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Le cours de l’action de Dexia a atteint des profondeurs abyssales après la décision prise par Moody’s de placer la note de la banque franco-belge "sous surveillance négative". Les marchés s’attendent à ce que l'établissement soit démantelé.

Les agences de notation ont encore frappé. Cette fois-ci, c’est Moody’s qui a décidé, lundi soir, de placer "sous surveillance négative" la note de Dexia, laissant entendre qu'une dégradation prochaine était probable. Conséquence : le cours de l’action de la banque franco-belge a dégringolé de 20% à la Bourse de Paris, ce mardi, pour s’établir à 0,98 euro. Un niveau jamais atteint par une banque cotée...

Trois ans après le premier sauvetage de Dexia, cette chute vertigineuse remet de nouveau en question la survie de cet établissement spécialisé dans l’aide financière aux collectivités locales. Les deux principaux actionnaires de Dexia, les États français et belge, ont assuré qu’ils feraient tout pour garantir “la sécurité [financière, NDLR] des déposants et des créanciers”.

Mais, Paris et Bruxelles ont également évoqué l’option d’une “restructuration” faisant écho aux craintes des marchés financiers qui semblent convaincus qu’un démantèlement de Dexia est devenu inévitable. La banque franco-belge deviendrait alors le premier établissement financier européen coté à subir ce sort depuis le début de la crise économique de 2008.

Bis repetita

“Parmi les principales banques françaises, Dexia est celle qui est la plus exposée à la dette grecque”, confirme à France24.com Pascal de Lima, professeur d’économie à Sciences Po-Paris et économiste en chef chez Altran, une société de conseils en finances qui compte plusieurs banques hexagonales, dont Dexia, parmi ses clients. Ce spécialiste du secteur bancaire rappelle que la banque franco-belge détenait 4 milliards d’euros d’actifs toxiques grecs au deuxième trimestre 2011, “ce qui est très important pour un établissement de la taille de Dexia”.

Ce portefeuille d’actifs plombé par de la dette grecque a de quoi étonner au regard de l’histoire récente de cet établissement. Ses dirigeants avaient en effet assuré qu’ils ne se laisseraient plus avoir comme en 2008. À l’époque, la banque franco-belge avait déjà failli chuter à cause d’actifs toxiques. Elle détenait alors une trop grande quantité de "subprimes", ces fameux prêts hypothécaires qui se sont révélés hautement risqués.

Les trois États impliqués - France, Belgique et Luxembourg - n’avaient consenti à sauver Dexia qu’à condition qu’elle se recentre sur son cœur de métier et cesse toute opération boursière trop risqué. Fin 2009, les dirigeants de la banque ont assuré, lors de la présentation d’un plan de restructuration prévoyant plus de 1 000 licenciements, qu’ils ne s’adonneraient plus à des “prises de risque sur les marchés financiers”. “Il est clair aujourd’hui, qu’il s’agissait de simples déclarations d’intention et que Dexia a continué à investir dans des obligations d’État qui n’avaient que l’apparence de la sécurité mais étaient en fait des paris risqués pouvant, dans le cas de la Grèce, rapporter gros... ou bien faire perdre beaucoup d’argent”, souligne Pascal de Lima.

Du coup, la situation de 2011 ressemble beaucoup à celle de 2008 : sous la pression franco-belge, Dexia va se recentrer sur l’aide aux collectivités territoriales tout en cédant ses activités de gestion d’actifs. Ce mardi, la Caisse des dépôts et la Banque postale ont annoncé qu'elles prendraient part à la reprise de cette activité. Pour le reste, la France et la Belgique pourrait créer une sorte de banque fantoche qui n’aurait d’existence que sur le papier afin de débarrasser Dexia des 4 milliards d’euros d’actifs toxiques.

Les grands gagnants de cette affaire pourraient être les investisseurs privés qui seront, dans ce scénario, en bonne position pour racheter les activités de gestion d’actifs épurées de leurs dettes et dont Dexia devra se séparer.