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En réponse aux revendications de plus en plus nombreuses pour un "pacte de croissance", Mario Draghi, patron de la Banque centrale européenne, a estimé que croissance et rigueur budgétaire n'étaient pas contradictoires.

REUTERS - La croissance doit être une priorité de la zone euro mais pas au détriment de la discipline budgétaire, a estimé jeudi le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi.

Lors d'une conférence de presse donnée en Espagne, l'un des pays de la zone euro les plus affectés par la crise de la dette, Mario Draghi a répété que l'économie de la zone euro devrait se redresser dans le courant de l'année mais ajouté que "les perspectives économiques restent soumises à des risques orientés à la baisse".

Cette atonie de la croissance devrait contenir l'inflation, même s'il est probable qu'elle restera au-dessus de 2% cette année chez les Dix-Sept.

"Il semble que la reprise mondiale suive son cours (...) Nous continuons de penser que l'économie de la zone euro se redressera progressivement dans le courant de l'année", a-t-il dit, après que la BCE a observé le statu quo, laissant son taux de refinancement à un plus bas record de 1%.

L'hôtel de Barcelone où était réuni le conseil des gouverneurs de la BCE était entouré d'un important dispositif policier, dans l'éventualité de manifestations contre la politique d'austérité de Madrid qu'appuie la banque centrale.

Pour Mario Draghi, il n'y a "pas la moindre contradiction" à poursuivre un pacte de croissance tout en continuant sur la voie de l'assainissement des finances publiues.

"Il est certain que je suis d'accord avec votre question lorsque vous dites qu'il faut remettre la croissance à l'ordre du jour, sans la moindre contradiction avec la nécessité de persévérer dans la consolidation budgétaire", a-t-il affirmé.

Mario Draghi fut l'un de ceux qui ont contribué à réorienter le débat économique la semaine dernière dans la zone euro, en évoquant, sans autre précision, un "pacte de croissance".

L'austérité budgétaire résumé par le symétrique "pacte budgétaire", auquel un pays comme l'Allemagne accorde un grand prix, est loin de plaire au grand public comme aux investisseurs, alors que certains pays comme l'Espagne sont retombés dans la récession.

La BCE a injecté plus de 1.000 milliards d'euros dans le système bancaire en décembre et en février pour pousser les banques à prêter à nouveau à l'économie réelle et faciliter les conditions d'emprunt des pays membres de la zone euro.
Il n'empêche que l'Espagne doit servir des taux de rendement toujours plus élevés lors de ses adjudications, même si celles-ci suscitent une demande appréciable.

"Prématuré"

De fait, Mario Draghi a insisté sur le fait qu'il serait "prématuré" pour la BCE de revenir déjà sur certaines de ses mesures exceptionnelles pour prévenir un assèchement du crédit.

Le patron de la Bundesbank Jens Weidmann fait pression sur Mario Draghi pour qu'il restreigne le rôle joué par la BCE dans la crise, voulant que les pays fassent le ménage chez eux plutôt que recourir à la banque centrale.

"Un assainissement budgétaire pertinent et des réformes structurelles résolues constituent la meilleure politique de croissance parce que de cette manière on rétablit la confiance et la performance économique s'en trouve renforcée", a dit Jens Weidmann à l'hebdomadaire Die Zeit.

Mario Draghi doit également tenir compte de l'opposition de la Bundesbank à toute nouvelle baisse des taux ou à la relance du programme de rachat d'obligations, lequel avait été mis sur pied pour alléger les coûts d'emprunt de pays tels que l'Italie et l'Espagne.

"La crise de l'euro ne s'est pas aggravée à ce point qu'il prenne le risque de se confronter à la Bundesbank sur ce point", estime Holger Schmieding, économiste chez Berenberg Bank, au sujet du programme de rachat d'obligations.

La BCE n'a pas réactivé ce programme depuis sept semaines, alors que même que le taux de rendement de l'emprunt espagnol à 10 ans a dépassé 6%. Une percée définitive de ce taux, vers les 7% par exemple, serait insoutenable pour l'Espagne, considère-t-on généralement.

Selon une enquête Reuters publiée la semaine dernière, la BCE devra reprendre son programme de rachat de titres de dettes souveraines de pays de la zone euro dans le courant des trois prochains mois en raison du niveau élevé des rendements obligataires de plusieurs pays et de la rechute en récession du bloc