Le procureur de Douai a demandé le dessaisissement de deux juges lillois dans l'affaire de proxénétisme liée à l'hôtel Carlton de Lille, estimant que l'impartialité de la justice pouvait être mise en cause.
AFP - A la demande du parquet de Lille et au grand dam de la défense, le procureur général de Douai a demandé mardi le dessaisissement des deux juges lillois enquêtant sur une affaire de proxénétisme liée à l'hôtel Carlton, dans laquelle un policier a été mis en examen et le nom de DSK apparaît.
Confirmant une information de RTL, le procureur Frédéric Fèvre a indiqué à l'AFP avoir fait une demande en ce sens au procureur général, lequel "a jugé que l'impartialité et la sérénité de la justice étaient susceptibles d'être mises en cause" du fait de l'implication présumée dans ce dossier d'un avocat lillois et d'un haut responsable policier du Nord.
Le parquet général de Douai a donc adressé une requête à la chambre criminelle de la cour de Cassation, qui a huit jours pour statuer, selon M. Fèvre.
Me Frank Berton, avocat du directeur de l'hôtel Carlton Francis Henrion, a dénoncé "une atteinte à l'indépendance de la justice", voyant dans la perspective d'un dépaysement "un enterrement de première classe".
"Dans cette affaire, les investigations diligentées par les juges d'instruction ont mis en évidence la mise en cause d'un avocat pénaliste réputé et d'un fonctionnaire de police qui travaille quotidiennement avec les magistrats du TGI de Lille", a fait valoir le procureur.
Le magistrat a assuré que cette demande constituait une "procédure tout à fait normale et très classique".
Me Berton n'y voit quant à lui "pas une décision judiciaire, mais une décision politique", jugeant "évident" que Dominique Strauss-Kahn "ne sera pas entendu ou alors pas avant des mois et des mois". "On était en train de toucher du doigt les véritables responsables", a poursuivi l'avocat.
Interrogé à ce sujet, le procureur n'a souhaité faire aucun commentaire.
Le 16 octobre, l'ex-patron du FMI avait demandé à être "entendu le plus rapidement possible par les juges" en charge de l'enquête afin que "soit mis un terme aux insinuations et extrapolations hasardeuses et (...) malveillantes".
Dans cette affaire, huit personnes ont été mises en examen, parmi lesquelles le propriétaire et des responsables de l'hôtel Carlton de Lille, ainsi qu'un avocat et le commissaire Jean-Christophe Lagarde, chef de la sûreté départementale du Nord.
Ce dernier est soupçonné, avec des entrepreneurs nordistes, d'avoir participé à la mise en relation de prostituées avec Dominique Strauss-Kahn.
"Les deux seuls (l'avocat Emmanuel Riglaire et le commissaire Lagarde, ndlr) qui justifient qu'on dépayse ce dossier sont sous contrôle judiciaire à la demande du procureur", a ajouté Me Berton.
Parmi les mis en examen figure le patron d'une filiale d'Eiffage, qui aurait reconnu avoir réglé des frais liés à des parties fines auxquelles auraient notamment participé DSK et le commissaire divisionnaire Jean-Christophe Lagarde.
Le groupe de BTP a déposé lundi une plainte avec constitution de partie civile pour abus de biens sociaux, qui vise notamment cet entrepreneur.
L'affaire semble avoir un lien avec la mise en examen début octobre à Courtrai, en Belgique, de quatre personnes pour des faits de proxénétisme. Parmi elles se trouvent un chef d'entreprise français, Dominique Alderweireld, surnommé "Dodo la Saumure", ainsi que son épouse.