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Le gouvernement tente de briser le "printemps érable" avec une loi d'exception

Le gouvernement québécois a déposé un projet de loi d'exception pour mettre fin à la grève étudiante, entamée au mois de février. L'opposition et les manifestants contestent cette loi, qui prévoit notamment une forte restriction du droit de grève.

AFP - Le gouvernement québécois du libéral Jean Charest (centre droit), qui compte sur une loi spéciale pour forcer au moins une "pause" dans le conflit étudiant, a subi jeudi au parlement un violent tir de barrage de l'opposition pour son refus de reprendre les négociations.
              

"Je veux que le Premier ministre rencontre les étudiants aujourd'hui", a tonné la dirigeante du Parti Québécois et chef de l'opposition officielle Pauline Marois, bruyamment applaudie par ses partisans.

"Il faut dialoguer, sans passer par une loi spéciale-matraque", a-t-elle poursuivi avec émotion.

Quelques heures plus tard, les leaders étudiants ont lancé un ultime appel à la négociation pour mettre fin à la grève des cours contre la hausse des frais de scolarité, vieille de quatorze semaines.

Les représentants des principaux syndicats d'étudiants se sont unis pour la première fois à des personnalités politiques de l'opposition -dont Pauline Marois, et plusieurs députés- pour tenir une conférence de presse retransmise en direct à la télévision publique, quelques heures avant le dépôt du projet de loi au parlement.

Les professeurs d'université sont entrés à leur tour de plain pied dans le conflit. La Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université s'est prononcée contre le projet de loi spéciale, qui "ne fera qu'envenimer la situation" selon elle.

M. Charest justifie son refus d'une nouvelle négociation en affirmant avoir perçu un durcissement de la position des étudiants, ce que ces derniers contestent vivement.

"Le gouvernement assume ses responsabilités, c'est ce qu'attendent les citoyens" a-t-il martelé devant la presse.

Le projet de loi spéciale, dévoilé jeudi soir, prévoit notamment une forte restriction du droit de manifester et de très lourdes amendes pour les organisateurs de piquets de grève. Un individu seul, par exemple, encourrait une amende de 1.000 à 5.000 dollars. Une association d'étudiants qui organiserait un tel rassemblement ou lancerait le mot d'ordre de bloquer l'accès à une université risquerait, elle, de devoir payer de 25.000 à 125.000 dollars, le double en cas de récidive.

Les représentants étudiants sont apparus choqués, en colère, après lecture du projet de loi. "Cette loi est, et de loin, pire que l'augmentation des droits de scolarité pour les étudiants" a carrément lancé Léo Bureau-Blouin, le président de la FECQ (Fédération étudiante collégiale du Québec). De son côté, Gabriel Nadeau-Dubois, président de la CLASSE, le syndicat le plus radical, a affirmé que le texte était tout simplement "anticonstitutionnel" et a appelé à la "désobéissance civile".

Le projet de loi prévoit également une suspension des cours jusqu'au mois d'août dans les établissements en grève, sans annulation de la session.

Selon le gouvernement, 30% seulement des étudiants boycottent les cours, la grève paralysant 14 collèges universitaires sur 48 et "certaines facultés" de 11 universités sur 18 au total.

La dernière offre du gouvernement --massivement rejetée par les étudiants grévistes-- prévoit une augmentation de 82% des droits de scolarité à l'université de 1.780 dollars sur sept ans, au lieu de cinq ans initialement, pour arriver à près de 4.000 dollars par an, plus près de la moyenne nord-américaine.

M. Charest souligne qu'en contrepartie, les prêts et bourses augmenteront également, ce qui devrait annuler la hausse pour environ un étudiant sur deux.