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Le président François Hollande est arrivé mercredi soir en Inde pour son premier déplacement en Asie. Un choix révélateur : la France attend toujours que New Delhi signe "le contrat du siècle" avec Dassault pour 126 chasseurs Rafale.

Promis juré, il ne sera pas un “président-VRP” de l’économie française comme l'était, selon lui, son prédécesseur Nicolas Sarkozy. François Hollande l’a suffisamment répété pendant la campagne électorale qui l’a mené à l’Élysée. N’empêche, pour son premier déplacement en Inde en tant que président, les 14 et 15 février, le chef d’État amène avec lui une soixantaine de patrons qui ne devraient pas se contenter de célébrer l’amitié franco-indienne.

Les PDG de Thalès, LVMH, Sanofi ou encore EADS auront probablement à cœur de faire avancer leurs pions économiques en Inde. Mais c’est surtout le PDG de Dassault aviation Éric Trappier qui devrait retenir l’attention. L’avionneur français n’en finit pas d’essayer de conclure la vente de 126 avions Rafale à l’Inde.

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François Hollande s'est entretenu avec Manmohan Singh
L’ombre du Rafale plane au-dessus de la visite de François Hollande en Inde

Même si, côté Élysée, on affirme ne pas être là "pour signer des contrats mais pour favoriser les échanges commerciaux dans les deux sens”, la délégation française aimerait sûrement voir le dossier Rafale connaître une issue heureuse pour Dassault. Et ce, au plus vite.

Car les négociations traînent depuis plus d’un an. Fin janvier 2012, le Rafale avait été préféré par les Indiens à son concurrent le Typhoon, construit par le consortium européen Eurofighter. Mais depuis, et malgré un optimisme affiché aussi bien chez Dassault qu’à l’Élysée ou encore en Inde, les contrats ne sont toujours pas signés.

Très cher Rafale

La raison principale de ce retard concerne le prix. Le contrat s’élèverait à près de 12 milliards de dollars (environ 9 milliards d’euros). Une somme qui inclut la livraison et le suivi des avions. Si pour l'Inde, c'était peut-être le meilleur rapport qualité prix, New Delhi ne va pas sortir de sa poche sans y réfléchir à deux fois. Le géant asiatique est, en effet, engagé dans une forte politique de rigueur afin de réduire ses déficits.

Le Rafale est, en outre, plus cher que ses concurrents. Certes, il est l’un des chasseurs les plus perfectionnés au monde. Mais en ces temps de diète budgétaire, les détails d'un contrat autour d'un avion qui coûte, à l'unité, plus de 100 millions de dollars doivent être âprement négociés. Dassault est conscient du contexte économique et, d’après Europe 1, le groupe promet à l’Inde un transfert de technologies qui pourrait fortement intéresser New Delhi. Le sous-continent asiatique avait mis comme condition à l'obtention du contrat pour tous un transfert de technologie de 50% au moins.

Enfin, il y a des négociations délicates sur l’aspect technique du contrat. En effet, 108 Rafale doivent être construits en Inde. Mais encore faut-il trouver, sur place, un groupe ayant la capacité technologique pour le faire. Pour l’heure, ce serait la société indienne Hindustan Aeronautics Ltd (HAL) qui serait la mieux placée pour participer à la production de l’avion. Mais “certains doutent que HAL ait les compétences pour garantir la qualité des avions”, rappelle le magazine français L’Expansion.

Vitale pour Dassault, important pour Hollande

Il y a donc encore des détails à régler, et une signature en mars, comme cela avait été envisagé fin 2012, semble compromise. "En termes d'accords industriels, on a fait plus de la moitié du chemin", a assuré, le 6 février 2012, Eric Trappier en marge du salon aéronautique de Bangalore.

Pourtant, le contrat indien est vital pour Dassault. Le constructeur français n’a pas vendu de Rafale à l’étranger depuis le premier vol du chasseur à Istres en 1986. Le temps commence à être long et coûte au groupe (financièrement soutenu par l’État français) de l’argent.

La livraison des 126 avions garantirait cinq ans de travail aux usines Dassault et, comme le souligne L’Expansion, un succès “pourrait ouvrir d'autres marchés”.

Ce contrat serait par ailleurs une victoire politique pour François Hollande. Il pourrait affirmer qu’il a réussi à débloquer la situation là où son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, avait échoué.

L’ex-président français s’était quelque peu emballé le 31 janvier 2012 lorsque le Rafale avait été sélectionné par l’Inde. Il avait alors affirmé que cela faisait “trente ans qu'on attendait ce jour”, comme si tout était déjà réglé. Or, la France attend toujours. En décembre 2012, le Brésil, autre client potentiel pour le Rafale, a remis une nouvelle fois à plus tard une décision alors que l’éxécutif français déclarait que le marché était "conclu".

Mais surtout un tel contrat et les sommes en jeu seraient une bonne nouvelle pour le commerce extérieur français. Un succès que François Hollande aimerait bien pouvoir inscrire à son actif à l’heure où le déficit de la balance commerciale atteint 67,2 milliards d’euros.