Au lendemain de la signature à Riyad (Arabie saoudite) d'un accord sanctionnant le transfert du pouvoir au Yémen, au moins cinq manifestants ont péri sous le feu de partisans du chef de l'État, Ali Abdallah Saleh.
AFP - Des partisans du président yéménite Ali Abdallah Saleh ont ouvert le feu jeudi à Sanaa sur une manifestation réclamant sa traduction en justice, faisant cinq morts, au lendemain d'un accord sur le transfert pacifique du pouvoir.
Les manifestants étaient descendus dans les rues par milliers, à l'appel des "Jeunes de la révolution" à l'origine du mouvement de contestation populaire contre M. Saleh, pour protester contre le fait que l'accord signé mercredi à Ryad accorde l'immunité au président et à ses proches.
Des hommes armés au Yémen ont relâché, jeudi 24 novembre, une Française et deux Yéménites travaillant pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), deux jours après leur enlèvement dans la province méridionale de Lahej, rapportent des autorités locales.
Selon la même source, la Française, d'origine marocaine, son chauffeur et son traducteur ont été libérés après une intervention des responsables locaux et de médiateurs auprès des preneurs d'otages. Ils auraient demandé la libération de parents détenus par les autorités yéménites dans le port d'Aden. (Reuters)
"Pas de garanties, traduction en justice", scandaient les jeunes partis de la Place du Changement, où ils campent depuis neuf mois pour réclamer la démission du chef de l'Etat.
Des partisans de M. Saleh en civil ont ouvert le feu en leur direction lorsqu'ils sont arrivés rue Zoubeiri, ligne de démarcation entre les zones tenues par les militaires dissidents qui protègent la Place du Changement et les secteurs de Sanaa contrôlés par les forces fidèles au président.
Cinq manifestants ont été tués et 34 blessés, selon un nouveau bilan de l'hôpital de campagne installé par les protestataires sur la Place du Changement.
Un bilan précédent faisait état de quatre morts et 27 blessés.
Le président yéménite Ali Abdallah Saleh a dénoncé ce jeudi les tirs attribués à ses partisans et qui ont fait 5 morts à Sanaa parmi des manifestants réclamant sa traduction en justice.
Cité par l'agence officielle Saba, Saleh a "dénoncé les actes de violence qui se sont produits dans la capitale et qui ont fait des tués et des blessés" parmi les manifestants.
Le président contesté, au pouvoir depuis 33 ans, avait signé mercredi soir à Ryad un accord de sortie de crise avec l'opposition parlementaire, en vertu duquel M. Saleh doit quitter le pouvoir dans un délai de trois mois.
Les manifestants s'en sont également pris à l'opposition parlementaire, le Forum Commun, qui a signé l'accord avec M. Saleh.
"Forum Commun, al-Islah, partez après le boucher (le président)", ont scandé les jeunes. Le parti islamiste al-Islah est la principale composante du Forum Commun, qui regroupe également le Parti socialiste yéménite, parti au pouvoir dans l'ex-Yémen du sud.
La situation était tendue après la fin de la manifestation à Sanaa, des hommes armés fidèles et hostiles au régime étant déployés dans les rues, selon le correspondant de l'AFP.
Une manifestation réclamant la traduction en justice du président Saleh s'est également déroulée à Taëz, une ville à la pointe de la contestation au sud de Sanaa.
Après la signature par le président Saleh mercredi soir à Ryad de l'accord sur le transfert pacifique du pouvoir, des représentants du parti au pouvoir et des partis de l'opposition avaient signé un mécanisme d'application de ce plan, en vertu duquel M. Saleh doit quitter le pouvoir dans un délai de trois mois.
Aux termes de l'accord, M. Saleh doit remettre le pouvoir pour une période intérimaire à son vice-président, Abd Rabbo Mansour Hadi, un homme de consensus, en échange de l'immunité pour lui-même et ses proches. Son fils aîné et ses proches contrôlent les principaux organes de la sécurité au Yémen.
M. Hadi devra procéder à la formation d'un gouvernement d'union avec l'opposition, qui sera chargé de superviser un dialogue national et d'élaborer une nouvelle Constitution.
Mais M. Saleh demeurera président à titre honorifique pendant une période de 90 jours, au cours de laquelle il ne pourra pas contester les décisions de son successeur.
A l'issue de ce délai, M. Hadi sera désigné président pour une période intérimaire de deux ans, au terme de laquelle des élections législatives et présidentielle seront organisées.
Les jeunes contestataires qui campent depuis le mois de février sur la place du Changement avaient dès mercredi soir annoncé leur opposition à cet accord en raison des garanties d'immunité qu'il accorde à M. Saleh.
La répression de la révolte populaire et les affrontements entre troupes rivales ont fait des centaines de morts depuis janvier.