
Les troupes rwandaises déployées aux côtés de l'armée régulière en République démocratique du Congo ont commencé à se retirer. Ce retrait fait craindre des représailles de la part des rebelles hutus contre des civils.
REUTERS - Des troupes rwandaises ont commencé mercredi à évacuer l'est de la République démocratique du Congo (RDC), ce qui fait craindre de nouvelles représailles contre les civils de la part des rebelles hutus rwandais qui ont été la cible d'une offensive d'un mois dans la région.
Le Rwanda a envoyé plus de 3.500 soldats en janvier dans la province congolaise du Nord-Kivu pour des opérations conjointes contre les rebelles des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), parmi lesquels figurent des Hutus impliqués dans le génocide rwandais de 1994.
Selon des responsables, tous les soldats rwandais auront quitté la RDC dans les prochains jours.
Les adversaires politiques du président congolais Joseph Kabila ont exercé des pressions à cette fin en notant que les incursions rwandaises au Congo lors de deux guerres passées ont donné lieu à des accusations de viols et de pillages des ressources naturelles.
Des centaines de soldats ont franchi la frontière à Goma, capitale du Nord-Kivu, à pied ou à bord de camions militaires. Ils étaient acclamés à leur retour en territoire rwandais.
Au sein de la Mission de l'Onu au Congo (Monuc) - la plus importante force de maintien de la paix déployée dans le monde par l'organisation -, on redoute que le retrait de l'armée rwandaise n'incite les FDLR à prendre une revanche sur les civils.
"Le retrait planifié des soldats (rwandais) inspire des inquiétudes pour la protection de la population civile, étant donné la capacité et le professionnalisme limités des troupes (congolaises)", dit une note interne de l'Onu dont Reuters a eu connaissance.
MASSACRES
"Bien que les FDLR aient évacué l'essentiel de la région à l'arrivée des forces conjointes, il est probable qu'ils attendent dans la brousse que les forces se retirent pour revenir exercer des représailles sur les civils perçus comme des traîtres", ajoute la note.
"Dans ce contexte, les incidents marqués par des attaques des FDLR contre des populations civiles, avec pillages, viols et meurtres, sont en hausse."
L'Onu enquête sur une quinzaine de meurtres et près de 90 enlèvements perpétrés entre les 15 et 21 février sur des villageois accusés de collaboration avec la force conjointe, dit le rapport adressé à Alan Doss, chef de la Monuc.
L'organisation Human Rights Watch a accusé ce mois-ci les rebelles d'avoir massacré plus de cent civils qu'ils accusaient de les avoir trahis depuis le début des opérations conjointes le 20 janvier.
La Monuc s'est vu reprocher de ne pas avoir empêché les attaques de civils au cours des opérations.
La RDC et le Rwanda, qui déplorent que l'Onu ne s'attaque pas aux rebelles, ont qualifié l'opération de succès.
Le général congolais John Numbi, commandant de l'offensive conjointe, a dit mardi que les troupes des deux pays avaient tué 89 hommes des FDLR et en avaient forcé 140 autres à se rendre.
"Les opérations conjointes au Nord-Kivu (...) ont prouvé au monde entier que les Africains pouvaient accomplir beaucoup de choses sans attendre nécessairement une aide extérieure", a dit à Goma le général Jérôme Ngendahiman, adjoint de Numbi.
Le gouvernement de la RDC cherche à élargir le front ouvert contre les FDLR, dont les effectifs sont estimés à 6.000 hommes, en portant les opérations dans la province du Sud-Kivu avec le soutien de la Monuc "jusqu'à ce que la menace soit éliminée".
Mais le document de la Monuc affirme que sans la présence du Rwanda, la Monuc aurait du mal à protéger les civils.
Le Haut Commissariat de l'Onu pour les réfugiés (HCR) a annoncé mardi que les attaques des FDLR étaient en train de provoquer une nouvelle vague de déplacements d'habitants.
Des troupes de l'Ouganda poursuivent aussi dans l'Est congolais les rebelles ougandais de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA), qui ont tué près de mille villageois en représailles aux opérations engagées contre eux.