait avoir honte"

Mais plus le marasme politique dure, plus l'inquiétude
s'installe.

"La classe politique devrait avoir honte de ce qu'elle inflige à notre pays. Aujourd'hui, nous sommes face à un degré d'irresponsabilité qui dépasse toutes les bornes", a dénoncé Diego Della Valle, qui dirige le fabricant de chaussures de luxe Tod's, l'une des entreprises les plus florissantes d'Italie.

Car l'élection du successeur de Giorgio Napolitano à la tête de l'Etat est une étape clé pour débloquer la situation deux mois après les élections parlementaires des 24-25 février.

Le prochain président aura en effet dans son jeu une carte que Napolitano, trop près de la fin de son mandat, ne pouvait plus abattre: la possibilité de dissoudre le parlement.

En se prononçant pour l'un des plus anciens adversaires politiques de Silvio Berlusconi, président du Peuple de la Liberté (PDL), Pier Luigi Bersani avait osé rompre le dialogue avec le centre-droit, y compris pour la formation d'un
gouvernement.

"Aujourd'hui, ils ont choisi Prodi et nous considérons qu'il s'agit d'un acte de rupture", avait déclaré Fabrizio Cicchitto, chef du groupe PDL à la Chambre des députés. "Cela signifie que les conditions fondamentales n'existent pas pour parvenir à un accord de gouvernement."

Quelque 200 manifestants anti-Prodi ont protesté devant le parlement et plusieurs parlementaires emmenés par Alessandra Mussolini, petite-fille du Duce, arboraient des tee-shirts sur lesquels on pouvait lire "Pas ça" ou encore "Le diable s'habille en Prodi".

Deux nouveaux tours de scrutin sont prévus ce samedi. Berlusconi a annoncé que ses troupes n'y prendraient pas part. Un cadre du PD a indiqué lui que les élus du centre-gauche voteraient certainement blanc.
 

REUTERS