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La répression s'accentue en Syrie malgré un appel de l'ONU à cesser le feu

Plus de 60 civils ont été tués jeudi au cours d'assauts de l'armée régulière, dans plusieurs hauts lieux de la contestation en Syrie. Le régime accentue la répression malgré les pressions croissantes de l'ONU et de l'Union européenne.

AFP - Les violences ont fait rage jeudi en Syrie avec la mort de 62 personnes, en majorité des civils tués sous les balles des troupes régulières, malgré un appel du Conseil de sécurité de l'ONU à cesser le feu.

Cet appel a été jugé insuffisant par le chef du Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition. "Il ne répond pas aux besoins réels du peuple qui attend des mesures à la hauteur du drame qu'il vit", a dit Burhan Ghalioun en allusion à la répression de la révolte depuis un an.

Les violences ont précédé des manifestations prévues vendredi, comme chaque semaine depuis le début de la contestation mi-mars 2011, à l'appel des militants, cette fois-ci en solidarité avec Damas, touchée ces derniers jours par des combats meurtriers entre soldats et déserteurs et par des attentats.

Le même jour et dans le but d'accroître la pression sur le régime, l'Union européenne doit adopter de nouvelles sanctions contre des personnalités syriennes, qui viseront Asma al-Assad, l'épouse du président Bachar al-Assad, dont les avoirs seront gelés.

Ces sanctions suivront la déclaration du Conseil de sécurité de l'ONU qui a "exhorté" mercredi M. Assad et ses opposants à "appliquer immédiatement" un plan de sortie de crise élaboré par Kofi Annan, émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe.

Les autorités syriennes n'ont pas encore répondu.

Elles ont en revanche accentué la répression, comme à chaque nouvelle initiative diplomatique visant à mettre fin à l'effusion de sang qui a coûté la vie à plus de 9.100 personnes en un an, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Les troupes gouvernementales ont ainsi mené des assauts jeudi contre plusieurs villes, utilisant l'artillerie lourde et tuant au moins 35 civils à Homs et Hama (centre), Idleb (nord-ouest) et Deraa (sud), selon l'OSDH.

A Sarmine, dans la province d'Idleb, "nous avons répondu aux tirs des blindés avec tout ce que nous avions à notre disposition mais cela n'a servi à rien. Nous combattons désormais au corps à corps", a affirmé à l'AFP Abou Adel, un commandant rebelle.

Les chars bloquaient la route vers la ville voisine de Bineche, empêchant l'évacuation des blessés et la fuite des civils, a rapporté Abou Salem, lui aussi engagé dans les combats à Sarmine.

Sur cette route menant vers la Turquie, "les forces gouvernementales ont tiré sur un bus transportant des réfugiés", faisant 10 morts, dont deux femmes et trois enfants, selon des militants.

En outre 18 soldats et neuf déserteurs ont péri dans des combats dans ces mêmes régions ainsi qu'à Lattaquié (nord-ouest), a ajouté l'OSDH.

L'organisation internationale Human Rights Watch a accusé l'armée d'utiliser à Qousseir et Idleb la même stratégie que dans la ville de Homs: bombardements, tireurs embusqués et attaques de civils tentant de fuir.

La région de Damas, gagnée par les violences, est désormais dotée d'un conseil militaire chargé "des opérations" contre l'armée régulière, a annoncé dans une vidéo le colonel dissident Khaled Mohamed al-Hamoud, de l'Armée syrienne libre (ASL).

Face à cette escalade, le chef du CNS, tout en jugeant la déclaration de l'ONU comme un "pas supplémentaire dans un processus de réaction plus large contre le régime d'Assad", il a appelé à "des résolutions plus fortes".

Avant lui, Samir Nachar, membre du bureau exécutif du CNS, a estimé que la déclaration donnait "l'opportunité à Assad de poursuivre sa politique de destruction pour écraser la révolution du peuple syrien", excluant toute solution avant un départ du président.

Ce dernier assure cependant disposer du soutien de son peuple pour réprimer ses détracteurs, qualifiés de "gangs terroristes".

Le plan proposé par M. Annan prévoit "un arrêt de toutes les formes de violence par toutes les parties" sous supervision de l'ONU dont une équipe est déjà sur place, "l'acheminement de l'aide humanitaire" et la libération des détenus.

Dans la pratique, les troupes devraient cesser leurs opérations contre les villes rebelles et se retirer dans leurs casernes. Entretemps, M. Annan "s'emploierait" à ce que les rebelles "s'engagent de même à arrêter les combats", selon le plan.

Une déclaration du Conseil a moins de poids qu'une résolution mais elle a l'avantage d'avoir obtenu l'aval des 15 membres, dont la Russie et la Chine, des alliés de Damas qui ont déjà opposé leur veto à deux résolutions.

En plus de cet appel, la Turquie -- qui doit accueillir le 1er avril une nouvelle réunion des "Amis de la Syrie" en présence de la chef de la diplomatie américaine Hillary Clinton -- a jugé nécessaire un "plan d'action" international pour mettre fin à la "tragédie humaine" en Syrie.

Auparavant, les diverses composantes de l'opposition, qui peine à afficher un front uni, doivent se retrouver à Istanbul pour coordonner leurs revendications.