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Un nouveau texte de loi va restaurer le délit du harcèlement sexuel

Soucieux de combler le vide juridique créé il y a deux mois par la décision du Conseil constitutionnel d'abroger la loi sur le harcèlement sexuel, le gouvernement présentera, mercredi, un texte qui permettra de protéger au maximum les victimes.

AFP - Le nouveau projet de loi sur le harcèlement sexuel, révélé mardi, prévoit plusieurs formes de harcèlement et de sanctions, ce qui permettra selon le gouvernement de protéger le maximum de victimes, mais constitue une "usine à gaz" pour une association féministe.

Le texte, préparé conjointement par les ministres de la Justice Christiane Taubira et des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem, sera présenté mercredi en Conseil des ministres.

Révélé mardi par deux radios, le projet de loi vise à combler le vide juridique créé par l'abrogation de l'ancienne loi en mai dernier par le Conseil constitutionnel, qui l'avait jugée trop floue.

Il "vise à protéger efficacement, totalement les femmes", avait récemment assuré Mme Vallaud-Belkacem.

Ce texte prévoit deux formes distinctes de harcèlement sexuel, avec des peines bien distinctes.

Le premier cas de figure stigmatise tout agissement consistant à "imposer à une personne, de façon répétée, des gestes, propos ou tous autres actes à connotation sexuelle soit portant atteinte à sa dignité, en raison de leur caractère dégradant ou humiliant soit créant pour elle un environnement intimidant, hostile ou offensant". Le harceleur risque alors un an de prison et 15.000 euros d'amende.

Dans la seconde situation, "est assimilé à un harcèlement sexuel", le fait mentionné dans le premier cas qui, "même en l'absence de répétition, s'accompagne d'ordres, de menaces, de contraintes ou de toute autre forme de pression grave accomplis dans le but réel ou apparent d'obtenir une relation sexuelle". Dans ce cas de figure, les sanctions seraient doublées: deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende.

Des peines plus élevées sont prévues en cas d'abus d'autorité, d'actes commis sur des mineurs de 15 ans ou sur des personnes vulnérables.

Pour le gouvernement, le texte se rapproche de la directive européenne de 2002 sur le harcèlement sexuel, jamais transposée dans le droit français et propose une "définition aussi précise que possible d'une infraction pénale".
                                                
"Inapplicable en l'état"
              
           
"On sent que le gouvernement a fait l'effort de couvrir le maximum de situations possibles de harcèlement sexuel", a reconnu Marilyn Baldeck, la déléguée générale de l'Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT), interrogée par l'AFP.

Pour autant, "c'est un texte compliqué, c'est une usine à gaz", a-t-elle estimé.

En effet, "les conditions de la première forme de harcèlement sexuel sont cumulatives avec les secondes", a-t-elle décrypté. "Pour obtenir l'infraction la plus sévèrement réprimée, la victime va devoir prouver énormément de choses" ce qui rend le texte "inapplicable en l'état".

En outre, "pour le gouvernement, la forme la plus grave de harcèlement sexuel reste moins punie que le délit de vol, le message est quand même gravissime", a-t-elle déploré.

Autre critique de l'association: "le projet de loi sanctionne un acte unique deux fois plus sévèrement qu'un acte répété".

Le gouvernement souhaite que le nouveau texte puisse être "adopté avant la fin du mois d'août", a-t-on indiqué au ministère des Droits des femmes. Il sera donc présenté en procédure accélérée au Parlement (une seule lecture par assemblée).

Il n'apportera pas de réponse aux victimes dont les procédures ont été annulées après l'abrogation de la loi par le Conseil constitutionnel. Or "en dépit d'une circulaire de la chancellerie", les tribunaux annulent les poursuites pour harcèlement sexuel sans chercher à les requalifier, souligne l'AVFT, qui évoque des centaines de dossiers en souffrance.