Plusieurs explosions ont visé, ce dimanche, des églises chrétiennes dans l'État de Kaduna, dans le nord du Nigeria. Ces attaques ont créé des émeutes et fait 45 morts. Un couvre-feu a été décrété.
AFP - Le bilan des attentats qui ont visé trois églises du Nord du Nigeria et des représailles de chrétiens qui ont suivi s'est alourdi à au moins 45 morts, amenant un ministre italien à dénoncer lundi une stratégie d'extermination de la minorité chrétienne de la part du groupe islamiste Boko Haram.
"Le bilan était de 45 morts la nuit dernière vers 22H00", a dit un responsable des secours sous couvert de l'anonymat. "Il devrait s'aggraver encore lorsqu'il sera actualisé", a-t-il dit. Les chiffres précédents faisaient état de 36 morts dans les violences de dimanche.
Les attentats suicides ont eu lieu à Zaria et Kaduna, les deux principales villes de l'Etat de Kaduna où un couvre-feu de 24 heures a été décrété par les autorités locales.
A Zaria, les explosions ont visé à dix minutes d'intervalle la cathédrale catholique du Christ Roi et l'église évangélique de la Bonne Nouvelle. A Kaduna, c'est l'église de Shalom qui a été prise pour cible dans des faubourgs sud de la ville à majorité chrétienne.
Ces attaques n'ont pas été revendiquées, mais le groupe islamiste Boko Haram, auteur de nombreux attentats anti-chrétiens, a récemment déclaré qu'il continuerait à s'en prendre aux églises.
Après les attentats, des foules de chrétiens en colère se sont livrées à des représailles contre des musulmans dans un faubourg majoritairement chrétien de la ville de Kaduna.
Les émeutiers, essentiellement des jeunes chrétiens, ont notamment érigé des barricades sur la grande route menant au sud vers la capitale fédérale Abuja.
Selon l'agence des situations d'urgence, les violences de dimanche ont fait plus de 100 blessés.
Beaucoup souffrent de blessures infligées à la machette lors des représailles et les hopitaux manquaient de sang lundi pour opérer, a déclaré un responsable de la Croix-Rouge.
Une semaine auparavant, le dimanche 10 juin, les islamistes de Boko Haram avaient affirmé avoir visé deux églises du centre et du nord-est du Nigeria, des attentats qui ont fait quatre morts, dont un kamikaze, et une cinquantaine de blessés.
Un porte-parole des islamistes avait déclaré que ces attaques voulaient démontrer que le groupe restait actif malgré les opérations de répression des forces de sécurité.
Boko Haram multiplie depuis mi-2009 les attentats notamment dans les villes du nord à majorité musulmane qui ont fait plus d'un millier de morts. Ces attaques visent essentiellement les membres des forces de sécurité, les responsables gouvernementaux et les lieux de culte chrétiens.
Réagissant aux dernières violences, le ministre italien de la Coopération internationale, Andrea Riccardi, a déclaré que les attaques de Boko Haram contre les églises au nord du Nigeria constituaient "une extermination systématique" des chrétiens.
"Boko Haram veut le nettoyage ethnique au nord et les chrétiens sont l'objectif. Ce n'est pas un petit épisode mais une extermination systématique", juge le ministre catholique, fondateur de la Communauté Sant'Egidio, proche du Vatican, dans une interview à La Repubblica.
"Boko Haram veut provoquer un front anti-chrétien qui donne l'hégémonie aux musulmans locaux. C'est ce que faisait sur une échelle plus grande Al-Qaïda", note-t-il.
"La stratégie perverse de Boka Haram est de provoquer une guerre civile", a ajouté M. Riccardi.
Un appel a été lancé au parlement italien par des parlementaires de divers groupes: "Nous devons nous mobiliser à tous les niveaux pour mettre un terme à la chasse aux chrétiens", affirme cet appel cité par le quotidien La Stampa.
Le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique avec quelque 160 millions d'habitants, est divisé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne plus riche grâce au pétrole.