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"Si je me présente, c'est pour être au second tour et gagner", a déclaré François Bayrou en annonçant sa candidature à la présidentielle. Mais le chef de file du Modem peut-il faire un meilleur score qu'en 2007 ? Éléments de réponse.

François Bayrou, patron du Modem et troisième homme de la dernière présidentielle avec 18,5 % des votes, a annoncé mercredi sa candidature en 2012 en appelant "le peuple français" à "commencer un autre chapitre de son histoire". Avec pour objectif : faire au moins aussi bien qu''il y a cinq ans...  Peut-il réitérer cet exploit ?

Mercredi à la Maison de la Chimie, à Paris, le dirigeant centriste, qui brigue à 60 ans la présidence pour la troisième fois consécutive, a estimé être le seul à pouvoir construire ”une majorité nouvelle” réunissant les modérés de droite et de gauche autour d’un objectif commun : mener ”une guerre” à la crise en se fondant sur les forces du pays et en réhabilitant le ”label France”.

L’espace au centre

À en croire le sondage BVA publié en novembre, le patron du Modem a toutes ses chances. Selon l’étude, 47 % des Français ne souhaitent ni la victoire de François Hollande ni celle de Nicolas Sarkozy, et 43 % souhaitent le succès d'un autre candidat. "L’espace au centre n’a jamais été aussi grand", assure François-Xavier Pénicaud, président des Jeunes démocrates.

Plusieurs sondages l'ont déjà désigné comme le candidat le plus crédible au centre de l’échiquier politique face aux autres centristes, "des figurants" estime Céline Bracq, directrice adjointe de l'institut de sondage BVA Opinion. Le candidat du Nouveau centre Hervé Morin compte moins de 1 % des intentions de vote et le président du Parti radical Jean-Louis Borloo est sorti de la course.

Actuellement crédité de 9 % d'intentions de vote, François Bayrou a déjà gagné trois points en quelques semaines. "Il peut faire aussi bien qu’en 2007 mais ce sera très difficile", commente pour sa part Pierre Taribo, auteur de "François Bayrou ou l'obsession de l'Élysée" (à paraître en février 2012). Pour cause, "Bayrou a perdu beaucoup de potentiel d’électeurs", souligne Céline Bracq. En 2006, 43 % des Français estimaient pouvoir voter pour lui. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 29 %.

Car depuis la présidentielle de 2007, l’ancien patron de l’UDF a multiplié les revers : Durant l’entre-deux tours, Bayrou choisit de ne pas donner de consigne de vote – on apprendra par la suite qu’il a voté blanc -, se coupant ainsi des deux partis et de son électorat. L’année suivante, il perd la municipalité de Pau et en 2009, il mène une désastreuse campagne pour les élections européennes. À cela s'ajoute la désertion des lieutenants de son parti au profit du Nouveau centre, comme c'est le cas pour Hervé Morin, ou de l’UMP, à l'image de Jean-Marie Cavada.

Après quatre années de traversée du désert, le Béarnais fait son retour sur la scène médiatique en août 2011 à l’occasion de la sortie de son livre, qui fait office de programme, "2012, État d’urgence". L’occasion pour lui de rappeler que la lutte contre la dette était un thème majeur de sa précédente campagne. Réputé orgueilleux, le Béarnais revient la tête haute : "Si je me présente, c'est pour être au second tour et gagner", a-t-il déclaré mercredi.

"Troisième femme"

Mais selon le dernier sondage publié le 3 décembre, la concurrence s'annonce rude. La patronne du Front national Marine Le Pen est actuellement créditée entre 15 et 20 %. "Pour l'instant, c'est elle sa plus grande rivale. C'est elle qui est la troisième femme", commente Céline Bracq.

Bayrou peut toutefois prétendre à un score honorable "s'il mise sur les faiblesses de ses adversaires, en premier lieu Sarkozy, Hollande et Le Pen", ajoute-t-elle. "Il peut notamment attirer les déçus du sarkozysme et l’électorat de centre droit qui n'adhèrent pas aux positions du chef de l'État sur la sécurité et l’immigration."

Mais la candidature Bayrou est loin d’inquiéter l’UMP. "Lorsque je suis sur le terrain, je ressens plus la menace FN que le potentiel de Bayrou", constate Chantal Brunel, député UMP de Seine-et-Marne qui reconnait au candidat Modem un "langage fort sur le déficit". Néanmoins, elle estime que l’électorat de centre droit lui préférera Nicolas Sarkozy pour contrer le vote FN.

Objectif : Matignon ?

Européen convaincu, François Bayrou devra aussi miser sur des thèmes qui lui sont chers, comme l’Europe et la dette. "S’il fait de ces dossiers son cheval de bataille, il peut espérer grignoter également l’électorat de François Hollande", avance Céline Bracq. "La moindre faute de Hollande peut d'ailleurs être favorable au candidat du Modem".

Pour éviter que Bayrou prospère en candidat indépendant, le candidat du Parti socialiste a appelé son rival du Modem à se positionner dès à présent. "Je n'écarterai personne [dans mon gouvernement] mais à la condition que les formations politiques ou les dirigeants politiques aient appelé à voter pour moi au second tour", a déclaré le député de Corrèze. Le Béarnais peut se féliciter d'être si rapidement courtisé...

La preuve, selon Pierre Taribo, que le temps Bayrou n’est pas encore fini. "Même s’il s’agit sans doute de sa dernière candidature à la présidentielle ", reconnaît-il. "En fonction du score, il saura s’il a encore un rôle à jouer dans le jeu politique". Et de poursuivre : "Selon moi, l’objectif de Bayrou est en fait Matignon. Il peut y arriver s’il obtient un score à deux chiffres".