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Les Ferrari, victimes bling-bling de la rigueur italienne

Les ventes de Ferrari, Maserati et autres véhicules très haut de gamme sont en net recul depuis le début de l’année en Italie. Une conséquence bling-bling de la cure d’austérité et de la lutte contre l’évasion fiscale dans le pays.

Le Premier ministre italien Mario Monti a estimé, mercredi 29 août, que “les marchés financiers commencent à comprendre” les vertus de ses réformes. C’est peut-être vrai des investisseurs, mais c’est très loin d’être le cas d’un secteur qui a longtemps symbolisé le "Made in Italy" : les voitures de luxe. Le déclin transalpin de cette filière est en train de devenir l’un des signes extérieurs les plus flagrants d’une Italie grippée par l’austérité imposée par le gouvernement.

Les Ferrari, Maserati (Fiat) ou encore Bugatti n’ont plus la cote en Italie, comme les chiffres l’attestent. Les ventes de voitures de luxe devraient chuter de 47 % en 2012, selon le cabinet d’études américain spécialisé dans l’industrie automobile IHS Automotive. Il prévoit que les Italiens achèteront 593 voitures de luxe cette année, soit moitié moins qu’en 2008, époque où la crise de la dette n’avait pas encore frappé à la porte du pays. Les deux marques de prestige de Fiat ainsi que les Lamborghini (qui appartiennent à l’allemand Volkswagen depuis 1998) ont connu un mois de janvier particulièrement catastrophique avec un recul des ventes en Italie de près de 60 %, avait déjà souligné en février l’Anfia, la principale association de constructeurs automobiles italiens.

Non seulement les Italiens fortunés ne dépensent plus - ou presque - des centaines de milliers d’euros pour acquérir des véhicules très haut de gamme, mais ils sont aussi plus nombreux à les revendre. Sur les cinq premiers mois de 2012, 13 633 voitures de luxe d’occasion ont ainsi été exportées soit par des revendeurs, soit directement sur Internet, contre 4 923 seulement sur toute l’année 2011, s’est alarmé l’Unrae, un syndicat italien des professionnels de l’industrie automobile, au début du mois d'août.

“L’Italie a toujours été un bastion de voitures de luxe mais, maintenant, elles disparaissent des rues. C’est un symbole très fort de la gravité de la crise”, a confirmé le 23 août Giuliano Noci, l'un des responsables de la faculté d’économie de l’Institut polytechnique de Milan, au site américain BusinessWeek .

Ce déclin sans précédent pousse, en outre, ces marques à délaisser leur marché historique pour aller chercher fortune ailleurs. C’est d’ailleurs ce qu’a laissé entendre Sergio Marchionne, le PDG de Fiat, en janvier, lorsqu’il a opposé une “Italie frappée par l’austérité” et des “marchés plus dynamiques ailleurs dans le monde”.

Contrôles fiscaux

Ce désamour des super-riches italiens pour les super-voitures de luxe ne provient cependant pas d’une soudaine chute de leur pouvoir d’achat. “L’automobile haut de gamme a traditionnellement toujours mieux résisté aux crises que les autres secteurs en Italie”, a rappelé le 14 août à Bloomberg Romano Valente, le secrétaire général d’Unrae. Il s'agit, en fait, d'une conséquence directe du plan d’austérité mis en œuvre en fin d’année dernière par le gouvernement et de l’augmentation des taxes sur les biens de luxe.

Une augmentation suivie, en janvier, du feu vert donné par les autorités aux agents du fisc pour qu'ils contrôlent les possesseurs de voitures très haut de gamme. Ainsi, au début de l'année, la presse italienne a fait grand bruit d'un raid du fisc à Cortina D’Ampezzo, dans les Dolomites, au cours duquel il a été découvert que 42 propriétaires de véhicules de luxe avaient déclaré moins de 30 000 euros de revenus pour 2010. Quelques mois plus tard, en juillet, la police financière a arrêté, à Bergame, le conducteur d’une Ferrari qui, après contrôle, accusait 3 millions d’euros d'impôts impayés depuis 2007.

Ce "délit de sale voiture de luxe" participe, en fait, à l’effort italien pour lutter contre l’évasion fiscale, qui représente un manque à gagner d’environ 180 milliards d’euros par an, selon le cabinet britannique Tax Research UK. “C’est avant tout symbolique et permet surtout de faire passer le message auprès des moins riches que le gouvernement veut faire participer les plus fortunés à l’effort de rigueur”, précise Giuseppe Ragusa, économiste à l’université LUISS de Rome, à l'hebdomadaire américain Time.