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Une vingtaine d'enfants roms âgés de 6 à 12 ans sont scolarisés depuis le 22 novembre dans une salle aménagée dans les locaux du commissariat de police de Saint-Fons, dans la banlieue lyonnaise, ce qui soulève l'indignation des associations.

Ils ont entre 6 et 12 ans et, tous les matins, c’est un policier qui leur ouvre la porte de l’école. Une vingtaine d’enfants roms du bidonville de Saint-Fons, une commune de 20 000 habitants dans la banlieue de Lyon, est scolarisée depuis le 22 novembre dans l’hôtel de police de la ville.

En guise de justification, la maire socialiste de la commune et sénatrice du Rhône, Christiane Demontès, assène que les quatre écoles municipales n’ont plus suffisamment de places pour accueillir les enfants roms. Un argument inacceptable pour les associations humanitaires...
"L’intégralité des enfants scolarisés dans ce commissariat sont roms. Il y a donc une volonté politique du gouvernement et des élus locaux de discrimination et de stigmatisation d’une minorité ethnique", s’insurge ainsi Jean-Philippe, bénévole du Mrap de la région Rhôn e, contacté par FRANCE 24.  
La classe, située au deuxième étage du commissariat, mêle des enfants d’âges et de niveaux différents - certains francophones, d’autres parlant uniquement le romani - face à une seule enseignante. En cas de retard, les enfants trouvent porte close et sont obligés de rentrer chez eux, à 1,5 kilomètre de là. En l’absence de cantine dans le bâtiment, ils multiplient les aller et retour - et les kilomètres - entre le camp et le commissariat.
"C’est un calcul de la mairie car ils pensaient que les Roms ne resteraient pas longtemps dans la commune", ajoute Jean-Philippe.
Hostilité latente à la présence des Roms
La présence des Roms, installés dans un bidonville entre deux autoroutes depuis le mois d’août, a déjà suscité tensions et réticences à Saint-Fons. Le 8 janvier dernier, à la suite du caillassage d’un de leurs véhicules, des policiers de la banlieue sud-est de Lyon sont intervenus dans le bidonville. En tenue anti-émeute, harnachés de casques, boucliers, flash-ball, tasers et chiens d’attaque, ils ont fait usage de gaz lacrymogènes dans une dizaine de maisons, selon les témoignages des habitants.  

Descente policière dans le bidonville de Saint-Fons, le 8 janvier (vidéo France 3)

La municipalité de Saint-Fons a demandé l’expulsion du camp de Roms. Mais la justice a accordé un délai supplémentaire de quatre mois aux familles à compter du 24 janvier, estimant que cette décision n’avait aucun caractère d’urgence. Les familles resteront donc à Saint-Fons jusqu’au 24 mai au moins. "Cela fait donc quasiment l’équivalent d’une année scolaire gâchée, où l’on a refusé à ces enfants des conditions de scolarisation normales", ajoute Jean-Philippe.
La politique ambiguë du gouvernement
Les militants associatifs de Saint-Fons avaient demandé à deux reprises, lors de la rentrée de septembre, la scolarisation des enfants roms. En octobre, le Mrap et l’association Enfants sans toit occupaient les locaux de la mairie de Saint-Fons. Un mois plus tard, la classe était ouverte dans l’hôtel de police avec l’accord de la préfecture et de l’inspection d’académie. "La maire ne fait qu’appliquer les directives de Manuel Valls", ajoute-t-ils, dénonçant les ambiguités de gouvernement qui veut "intégrer" mais "n'en donne pas les moyens". 
Le ministre français de l’Intérieur mène, depuis plusieurs mois, une politique de fermeté à l’égard de la communauté rom dont il a multiplié les démantèlements de camps pendant l’été 2012. Tout en dénonçant la stigmatisation de la minorité et en faisant la promotion de l'insertion par le travail, Manuel Valls n'a pas hésité à rappeler que la France ne pouvait "accueillir la misère du monde" et estimé que "ces populations ont vocation à retourner en Roumanie". En décembre, il annonçait néanmoins vouloir supprimer "l’aide au retour" aux Roms qui acceptent de rentrer dans leur pays d'origine, dénonçant les "effets pervers" du dispositif jugé coûteux et inopérant par de nombreux acteurs. 
Le cas de Saint-Fons n’est  pas isolé. À Ris-Orangis, dans l’Essone, treize enfants roms sont scolarisés depuis le 21 janvier dans une annexe du gymnase municipal, à quelques centaines de mètres du bidonville où ils vivent depuis l'été dernier. En octobre 2012, le gouvernement a pourtant sorti trois circulaires pour favoriser la scolarisation des enfants roms. Un vœu pieux ?