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Des milliers d'Égyptiens place Tahrir pour une manifestation de "la dernière chance"

Des milliers de contestataires égyptiens sont de nouveau rassemblés sur la place Tahrir pour protester contre la présence au pouvoir du Conseil suprême des forces armées, qui a nommé Kamal al-Ganzouri comme Premier ministre.

AFP - Des dizaines de milliers d'Egyptiens se sont rassemblés vendredi place Tahrir au Caire pour réclamer à nouveau le départ du pouvoir militaire, avec le soutien de la prestigieuse institution musulmane d'Azhar et de l'opposant Mohamed ElBaradei, candidat déclaré à la présidence.

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Place Tahrir, vendredi à 11h
Des milliers d'Égyptiens place Tahrir pour une manifestation de "la dernière chance"

Cette manifestation dite "de la dernière chance" se déroulait sans incidents en milieu d'après-midi, après plusieurs jours marqués par de violents affrontements au Caire et dans d'autres villes du pays, qui ont fait officiellement 41 morts et plus de 3.000 blessés.

Elle survient à trois jours du début des premières législatives de l'après-Moubarak que l'armée a maintenu à la date prévue malgré la crise actuelle alors que la Maison Blanche a plaidé pour un "transfert complet de pouvoir à un gouvernement civil" et un retour "dès que possible" à une gouvernance civile en Egypte.

Des milliers de partisans de l'armée se sont quant à eux rassemblés à quelques kilomètres de Tahrir, dans le quartier d'Abbassiya, en scandant "L'armée, la police et le peuple, d'une seule main".

Sur le plan politique, l'armée a nommé au poste de Premier ministre Kamal el-Ganzouri (78 ans), un ancien chef de gouvernement (1996-99), selon la télévision d'Etat. M. Ganzouri remplace Essam Charaf, qui a démissionné avec le reste du gouvernement en raison de la crise actuelle.

Economiste formé aux Etats-Unis, il était devenu très discret ces dernières années, avant de réapparaître dans la presse après le renversement de M. Moubarak en février.

Il aura la rude mission d'affronter la plus grave crise que traverse le pays depuis la chute de l'ancien raïs, à quelques jours du début lundi de législatives cruciales pour le processus de transition politique de ce pays du "printemps arabe".

Après une semaine d'occupation de la place Tahrir, le quotidien gouvernemental Al-Ahram titrait en une "Le vendredi de la dernière chance... la stabilité ou le chaos". Un autre quotidien gouvernemental, Al-Akhbar, affirmait qu'il s'agissait du "vendredi du tournant".

Vendredi, les manifestants scandaient "Maréchal, réveille toi, c'est ton dernier jour!", faisant allusion au maréchal Hussein Tantaoui, chef d'Etat de fait du pays.

"On a beaucoup patienté, maintenant il y a une crise de confiance", explique à l'AFP Hazem Diab, 26 ans, employé dans l'informatique.

Mohamed ElBaradei, ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la paix en 2005, s'est joint à la foule sur Tahrir, un drapeau égyptien sur les épaules, pour participer à la traditionnelle prière musulmane du vendredi.

Le grand imam de l'institution théologique renommée d'Al-Azhar, cheikh Ahmed el-Tayyeb, a fait savoir par un représentant aux manifestants de Tahrir qu'il "soutient et prie pour votre victoire". C'est la première depuis de nombreuses années que l'imam d'Al-Azhar, désigné par le président de la République, adopte des positions opposées au pouvoir.

L'armée a toutefois écarté jeudi une nouvelle fois l'hypothèse d'un départ immédiat du pouvoir, des hauts gradés assurant que cela reviendrait à "trahir le peuple".

L'armée a annoncé mardi une présidentielle avant fin juin 2012, par laquelle elle s'est engagée à remettre le pouvoir exécutif à un chef d'Etat élu, mais les manifestants estiment cette annonce insuffisante.

Outre le retour à une gouvernance civile, ils ont également placé ce vendredi sous le slogan "le droit des martyrs", pour exiger la poursuite des responsables de la mort de 41 personnes décédées, dont 36 au Caire.

Au lendemain d'un accord conclu jeudi entre manifestants et forces de l'ordre pour faire cesser les violences à Tahrir, le calme régnait vendredi sur la place.

La police a muré la rue Mohamed Mahmoud, menant au ministère de l'Intérieur et théâtre des heurts les plus violents, a constaté un journaliste de l'AFP.

Par ailleurs, Reporters sans frontières a une nouvelle fois déconseillé aux médias internationaux d'envoyer en Egypte des femmes journalistes, après une série d'agressions sexuelles.

Une journaliste de la chaîne France 3 a déclaré avoir été violemment frappée et victime d'une agression sexuelle de la part d'hommes en civil jeudi au Caire, après qu'une journaliste égypto-américaine a fait état de violences sexuelles de la part de policiers.

A l'étranger, le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle a lui dit avoir "espoir" que la révolution aboutira.

D'autre part, le gazoduc égyptien livrant du gaz à Israël et à la Jordanie a été frappé vendredi par une nouvelle explosion d'origine criminelle, la huitième cette année, des actes non-revendiqués.