La présidente argentine sortante est donnée grande favorite de l'élection présidentielle de ce dimanche. Plus populaire que jamais, elle devrait rempiler pour un second mandat de quatre ans. Chronique d'un triomphe annoncé.
L’actuelle présidente Cristina Fernandez de Kirchner est considérée comme la grande favorite de l'élection présidentielle qui se déroule ce dimanche, en Argentine, une journée au cours de laquelle les électeurs seront également amenés à renouveler la moitié de leurs députés et un tiers de leurs sénateurs. Les observateurs politiques prédisent un raz-de-marée en sa faveur, le plus important jamais observé depuis que ce pays d’Amérique latine a retrouvé le chemin de la démocratie en 1983.
Lors des primaires en août, ouvertes pour la première fois à tout citoyen argentin, Cristina Kirchner a obtenu plus de 50 % des voix. Depuis cette date, le nombre de ses partisans n’a fait que s’accroître, affirment les instituts de sondage. La grande popularité dont elle jouit aujourd’hui contraste avec le désamour des électeurs il y a quelques années. En 2009, au plus fort de la crise économique, Cristina Kirchner n’était créditée que de 20 % d’opinions positives.
itCette femme de centre-gauche affronte les candidats de six différentes coalitions politiques, dont aucun n’arrive à dépasser la barre des 15 % d’intention de vote. Ces formations se battent pour grappiller quelques sièges au Parlement, guère plus.
Les analystes politiques expliquent le regain d’intérêt pour la chef de l’État par l’embellie économique et les créations d’emplois dont bénéficie l’Argentine actuellement. Mais pas seulement.
Des emplois et “du football pour tous”
L’Argentine s’est frayée un chemin dans la récession mondiale débutée en 2008, et affiche une croissance crâne, snobant les piètres performances de l’Europe et des États-Unis. Cette année, le taux de chômage argentin est descendu à 7,3 %, du jamais vu depuis 20 ans. Le PIB du pays a cru de 9,2 % en 2010, selon les chiffres publiés par l’agence Bloomberg en septembre.
La popularité de Cristina Kirchner semble avoir suivi la courbe de croissance économique, admet Christian Castillo, candidat pour la vice-présidence de la coalition d’extrême gauche, le Front de gauche des travailleurs (FIT). Le gouvernement Kirchner "a été aidé par la croissance économique qui a bénéficié à toute l’Amérique latine, et qui s’explique surtout par des opportunités commerciales d’exportations massives", assure Christian Castillo, ajoutant qu’environ 40 % des travailleurs argentins étaient employés de façon précaire dans le marché noir.
itSelon les observateurs argentins, Cristina Kirchner a pris, en matière économique, des risques – elle a, par exemple, fait voter des mesures qui restreignent les importations de biens et favorisent les subventions pour les entreprises industrielles qui mènent une politique écologique – qui ont porté leurs fruits.
Mais le volet économique ne suffit pas à expliquer le succès de la chef de l’État, analyse Soledad Riesnik, expert en sciences politiques et en opinion publique à l’Université de Buenos Aires pour qui une partie de la popularité de la politicienne est à porter au crédit du programme "Football pour tous".
Lors d’une décision, jugée populiste par ses détracteurs, l'administration Kirchner a obligé la Fédération argentine de football à mettre un terme à l’accord passé avec le principal média du pays pour diffuser tous les matchs sur une chaîne publique. Les rencontres de la première ligue ont ainsi été visionnées par 20 millions de téléspectateurs, soit la moitié de la population.
“Cette initiative 'Football pour tous' a ouvert une ligne de communication directe entre le gouvernement et le peuple, analyse Soledad Riesnik. C’était un très bon pari de la part de Cristina Kirchner."
"La force d’un pays"
Le triomphe annoncé de Cristina Kirchner n’est pas non plus étranger aux alliances et désalliances qui ont rythmé le calendrier des forces d’opposition. Soledad Riesnik remarque que les partis politiques, même unis au sein d'une même coalition, ont mené campagne séparément. "L’opposition a commis des erreurs qu’il était impossible de corriger rapidement", ajoute le professeur.
Par contraste avec les multiples slogans lancés par l’opposition, le programme de Cristina Fernandez tient en une phrase : "La force d’un pays".
Les clips vidéo élaborés par l’équipe de campagne de la présidente sortante n’hésitent pas à verser dans l’émotionnel, rappelant combien Cristina Kirchner a dû traverser l’épreuve du deuil de son mari, l’ancien président Nestor Kirchner, mort d’une crise cardiaque il y a un an.
Cette campagne savamment orchestrée a touché la corde sensible des Argentins : ils ont ainsi l’impression que l’embellissement économique est lié au couple Kirchner. Une image de marque que les opposants de Cristina Kirchner ont bien du mal à contrer.